Handball : Nedim Remili ouvre son répertoire

À la peine, l’attaque française sera la clé du match contre la Hongrie, décisif en vue de la qualification pour les quarts de finale. Le demi-centre en révèle les subtilités.
Le demi-centre des Bleus lors de France-Argentine, vendredi
Le demi-centre des Bleus lors de France-Argentine, vendredi (Crédits : © LTD / Hugo Pfeiffer/Icon Sport)

Lorsque l'attaque tricolore se grippe, comme depuis le début du tournoi, Nedim Remili a des devoirs supplémentaires entre les matchs. « On analyse beaucoup de vidéos pour trouver les stéréotypes défensifs des joueurs et des équipes adverses, c'est du boulot », souffle le demi-centre des champions olympiques en titre avant le dernier match de poule contre la Hongrie (16 heures), qui enverra le gagnant en quarts de finale. Le chef d'orchestre compare son rôle à celui du numéro 10 d'une équipe de football ou du quarterback d'une franchise NFL, une ligue qu'il regarde beaucoup et dont il apprécie les stratégies « poussées à l'extrême ».

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En attaque placée, Remili donne le tempo au cœur de la base arrière. À lui de choisir l'option adéquate dans un répertoire d'une trentaine d'enclenchements. « On s'adapte sans arrêt à la qualité de la défense et à nos tireurs en chaleur. » Dika Mem a réglé la mire à longue distance ; Elohim Prandi et Nikola Karabatic ont eu plus de mal à trouver la cible. Mais le rôle des arrières ne se limite pas à marquer des buts. « Je suis le meneur attitré, mais je peux aussi glisser à gauche si Niko peut apporter un plus sur une action, ou à droite pour laisser Dika faire l'action forte au centre », détaille le puissant numéro 5, qui se voit comme une « passerelle »

Des actions amorcées d'un mot

Au handball, le début des actions offensives peut déconcerter. Pourquoi tant de courses croisées ? « D'une part pour provoquer une réaction défensive et ouvrir une faille, et d'autre part pour mettre nos attaquants en mouvement », synthétise le stratège de 29 ans. Regardez-le prévenir ses partenaires d'un geste, mais surtout, écoutez-le. Remili amorce la plupart des actions d'un mot : « yago » annonce un croisé avec le pivot qui attire un arrière vers le centre ; « yugo » prévoit une passe à l'arrière gauche puis une rotation sans ballon avec l'arrière droit. En équipe de France, le cerveau de Veszprém (Hongrie) a des signes complices avec ses pivots Ludovic Fabregas et Nicolas Tournat, réputés parmi les plus adroits au monde.

Les bleus au corps et les griffures au visage indiquent que j'ai beaucoup embêté mes vis-à-vis

« On se connaît par cœur. Nico sait qu'il a 85 % de chance que je lui passe le ballon, même s'il a un défenseur sur le dos. » La relation entre le demi-centre et le pivot est une alternative aux duels qui usent. Remili ne fuit pas le combat de près, au contraire. Son corps porte les stigmates de ceux qu'il livre aux solides défenseurs centraux. L'ancien joueur du PSG aime rentrer au vestiaire avec des bleus sur le corps et des griffures au visage, « pas par masochisme mais parce qu'ils indiquent [qu'il a] beaucoup embêté [s]es vis-à-vis ». Après sept ou huit duels, souvent dans le premier quart d'heure d'un match, la passe au pivot est une alternative susceptible de surprendre l'arrière-garde.

Influencé par le style de Ciudad Real

S'il excelle dans cet art délicat, c'est que Remili a étudié de près l'école espagnole, qui pratique volontiers le jeu à 6 mètres. Il a admiré plusieurs spécialistes (Chema Rodríguez, Daniel Sarmiento, Raúl Entrerríos) et joué à Créteil, son premier club, avec un pivot, le « buffle » Rafael Baena et le demi-centre Sergio De la Salud, qui lui en ont enseigné les ficelles. « Je me suis nourri du jeu avec le pivot, car j'ai vite compris que cela pouvait être une arme redoutable. » Le style de Ciudad Real, un grand club trois fois vainqueur de la Ligue des champions mais disparu en 2013, a influencé le sien. S'il n'a jamais évolué en Liga Asobal, c'est parce que tous ses clubs ont connu de graves difficultés économiques, le Barça excepté.

Le rôle du demi-centre est crucial car « 60 % des actions offensives sont spontanées », estime le joueur formé à Créteil. En sélection, les 40 % restantes sont imaginées avec l'entraîneur adjoint Erick Mathé et répétées avec l'expérimenté Kentin Mahé, non retenu pour ces Jeux. Le résultat de ce travail n'est pas toujours visible, car les passes décisives ne sont pas comptabilisées. Encore moins les avant-dernières. « Si d'un enclenchement découle un décalage vers l'ailier qui marque un but après deux passes, c'est que j'ai bien fait mon travail. Mais cela ne se traduit pas en statistiques », regrette le meilleur demi-centre des Jeux de Tokyo et du Mondial 2023.

La beauté du geste ne le préoccupe pas : « Si je fais une passe dans le dos ou au-dessus de la tête, c'est parce que je pense que c'est le mouvement qui va mettre mon partenaire dans la meilleure position. » Ce qu'il « kiffe », c'est « faire gagner la demi-seconde » à son partenaire pour empêcher un défenseur d'intervenir. Les règles les plus récentes favorisent les buts sur montée de balle rapide ou les shoots longue distance des gardiens. Des actions qui rendent inutile sa science tactique. Remili n'est « clairement pas fan » des tirs de loin, il préférera toujours « monter la balle et tenter un tir à 6 mètres face à un gardien ». Mais le jeu évolue et les demi-centres à l'ancienne, qui ne marquent pas et ne défendent pas, sont moins recherchés. « De toute façon, ironise le patron de l'attaque, dans notre sport, c'est toujours la défense qui fait gagner. »

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Commentaire 1
à écrit le 08/08/2024 à 8:01
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Perdre contre les allemands... honte à eux ! Bravo aux filles !

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