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Législatives : « Aucun parti n'a de mesures pour les très petites entreprises » (Marc Sanchez, SDI)

ENTRETIEN. A l'approche du premier tour des législatives, les partis ont déroulé leurs programmes, et notamment à destination des entreprises. Pour le syndicat des indépendants et des très petites entreprises (TPE), les mesures avancées en faveur des entrepreneurs sont aux abonnés absents. Or, les TPE représentent près de 4,5 millions d'entreprises et 6,9 millions de salariés en France selon l'Insee. Interrogé par La Tribune, le président du SDI tire la sonnette d'alarme sur les sérieuses difficultés qui touchent ces entreprises.
Coline Vazquez
Marc SDI est le président du syndicat des indépendants et des TPE.
Marc SDI est le président du syndicat des indépendants et des TPE. (Crédits : SDI)

LA TRIBUNE - Quel est l'état économique des petites entreprises en France ?

MARC SANCHEZ - Nous avons adressé au gouvernement des signaux d'alerte dès 2022, car, pour certains secteurs, les difficultés se sont accentuées dès septembre de cette année-là à cause de la crise énergétique. De manière générale, on observe une succession de crises qui impactent la trésorerie des petites entreprises, associée à une consommation en baisse.

Résultat, les liquidations judiciaires ont augmenté. Plusieurs intervenants économiques prévoient entre 60.000 et 70.000 défaillances d'entreprises en 2024 - contre environ 55.000 en 2023 - et les tendances pour 2025 ne s'annoncent pas meilleures. D'autant qu'à ces liquidations, s'ajoutent les cessations volontaires. Autrement dit, des dirigeants qui décident d'arrêter d'eux même leur activité. Non pas parce que ça va mal, mais parce qu'ils n'en voient plus l'utilité, ni n'ont de perspectives.

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Quand vous additionnez les liquidations et ces cessations volontaires, le poids est lourd pour le tissu économique des petites entreprises, et surtout, ces chiffres sont complètement dissonants avec le discours actuel qui est de dire que la situation économique du pays progresse. Il n'y a pas de compréhension et, vraisemblablement, pas la volonté de changer les choses, en tout cas, il n'y en a pas eu pour l'instant.

Y a-t-il des partis ou coalitions qui présentent des mesures satisfaisantes à l'égard des TPE ?

Non, aucun n'a de mesures qui pourraient regagner la confiance des petites entreprises. On remarque néanmoins qu'il y a une prise de conscience du coût du travail, car tous les partis proposent un allègement des charges. Mais on parle d'augmentation de salaire sans prendre en compte le contexte.

Le Rassemblement national, par exemple, propose une hausse de 10% des salaires pour les personnes payées jusqu'à trois Smic, exonérée de cotisations patronales. Au regard de l'économie actuelle, quel est l'intérêt quand vous avez un chef d'entreprise qui se paye le Smic, voire moins, et qui connaît déjà des difficultés économiques... Et je ne parle pas de la proposition du Nouveau Front populaire d'augmenter le salaire minimum à 1.600 euros. Ça représente une hausse pour l'entreprise de 530 à 550 euros par salarié. Bien sûr, j'aimerais mieux payer mes employés, mais comment ?

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Du côté de la majorité présidentielle, on propose une baisse des impôts de production, mais ceux qui sont ciblés ne concernent que les entreprises plus importantes comme les PME, les ETI et les grosses sociétés, et non ceux des TP,E comme la cotisation foncière des entreprises (CFE) ou encore la taxe d'enlèvement sur les ordures ménagères, pour ne citer que ceux-là. En revanche, le projet de loi sur la simplification de la vie administrative est un élément positif.

Et la question n'est pas de dire si vous êtes de gauche ou de droite. C'est comment faire en sorte que mon entreprise soit viable. Pour les élections européennes, nous avions réalisé un sondage auprès de nos adhérents. Certains votaient par conviction, d'autres par rejet de la politique actuelle. En effet, selon notre enquête, la deuxième intention de vote chez les répondants était de faire sortir le gouvernement. C'est la première fois que je vois ça en trente ans.

En outre, 90% de nos adhérents ont indiqué qu'ils allaient voter les 30 juin et 7 juillet. Mais pas selon des programmes économiques, qui font une demi-page A4 et sont très loin des préoccupations des TPE, mais parce qu'ils ressentent une inquiétude, un désarroi et de la colère.

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Qu'attendez-vous du prochain gouvernement ?

L'idée n'est pas de savoir si on va nous aider, mais de définir les urgences sur lesquelles l'Etat, les collectivités peuvent intervenir. Il y a, d'une part, les prêts garantis par l'Etat. Il y environ 350.000 TPE qui continuent à rembourser la dette du Covid, et notamment le PGE. On s'est battu depuis deux ans pour qu'il y ait une reconsidération.

Non pas qu'il faille supprimer ces prêts, mais il faut qu'on continue d'étaler leurs remboursements pour les entreprises qui n'ont pas les capacités suffisantes de le faire pour l'instant. Quand on en a parlé à Bruno Le Maire en 2022, il en était conscient, puisqu'il a mis en place le médiateur du crédit qui permet justement d'étaler son PGE. Mais cette procédure est tellement contraignante que peu de TPE y ont recours.

D'autre part, il y a un problème avec la taxe foncière, qui a par exemple augmenté de 30% dans certaines agglomérations. Or, elle incombe au loueur et non au bailleur. C'est un thème que l'on porte depuis cinq ans en disant qu'elle doit être payée par ce dernier, et non par son locataire. Nous avons notamment déposé des amendements à ce sujet et fait des propositions dans le cadre du Conseil national du commerce (CNC).

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Enfin, il y a le poids des dépenses énergétiques qui pèse lourdement sur les finances des petites entreprises. Bruno Le Maire a annoncé la mise en place du tarif réglementé de vente de l'électricité (TRVE) à toutes les TPE à partir du 1er février 2025. Une mesure que l'on demandait déjà depuis un an et demi et qui ne devrait pas profiter dans l'immédiat aux petites entreprises puisque le TRVE continue de refléter la forte hausse des prix du marché deux ans plus tôt. Ce n'est donc pas très protecteur même si cela reste un garde-fou au cas où les prix remontent.

Mais surtout, nous avons 100.000 à 200.000 petites entreprises qui ont signé des contrats pluriannuels avec des énergéticiens en 2022 à des tarifs très élevés, quand le prix de l'électricité était au plus fort. Et qui ne peuvent rompre ces contrats, puisque les indemnités de remboursement anticipée (IRA) représentent des sommes prohibitives qui interdisent, de fait de rompre, ces contrats par anticipation. Cela fait deux ans que l'on en parle, mais cela semble être un non-sujet... Et c'est sur des exemples comme ça que les mécontentements se sont cristallisés.

Coline Vazquez
Commentaires 4
à écrit le 29/06/2024 à 7:56
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Parce que ce sont des sacrifiés et tous les partis le savent.

à écrit le 28/06/2024 à 14:12
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Grosse offensive du sdi ces derniers jours ! Ce syndicat me rappelle le cid unati de Gérard Nicoud et le cdca des années 80/90 de triste réputation .

le 29/06/2024 à 15:35
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@ldx - Les petites entreprises vont être directement impactées par un Smic à 1600 Euros net mensuel. Même s'il est juste d'augmenter les salaires il faut que les trésoreries puissent assurer ces augmentations. Ce qui va se traduire immédiatement pa...

à écrit le 28/06/2024 à 14:10
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C'est le moment de dire et moi et moi et moi !

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