Les syndicats agricoles « prennent acte » des résultats des élections législatives et de l'instabilité politique qui en découle, ont déclaré, de manières très proches, la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), les Jeunes Agriculteurs et la Coordination rurale (CR). Ils ne sont pas pour autant prêts à relâcher la pression et à renoncer aux victoires obtenues depuis le début de l'année grâce à la mobilisation des agriculteurs, laissent-ils entendre dans des communiqués diffusés lundi.
« Quelle que soit l'instabilité qui pourrait découler de cette situation, la FNSEA restera ferme sur ses positions », met en garde le syndicat majoritaire.
« Comme sur tant d'autres sujets, Jeunes Agriculteurs demande de ne pas prendre en otage l'agriculture dans des considérations politiciennes », ajoute l'organisation alliée avec la FNSEA.
Le projet de loi d'orientation agricole « à l'agenda du Sénat »
Les syndicats agricoles appellent donc les nouveaux députés à s'organiser au plus vite pour remettre rapidement à l'ordre du jour « les travaux législatifs et réglementaires en cours », avant la dissolution de l'Assemblée nationale. Premier entre eux, le projet de loi d'orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture (PLOA), qui avait été approuvé par l'Assemblée nationale en première lecture le 29 mai.
Même la Coordination rurale, classée plutôt à droite, et qui s'était montrée critique face au texte retenu par les députés, incite le Parlement à « inscrire au plus vite la loi d'orientation agricole à l'agenda du Sénat pour donner un cadre législatif à l'agriculture de demain ». Les Jeunes Agriculteurs insistent en particulier sur la nécessité « de travailler collectivement, pragmatiquement », sur deux sujets qui étaient au centre du projet de loi : « Le renouvellement des générations et la souveraineté agricole et alimentaire ».
« Remise à plat » de la loi Egalim
D'autres mesures très attendues par l'ensemble des syndicats sont celles visant à améliorer les revenus des agriculteurs. Avant les élections européennes, une mission parlementaire avait été confiée à deux députés Renaissance, Alexis Izard et Anne-Laure Babault. Objectif ? Concevoir les principaux axes d'une nouvelle réforme des lois dites « Egalim ». Alors qu'ils étaient presque prêts à rendre leurs conclusions, aucun des deux n'a finalement été réélu lors des élections législatives anticipées.
La CR demande néanmoins explicitement « d'inscrire au plus vite (à l'ordre du jour du Parlement, ndlr) la remise à plat de la loi Egalim afin de nous protéger des importations déloyales et d'assurer un revenu décent aux producteurs agricoles ».
Eaux et phytosanitaires
La FNSEA évoque encore des projets de textes pour « les moyens de production et la dignité des agriculteurs ». Le syndicat fait référence aux mesures visant à simplifier le contentieux autour des réserves d'eau prévues dans le PLOA, et celles concernant les produits phytosanitaires, notamment la proposition de loi sur la séparation vente-conseil et le conseil stratégique. Le syndicat majoritaire demande d'ailleurs carrément « aux députés désormais élus de se saisir immédiatement des 27 propositions formulées et portées auprès des candidats », « en cohérence avec l'ensemble des revendications portées depuis l'automne dernier ».
La CR exige enfin « d'étudier (ses, ndlr) propositions pour la future loi de finances, visant à mettre en place une fiscalité plus juste ».
« Un dangereux sentiment de défiance »
Pour mieux peser, les syndicats agitent le spectre d'une nouvelle mobilisation des agriculteurs à l'automne, lorsque ces derniers seront moins pris par les travaux dans les champs. « Le monde agricole ne peut rester plus longtemps sans réponse : cela ne ferait qu'entretenir un dangereux sentiment de défiance vis-à-vis des Pouvoirs publics », écrit la FNSEA.
« Sans une action rapide des députés et du gouvernement, l'automne sera celui de la mobilisation de notre profession », met en garde, explicitement, la CR.
Les élections des Chambres d'agriculture en janvier restent en effet un moteur puissant de concurrence entre syndicats dans l'incarnation du mécontentement agricole :
« La Coordination Rurale appelle tous les agriculteurs qui subissent une trop forte pression économique, administrative à se signaler et à témoigner auprès de nous dans la plus grande confidentialité », ajoute-t-elle d'ailleurs dans son communiqué.
La Confédération paysanne prône « des politiques de transformation des systèmes agricoles » La Confédération paysanne affiche un ton et des revendications différents dans un communiqué publié mardi. Le syndicat classé à gauche se dit clairement « soulagé » que le Rassemblement national n'ait pas obtenu la majorité, réclame « un projet de rupture avec les politiques libérales » et incite les « forces de gauche arrivées en tête » « à travailler ensemble à la mise en œuvre de leur programme ». Plus spécifiquement, le syndicat, selon qui « aucune réponse structurelle n'a été apportée ces derniers mois suite aux colères agricoles », prône « des politiques de transformation des systèmes agricoles ». Il suggère au nouveau gouvernement plusieurs chantiers : l'établissement de prix minimum garantis, la sortie des accords de libre-échange et de l'OMC, l'interdiction de la spéculation alimentaire, mais aussi une régulation du marché foncier et un meilleur accompagnement de la transition agroécologique, de l'adaptation au changement climatique et de l'installation-transmission.
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