Néo-banque : N26 repart à la conquête de clients avec une offre plus globale

La néo-banque allemande N26 lance dans six pays un service de courtage en ligne à prix cassé. Après s’être concentrée sur l’opérationnel, contrainte d’ailleurs de le faire par le régulateur, la fintech multiplie désormais les services bancaires pour doper ses revenus et mieux profiter de la hausse des taux. La néo-banque devrait atteindre la rentabilité au second semestre 2024, après une perte nette de 100 millions en 2023.
Jérémie Rosselli, general manager de N26, mise sur la pédagogie pour convaincre ses clients française à aller en Bourse.
Jérémie Rosselli, general manager de N26, mise sur la pédagogie pour convaincre ses clients française à aller en Bourse. (Crédits : DR)

Après le « compte rémunéré » lancé en juin, la néo-banque allemande N26 étoffe encore un peu son offre bancaire avec la possibilité pour les clients d'acheter en direct des actions ou des ETF sur un compte titres (hors PEA pour l'instant). La fonction n'est pas nouvelle. Elle constitue même un des piliers historiques d'autres banques en ligne, comme BoursoBank dont l'ADN vient du courtage en ligne. Des concurrents plus frontaux en Europe, à l'image de Revolut, ont également développé des services de courtage.

« Nous sommes dans une seconde phase de notre développement. Jusqu'ici, nous nous sommes concentrés sur l'opérationnel. Nous visons désormais à accélérer la croissance de nos revenus », explique Jérémie Rosselli, directeur général de N26 France & Benelux. La hausse des taux d'intérêt a de fait redonné de l'intérêt aux produits bancaires traditionnels, comme les dépôts et le crédit, et toutes les néo-banques visent désormais à être le compte principal multi-équipés.

Contrainte levée

C'est d'autant plus vrai pour N26 que la fintech était limitée par le régulateur allemand depuis la fin 2021 dans sa capacité à conquérir de nouveaux clients, à 50.000 par mois (tous pays confondus), un plafond relevé à 60.000 en début de mois, pour des insuffisances en matière de conformité et de lutte contre la fraude.

Cette contrainte est désormais levée depuis mai dernier. Une période difficile pour la banque mais mise à profit pour revoir toutes les procédures internes, sa gouvernance, renforcer la formation de ses 1.500 salariés et surtout développer une nouvelle stratégie centrée non plus sur le nombre de clients, mais sur une cible de « revenue-relevant customers », bref sur les clients jugés importants en termes de revenu. Soit 4,2 millions de clients concernés en 2023. « Nous souhaitons changer certains codes », reconnaît Jérémie Rosselli.

Le lancement de ce service de courtage participe donc à cette nouvelle stratégie, comme la création d'un IBAN domestique (juillet 2023), une offre crypto (mars 2024), le compte d'épargne et le compte joint (juin 2024). Quelques incursions dans le crédit sont tentées dans certains pays, mais avec prudence. Pour l'instant, pas de projet dans le crédit immobilier malgré les annonces de Revolut qui souhaite s'y engager et les offres des banques en ligne filiale des banques françaises (BoursoBank, Hello Bank !, BforBank, Fortuneo...).

Mettre l'accent sur la pédagogie

Sur les actions, N26 mise sur l'attractivité et la transparence de son tarif et sur la pédagogie. Un seul tarif est proposé, à savoir 0,9 euro par transaction, sans frais de garde, ni de pourcentage en fonction du montant traité. Les abonnés à la formule « haut de gamme » Metal auront même droit à 15 transactions gratuites. C'est peu pour un trader compulsif. C'est beaucoup pour un apprenti de la Bourse qui souhaite se constituer une épargne dans une optique de long terme. C'est clairement cette cible que vise N26 et non celle d'eToro ou de Trade Republic. D'ailleurs, selon N26, seulement 16% des clients de la banque de détail en France disposent d'un compte titres.

D'où les efforts déployés en matière d'explications (comment déchiffrer le nom d'un ETF...), de définitions (ratio cours bénéfice, cours cible...), et de parcours utilisateur simplifié, entièrement intégrée dans l'application mobile N26.

La banque propose également la possibilité d'acheter une action fractionnée, à partir d'un euro, ou de programmer ses achats dans le temps, sur une ou plusieurs actions. Le discours est déjà rodé : il faut apprendre les choses, commencer modestement... La banque s'est adossée à un courtier allemand Upvest pour la gestion de la plateforme et la conservation des titres est assurée par BNP Paribas. Pour l'instant, 500 actions et ETFs sont au catalogue, dont les grands noms de la cote américaine, comme Apple ou Ndivida. En revanche, l'accès aux valeurs françaises du CAC 40 est prévu plus tard dans l'année. Et l'accent n'a guère été mis sur la notation ESG, ou la finance durable.

Effet de ciseaux positif

De l'aveu même de la banque, la contribution du courtage à la hausse des revenus sera modeste au départ. Mais ce service constitue une brique indispensable à une offre qui se veut globale.

En 2023, la néobanque a dégagé 300 millions d'euros de revenus, contre 238 millions en 2022 (+25%) et a réduit de moitié sa perte nette, de 213 millions en 2022 à une centaine de millions en 2023. « Nous confirmons notre objectif d'atteindre la rentabilité à partir du second semestre de 2024 », affirme toutefois Jérémie Rosselli. La marge opérationnelle pourrait même atteindre 70% cette année, contre 62% en 2023.

En France, seule Fortuneo est rentable depuis plusieurs années et le leader BoursoBank parvient tout juste à l'équilibre en 2023, après avoir creusé ses pertes en 2021 et 2022. Son objectif de 300 millions d'euros de résultat net est même reporté d'un an à 2026. Quant à Revolut, ses profits ont explosé l'an dernier à près de 400 millions d'euros pour plus de 2,1 milliards d'euros de revenus.

A l'instar de la fintech britannique, N26 explique que son modèle est conçu pour créer un effet de ciseaux positif, c'est-à-dire d'être capable d'absorber des nouveaux flux de clients et de revenus sans provoquer un dérapage des coûts. « Nous sommes capables de multiplier par deux notre nombre de clients, sans devoir embaucher beaucoup de personnes, car nos systèmes fonctionnent quasiment automatiquement », soutient Jérémie Rosselli. Et, ajoute le dirigeant, « tous nos clients qui ouvrent un compte génèrent de plus en plus de revenus au fil du temps. C'est une évolution que nous regardons de très près. D'autant que nous avons lancé beaucoup de nouveaux produits ces derniers mois et nous devrions observer une accélération rapide de nos revenus à partir de 2024 et de 2025 ».

Les valorisations remontent

Ce discours sur la rentabilité n'est pas fortuit. N26, tout comme Revolut, préparent leur introduction en Bourse, compte tenu de leur cycle de financement. La banque allemande a été valorisée 9 milliards d'euros fin 2021 lors de sa dernière levée de fonds en série E - une étape de financement qui préfigure généralement une introduction en Bourse- mais cette valorisation a sans doute été révisée à la baisse, comme pour l'ensemble des fintechs, victimes de la hausse des taux. Au total, N26 aura levé 1,8 milliard d'euros auprès d'investisseurs.

Sauf que... les valorisations commencent à remonter. Selon le Financial Times, Revolut vise désormais une valorisation de 40 milliards de dollars, alors que le géant américain des paiements Stripe aurait atteint une valorisation record de 70 milliards de dollars, selon l'un de ses principaux actionnaires, Sequoia Capital.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 17/07/2024 à 10:18
Signaler
Pour ma part j'ai deux comptes bancaires ( Fortuneo et BoursoBank) entièrement gratuits , paiements et retraits par carte gratuits à l'étranger. N26 ne propose pas mieux et comme Revolut a un service client déplorable , à éviter. Mais chacun ses go...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.