![Le centre de Bruxelles a été le théâtre ces derniers mois de plusieurs manifestations agricoles de grande ampleur, à l'unisson de mouvements protestataires à travers l'UE (photo d'archive).](https://static.latribune.fr/full_width/2384707/des-agriculteurs-manifestant-a-bruxelles-en-belgique.jpg)
Les agriculteurs sont de nouveau dans la rue ce mardi, réunis à Bruxelles à quelques jours des élections européennes - qui auront lieu ce dimanche 9 juin en France notamment. À la mi-journée, la police de la capitale belge recensait environ 1.200 manifestants et 500 tracteurs, au pied du monument de l'Atomium, en bordure de la ville, pour un rassemblement censé durer toute la journée. Des moyens policiers ont d'ailleurs été déployés pour les empêcher d'approcher les bâtiments des institutions de l'UE, dans le cœur de la capitale également européenne.
D'après la police, l'autorisation de manifester qui a été accordée porte sur un périmètre restreint au plateau du Heysel, une zone du nord de Bruxelles proche des grands axes autoroutiers, où les tracteurs venus des Pays-Bas ont été en partie escortés. Les organisateurs ont aussi affrété des bus. Pour rappel, le centre de Bruxelles a été le théâtre ces derniers mois de plusieurs manifestations agricoles de grande ampleur, à l'unisson de mouvements protestataires à travers l'UE, qui ont amené les Vingt-Sept à détricoter une partie des conditions environnementales attachées aux paiements de la PAC.
Une organisation controversée en cheffe de file
Cette fois, le mouvement n'a pas été organisé par les grands syndicats agricoles mais par l'organisation controversée Farmers Defence Force (FDF, force de défense des agriculteurs). Fondée aux Pays-Bas en 2019, elle a été à la pointe des protestations depuis 2022 contre la politique environnementale du gouvernement néerlandais, et notamment contre un plan de réduction des émissions d'azote. Elle est considérée comme un mouvement proche de l'extrême droite par des associations de défense de l'environnement et d'autres syndicats agricoles qui ne se sont pas associés à la manifestation.
Selon son programme mis en ligne, une dizaine de personnalités venues de Roumanie, d'Espagne, de Pologne, de Belgique ou encore d'Italie doivent s'exprimer devant les manifestants. Et notamment des élus, dont un eurodéputé du parti d'extrême droite flamand Vlaams Belang. Il était aussi question d' « invités secrets » du PiS polonais, le parti populiste nationaliste de Jaroslaw Kaczynski.
La Coordination rurale, syndicat français classé à droite, a annoncé se joindre au rassemblement afin de s'opposer aux exigences environnementales de la Politique agricole commune (PAC) et aux accords de libre-échange, dénonçant dans un communiqué « les dérives libérales de l'UE, la folie du "Green Deal" (...) des réglementations toujours plus nombreuses et coûteuses » aggravant « les distorsions de concurrence ».
Le Copa-Cogeca, puissante confédération des syndicats agricoles majoritaires dans l'UE (dont la FNSEA en France), a en revanche demandé à ses membres de ne pas participer à la rencontre, selon plusieurs organisations agricoles.
La colère agricole se réveille
Cette mobilisation n'est en tout cas pas isolée. Entre ce lundi et mardi, des agriculteurs français et espagnols ont bloqué des points de passage entre les deux pays. L'objectif affiché était, là aussi, de « peser » sur la campagne des élections européennes pour réclamer une énergie moins chère et le respect des clauses miroirs (qui supposent d'imposer aux agriculteurs de pays tiers les mêmes normes environnementales que celles prévues dans l'Union européenne).
« Quand je parle au gouvernement, on m'explique que 80% des lois agricoles se décident à Bruxelles, donc on a compris que maintenant le cheval de bataille n'était plus national, il était européen », a expliqué Jérôme Bayle, éleveur de Haute-Garonne devenu figure du mouvement de contestation agricole du début d'année en France. « On ne demande pas le bout du monde, juste que l'Europe soit uniformisée dans la réglementation et les taxes », a-t-il ajouté.
Si l'action de lundi touche à sa fin, l'éleveur français assure toutefois avoir « prévenu » le gouvernement : « On attend des réponses positives à nos revendications avant fin octobre ou début novembre, ou l'Europe s'embrasera », a-t-il assuré.
En Espagne comme en France, les grands syndicats agricoles n'ont pas participé à la mobilisation, qui a perturbé plusieurs axes routiers entre les deux pays. Elle a été conduite par des plateformes locales, pour la plupart nées ces derniers mois et organisées via des boucles Telegram. « On a la prétention de dire que c'est le début d'une coordination européenne. Ce qu'on a fait pourra se refaire partout dans l'UE, sur les autres frontières », a souligné Xabi Dallemane, éleveur de volailles à Bidache et parmi les agriculteurs mobilisés dans le Pays basque français.
La rémunération minimale des agriculteurs est un argument de campagne des quatre listes à gauche. Marie Toussaint, tête de liste des Écologistes, veut une PAC « plus verte » qui rémunère « les travailleurs plutôt que les hectares ». Valérie Hayer (Renaissance) voudrait faire adopter l'équivalent de la loi française Egalim pour protéger les producteurs. Après la crise agricole en début d'année, Les Républicains (LR) se veut le champion des agriculteurs, défendant même une hausse du budget de la PAC, principal poste de dépenses dans l'UE. Le Rassemblement National (RN) veut renationaliser la PAC mais rejoint LR dans la dénonciation des normes environnementales imposées aux agriculteurs.Européennes: les propositions des principales listes sur l'agriculture
(Avec AFP)
Sujets les + commentés