Guerre en Ukraine : la conférence pour la paix se solde par la nécessité d'associer la Russie

La vaste majorité des pays réunis au premier sommet sur la paix en Ukraine, qui s’est tenu le week-end dernier en Suisse, a réitéré son soutien à l'indépendance et la souveraineté territoriale de Kiev. Ils ont également souligné que la Russie, absente de ce rendez-vous, devra être partie prenante des discussions pour arriver « à une paix durable et juste ».
Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, a fait partie des dirigeants de plus de 90 pays réunis en Suisse pour une conférence sur la paix en Ukraine.
Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, a fait partie des dirigeants de plus de 90 pays réunis en Suisse pour une conférence sur la paix en Ukraine. (Crédits : MICHAEL BUHOLZER)

[Article publié le lundi 17 juin 2024 à 09h54 et mis à jour à 12h00] Pendant tout le week-end, les dirigeants de plus de 90 pays ont été réunis en Suisse pour une conférence sur la paix en Ukraine. Objectif affiché, accentuer la pression diplomatique sur la Russie, plus de deux ans après le début de la guerre. La très grande majorité des participants - environ 80 pays, selon un décompte officiel - est parvenue à s'entendre sur un communiqué final dessinant des pistes pour mettre fin au plus grand conflit européen depuis la Seconde Guerre mondiale.

En revanche, une petite dizaine n'en fait pas partie, dont le Brésil, l'Inde et l'Arabie saoudite. Le chef de la délégation indienne Pavan Kapoor, a expliqué que la paix ne pouvait être obtenue qu'en « amenant les deux parties au conflit à un engagement sincère ».

Or, la Russie, tout comme certains de ses alliés à l'instar de la Chine, n'a pas participé à ce premier rendez-vous. La question sur « comment et quand impliquer la Russie » reste ouverte, a reconnu la présidente de la Confédération helvétique et hôte du sommet, Viola Amherd. « Il faudra trouver une méthode permettant » à la Russie et à la Chine « de se joindre à ces délibérations », a renchéri à ses côtés le président ghanéen, Nana Akufo-Addo.

« Si on parle des résultats de cette rencontre, ils sont proches de zéro », a déclaré à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov. Selon lui, beaucoup de ses participants comprennent « que toute discussion sérieuse n'a aucun avenir sans la présence de la Russie ». Le président russe Vladimir Poutine reste toutefois « toujours ouvert au dialogue et à des discussions sérieuses et substantielles », a-t-il ajouté.

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a toutefois qualifié ce sommet de « succès », venant s'ajouter notamment au déblocage de l'aide militaire américaine, après des mois de tergiversation et d'un prêt de 50 milliards de dollars garanti par les avoirs russes gelés.

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Souveraineté, retour des enfants ukrainiens, sécurité alimentaire et nucléaire

Outre d'« impliquer toutes les parties » au conflit pour faire cesser les hostilités, le texte réaffirme « les principes de souveraineté, d'indépendance et d'intégrité territoriale de tous les États, y compris l'Ukraine ». Il exige également la libération « par échange complet » des prisonniers de guerre mais aussi « de tous les enfants ukrainiens déportés et illégalement déplacés ».

« Nous avons vu environ 20.000 enfants ukrainiens enlevés à leur famille, à leur communauté et à leur pays. C'est terrifiant de dire cela, et comment le monde peut-il tourner le dos ? », s'est indigné le Premier ministre irlandais Simon Harris.

Le texte réclame aussi que tous les civils ukrainiens illégalement détenus soient « rendus à l'Ukraine ». Le communiqué final souligne par ailleurs que « la sécurité alimentaire ne doit être en aucune manière être militarisée » et qu'il faut garantir la liberté de navigation sur la mer Noire et la mer d'Azov. Les discussions sur la sécurité alimentaire ont porté sur la crise de la production et des exportations agricoles, qui a créé un choc alimentaire et inflationniste au début de la guerre, l'Ukraine étant l'un des greniers à céréales du monde. Les échanges ont non seulement porté sur les destructions de terres fertiles, mais également sur les risques posés par les mines et les munitions non explosées.

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Enfin, le texte final demande que l'Ukraine récupère un « contrôle souverain total » sur la centrale nucléaire de Zaporijjia, la plus grande centrale nucléaire d'Europe occupée par les Russes. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a mis en garde à de nombreuses reprises contre le risque d'une catastrophe nucléaire majeure dans cette installation. La « situation critique » de la centrale « n'est pas une menace théorique mais très réelle », en raison notamment des déchets qui doivent être refroidis en permanence, a répété le directeur de l'AIEA, Rafael Grossi, dans une interview au journal russe Izvestia, affirmant qu'il était important « de maintenir un dialogue constructif avec les deux parties » au conflit.

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Second sommet à venir

Le président ukrainien a expliqué que le sommet serait suivi de réunions au niveau technique et ministériel, avant un second sommet de paix « pour mettre fin à cette guerre et avoir une paix juste et durable ». Son objectif est de fédérer la communauté internationale autour d'une proposition de paix qui pourrait être présentée à Moscou.

« Nous savons que la paix en Ukraine ne sera pas obtenue en un coup. C'est un chemin à parcourir. Ce (sommet) n'était pas une négociation de paix. Parce que Poutine ne veut pas sérieusement mettre fin à la guerre », a de son côté souligné la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, dimanche.

Le sommet à peine terminé, Volodymyr Zelensky a estimé que la Russie et ses dirigeants « ne sont pas prêts à une paix juste ». La Russie peut négocier la paix « demain, si elle se retire de notre territoire », a-t-il insisté. Le dirigeant ukrainien faisait notamment référence à l'appel à la reddition lancé vendredi par Vladimir Poutine, condition sine qua non aux yeux du président russe pour des pourparlers. Il a aussi réclamé que Kiev abandonne son ambition de rejoindre l'Otan et retire ses forces des régions de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia, revendiquées par la Russie.

Des demandes qualifiées d'« ultimatum » à la « Hitler » par l'Ukraine, d'ailleurs sèchement rejetées par une majorité des participants au sommet. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, s'est défendu dimanche, assurant qu'il s'agissait « d'une initiative de paix qui tient compte des réalités du terrain » et incitant l'Ukraine à « réfléchir » à cette proposition.

Reste que l'Ukraine est en difficulté sur le plan militaire. Malgré la reprise de l'aide militaire américaine et les engagements pris par d'autres alliés, notamment européens, Volodymyr Zelensky a d'ailleurs estimé que les volumes actuels ne sont pas suffisants pour gagner la guerre. Mais il l'a assuré : « Ce n'est pas parce que nous devenons plus faibles que nous commençons à parler de paix ».

(Avec AFP)

Commentaires 8
à écrit le 17/06/2024 à 17:37
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"Guerre en Ukraine : la conférence pour la paix se solde par la nécessité d'associer la Russie" Bizarre l'Allemagne belligérante n'avait pas été invitée en 1945 à Yalta. Vive la logique de la capitulation et de la normalisation de l'horreur....

à écrit le 17/06/2024 à 16:07
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Si vous avez lu entendu en russe le dernier discours de VVP: il fallait retenir que les territoires occupés étaient russes donc violation du droit international, que les sanctions devaient être levées donc je ne suis coupable de rien etc.. et sinon c...

à écrit le 17/06/2024 à 15:02
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Le titre est assez étrange pour ne pas dire plus. La nécessité d'associer la Russie pour faire quoi? Poutine a proposé ses conditions: donnez-moi même ce que je suis incapable d'occuper, laissez l'Ukraine sans défense, enlevez les sanctions, en échan...

à écrit le 17/06/2024 à 13:46
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Cinéma bien pensant... Pendant ce temps, des hommes meurent...

à écrit le 17/06/2024 à 12:32
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"20.000 enfants ukrainiens enlevés à leur famille" Ils étaient regroupés où ? "centrale nucléaire de Zaporijjia" d'où l'implication de tout les européens à cette mascarade. "50 milliards de dollars garanti par les avoirs russes gelés" c'est pour ça...

à écrit le 17/06/2024 à 11:06
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Accepter de tenir de telles grands messes en l’absence des belligérants est une farce, qui ne peut en rien conduire à une solution. Pire elle laisse entendre que tous sont d’accord avec les positions ukrainiennes, ce qui j’espère n’est pas le cas. in...

à écrit le 17/06/2024 à 10:36
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Ce sommet était tout sauf une conférence sur la paix.

à écrit le 17/06/2024 à 10:20
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"la nécessité d'associer la Russie" pour quoi faire ? Les oblasts conquis, où des votes ont été organisés pour faire "légal" sont devenus russes par vote de la Douma, comme la Crimée, il faut juste ne pas vouloir les récupérer et tout ira bien. Ne ja...

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