Handball : après le bonheur à Tokyo, la douleur de l’argent

Éparpillées par la Norvège en finale (29-21), les Tricolores n’ont jamais été proches d’une deuxième médaille d’or d’affilée.
Méline Nocandy face à la défense des Norvégiennes, hier en finale.
Méline Nocandy face à la défense des Norvégiennes, hier en finale. (Crédits : © LTD / Baptiste Fernandez/Icon Sport)

Qu'un sélectionneur sexagénaire, en poste depuis plus de vingt ans, remporte la finale du tournoi olympique contre son grand rival : tel était le scénario rêvé. Le plan s'est déroulé sans accroc, mais le héros du film s'appelle Thorir Hergeirsson, le maître d'œuvre islandais de la Norvège, qui partage toutes ces caractéristiques avec Olivier Krumbholz. Un deuxième sacre olympique pour celui qui, pendant un quart de siècle, aura mené de somptueuses batailles face à son confrère, poliment salué.

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Le Lorrain a eu le temps de réaliser qu'il n'aurait pas droit au final tant souhaité. Son expérience, riche de sept participations aux Jeux olympiques, lui a indiqué la direction du vent tôt dans la rencontre.

On jouait depuis cinquante-huit minutes et l'écart venait de remonter à 7 buts en faveur de la Norvège quand il s'est mis à applaudir ses joueuses, longuement. Moins pour les encourager à s'accrocher que pour les remercier. Pour la médaille d'argent, qui aura une saveur plus tard, mais surtout pour l'aventure commune qui s'est peut-être achevée. Il a eu 66 ans pendant le tournoi et pourra faire valoir ses droits à la retraite dans quelques mois. Lui seul sait s'il accompagnera le prochain titulaire du poste à l'Euro en novembre, comme le souhaitent ses dirigeants. Les accolades d'après-match ont eu un petit goût d'adieux. Krumbholz a pris ses joueuses dans ses bras un peu plus longtemps qu'il se l'était permis jusqu'à présent. Il n'y a jamais eu d'affect dans ses choix sportifs ; la compétition achevée, il a fait le choix de partager enfin ses émotions.

Les Tricolores ont été largement battues (29-21) mais ont atteint la place qui était sûrement la leur. La deuxième sur leur troisième podium olympique d'affilée depuis 2016. La flamme a brûlé cinq minutes, et contre la nation qui écrase le handball féminin cela a souvent été moins. Alors que les deux équipes étaient à touche-touche, un but encaissé juste avant la pause a fait mal (15-13). La Norvège a enchaîné dès la reprise et l'écart n'a cessé de se creuser. Remplacée après trente minutes de bonne facture, Laura Glauser est revenue pour le dernier quart d'heure mais le match avait basculé depuis plusieurs minutes déjà. « Allez les filles, allez, allez », s'est époumonée Tamara Horacek, la meilleure Française des Jeux, alors que ses partenaires n'avaient marqué qu'un but en dix minutes.

« Merci les Bleues »

Le fair-play commande de reconnaître les mérites d'une adversaire quand elle est plus forte. Katrine Lunde l'a été bigrement. Trois médailles d'or pendent désormais au cou de la gardienne norvégienne, qui regrette de ne pas voir souvent sa fille. Les handballeuses tricolores aimeraient beaucoup qu'elle prenne plus de temps pour les siens : à 44 ans, cela fait deux décennies qu'elle détourne leurs tirs et gâche leurs week-ends. Sa longévité vaut bien celles de Hergeirsson et de Krumbholz : Lunde était déjà la gardienne des championnes olympiques de Pékin. Et la meilleure du tournoi, avec ça.

Si la France a bâti de beaux succès sur son usine à champions, que dire de la Norvège, un pays de 5,5 millions d'habitants qui a désormais gagné cinq des sept finales internationales qui l'ont opposé à la France depuis 1999. La plus récente, au Mondial 2023, avait tourné à l'avantage des Bleues. Mais voilà, battre deux fois de suite les handballeuses norvégiennes est à peu près aussi simple que d'infliger deux uppercuts à Mike Tyson sans qu'il se rebiffe. La capitaine Estelle Nze Minko a écrasé une larme dans les bras de Stine Oftedal, la cheffe d'orchestre qui, depuis cinq ans, fait gagner leur club hongrois, Györ. Hier, ses cinq buts et ses passes magiques ont assommé les championnes olympiques en titre.

Trente minutes après leur déception, la plupart des Françaises avaient le sourire sur le podium, achevé sur un clapping entre médaillées puis une vibrante Marseillaise. « Merci les Bleues », ont chanté les spectateurs du stade Pierre-Mauroy, qui ont poussé à l'unisson de tous les publics de ces Jeux. Lors de la présentation des équipes, le vacarme était tel que l'on n'a pas entendu le speaker prononcer le nom des joueuses. Il y eut aussi des « Merci Olivier » et, même en ce lieu, on n'a pas douté qu'ils soient adressés à Krumbholz plutôt qu'au président du Losc. Les médaillées d'argent, les membres du staff et les supporters ont étiré la soirée le plus longtemps possible. Personne n'aime la fin des belles histoires, qu'elles durent quinze jours ou vingt ans.

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