Impôt sur le revenu, héritage, ISF… Le programme fiscal du Nouveau Front populaire, obstacle au barrage républicain ?

Depuis les résultats du premier tour des élections législatives, dimanche 30 juin, le camp présidentiel, mis en minorité, appelle à « faire barrage » au Rassemblement national. Plus de 80 de ses candidats ont même décidé de se désister au profit d’un candidat de gauche, mieux placé. Mais la radicalité du programme fiscal du Nouveau Front populaire ne va-t-elle pas dissuader les électeurs d’Emmanuel Macron, majoritairement à droite, de suivre les consignes de vote ?
Le programme fiscal du Nouveau Front populaire dissuadera-t-il  des électeurs macronistes de voter pour la gauche au second tour ?
Le programme fiscal du Nouveau Front populaire dissuadera-t-il des électeurs macronistes de voter pour la gauche au second tour ? (Crédits : Reuters)

Le miracle ne s'est pas produit pour le camp présidentiel. Après la défaite cinglante aux élections européennes, le 9 juin, et l'annonce, le soir même, de la dissolution de l'Assemblée nationale par le président de la République, le bloc macroniste a subi un nouveau revers au premier tour des élections législatives anticipées, dimanche 30 juin. Distancés, les candidats réunis sous la bannière Ensemble ! n'ont recueilli que 20% des voix, contre 28% pour le Nouveau Front populaire (NFP), l'alliance de gauche, et surtout, 33% pour le Rassemblement national (RN) et ses alliés. Un score qui, au soir du premier tour, permettait au parti de Marine Le Pen d'envisager d'obtenir la majorité absolue à l'issue du scrutin.

Une situation impensable pour Emmanuel Macron qui, lors de sa victoire en mai 2017, avait promis qu'il « ferait tout » dans son quinquennat pour qu'il n'y ait « plus aucune raison de voter pour les extrêmes ». Et qui a conduit le camp présidentielle, le Premier ministre Gabriel Attal en tête, à appeler cette semaine à « faire barrage » au Rassemblement national. « Le premier enjeu, pour moi, de ce second tour, c'est de tout faire pour que l'extrême droite ne dispose pas d'une majorité absolue », a-t-il martelé, mercredi 3 juillet, sur France Inter.

Stratégie du désistement

La veille au soir, les préfectures du pays ont validé les candidatures pour le second tour des élections législatives qui se déroule ce dimanche 7 juillet. 81 candidats de la coalition présidentielle, coincés dans des triangulaires, ont décidé, bon gré mal gré, de se désister pour un candidat de l'alliance de gauche, et ainsi priver le Rassemblement national d'un siège au Palais Bourbon. Sèchement battue dans la première circonscription des Bouches-du-Rhône, l'ex-secrétaire d'Etat à la Ville, Sabrina Agresti-Roubache, s'est ainsi désistée. Avec un objectif : barrer la route à Monique Griseti (RN) et favoriser la victoire de Pascaline Lécorché (NFP).

Autre territoire, même logique. Dans la 4e circonscription de la Sarthe, Sylvie Casenave-Péré, arrivée en troisième position, a retiré sa candidature. Là encore, avec comme idée de barrer la route à Marie-Caroline Le Pen, la sœur aînée de Marine Le Pen. Mais ce barrage républicain, au profit des candidats de l'alliance de gauche, va-t-il fonctionner au sein des électeurs macronistes ? Rien n'est moins sûr... Selon un sondage Odoxa pour Le Nouvel Obs, paru jeudi 4 juillet, moins de la moitié (49%) des électeurs d'Emmanuel Macron seraient prêts à faire barrage au RN.

Une prévision sondagière qui conforte l'analyse du politologue et chercheur au CNRS, Bruno Cautrès, interrogé cette semaine, par La Tribune. « Le barrage républicain est davantage un réflexe des électeurs de gauche que ceux de droite ou de la macronie. (...) On sait qu'il y aura beaucoup de déperdition si on demande à des électeurs macronistes de voter pour un candidat France insoumise (LFI) », pointe l'expert.

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Inquiétude à l'Elysée

Signe que le sujet du barrage républicain inquiète au plus haut sommet de l'Etat, le président de la République, Emmanuel Macron, s'est empressé de rappeler, mercredi 3 juillet, en Conseil des ministres, à destination de ses soutiens, que « se désister aujourd'hui pour des élus de gauche face au Rassemblement national ne signifie pas gouverner demain avec LFI (...) Il n'en est pas question. »

Outre le positionnement de la gauche, et notamment de La France insoumise, sur les questions sociétales et internationales, à l'instar de la guerre entre Israël et le Hamas, un autre élément pourrait bien dissuader les sympathisants de la galaxie macroniste de déposer un bulletin NFP dans l'urne dimanche : le programme fiscal de l'union de la gauche. Pêle-mêle, le Nouveau Front populaire entend « réformer l'impôt sur l'héritage pour le rendre plus progressif », « accroître la progressivité de l'impôt sur le revenu à 14 tranches », « rendre la CSG progressive », « supprimer la flat tax », « rétablir un impôt de solidarité sur la fortune », ou encore « supprimer les niches fiscales inefficaces, injustes et polluantes ».

Autant de propositions clivantes qui pourraient être reprises en cas de formation d'une grande coalition de gouvernement, et qui ne sont, a priori, pas la tasse de thé de l'électorat d'Emmanuel Macron, dont le centre de gravité a largement basculé de la gauche vers la droite entre les élections présidentielles de 2017 et 2022. Un « chassé-croisé » que démontre, chiffres à l'appui, Jérôme Fourquet, le directeur du département Opinion et stratégies de l'Ifop, dans son ouvrage La France d'après, tableau politique (Seuil).

« Une part significative de l'électorat issu de la gauche (ayant voté Mélenchon ou Hollande en 2012) a déserté entre 2017 et 2022, quand, dans le même temps, la composante de l'électorat macroniste provenant de la droite gonflait spectaculairement. Seuls 17% des électeurs sarkozystes de 2012 avaient voté pour Emmanuel Macron en 2017, cette proportion s'établissant à 47% cinq ans plus tard », constate le sondeur.

Des petits contribuables « affolés » par le NFP

« Le programme du Nouveau Front populaire porte la rupture, la radicalité, et même la décroissance, avec cette petite musique de faire payer les riches », analyse Virginie Martin, politiste et professeure à Kedge Business School. Et sur le terrain, les propositions de la gauche semblent provoquer de l'inquiétude, notamment chez les retraités, cœur de l'électorat macroniste. « Nos membres sont affolés par le programme du NFP, répond du tac au tac Benoît Perrin, directeur de Contribuables Associés, une association constituée en majorité de petits contribuables. Ils ont notamment peur de payer plus d'impôt sur le revenu avec la multiplication du nombre de tranches d'imposition souhaitée par la gauche. »

Dès lors, la probabilité qu'une large partie des électeurs d'Emmanuel Macron s'abstiennent, dimanche, lors du second tour des législatives n'est pas exclue. D'autant que « le tabou du vote RN est encore très présent chez eux, même si l'électorat s'est droitisé », reprend Virginie Martin. « Je ne vois pas pourquoi les gens qui ont un peu d'épargne voteraient pour un candidat de la gauche », résume, lapidaire, un édile d'une ville de droite des Hauts-de-Seine.

Mais si le programme fiscal du Nouveau Front populaire apparaît à certains électeurs comme un repoussoir au barrage républicain, une députée socialiste, candidate à sa réélection à l'Assemblée nationale, met en avant un autre problème, encore plus important selon elle : « Ce qui est handicapant dans les reports de voix, c'est surtout et toujours Mélenchon, car tout le monde a compris que le NFP n'aurait pas la majorité absolue. »

Commentaires 21
à écrit le 06/07/2024 à 12:25
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On ne peut qu'être favorable au don de son vivant plutôt qu'a l'héritage après sa mort, la monnaie circule bien plus vite ! :-)

le 06/07/2024 à 12:44
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Vous pouvez faire une donation partage solution très courante ou avoir recours à une donation de 100.000 euros ( maximum) 'tous les 15 ans souvent pratiquée pour aider un enfant à financer un achat immobilier .Il n'est donc pas indispensable d'attend...

le 06/07/2024 à 12:55
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ok lfi est au pouvoir qui vas pouvoir désarmer la gendarmerie la police et les militaires vont regarder puis les pays voisins vont attendre que la maladie les touches et puis les conquérants en passe de modifier le pays serons pas sensible au déso...

à écrit le 06/07/2024 à 12:24
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On ne peut qu'être favorable au don de son vivant plutôt qu'a l'héritage après sa mort, la monnaie circule bien plus vite ! :-)

à écrit le 06/07/2024 à 12:04
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1923 milliards d'euros placés en assurance vie.

à écrit le 06/07/2024 à 7:42
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L'héritage est le mal de l'oligarchie et donc de l'humanité que celle-ci est sensée guider mais qu'elle a complètement oublié. Et la moitié de la vie sur terre a été anéantie.

le 06/07/2024 à 10:53
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@Dossier 51: Si nous n'étions pas les heureux héritiers - hum! - de nos lointains ancêtres, nous serions en train de folâtrer dans les arbres.

le 06/07/2024 à 12:28
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Mais, il est aussi vrai, que nous ne nous en plaindrions pas ! :-)

le 06/07/2024 à 18:49
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Tu parles de l’héritage génétique qui n'a rien à voir avec l'héritage du patrimoine, des outils de production et des capitaux. Et oui cela ne nous ferait pas de mal un retour aux sources mais vu comme les humains se sont fait laver le cerveau par la ...

à écrit le 05/07/2024 à 19:34
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@dossier51 - L'héritage est un moyen de transmettre un patrimoine et d'éviter à sa descendance (selon Gainsbourg) "de laisser ses enfants démarrer dans la vie avec un handicap". J'aime bien Gainsbourg.

à écrit le 05/07/2024 à 18:59
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Une douce musique commence à se faire entendre un peu partout comme quoi les Français auraient plus de 6000 euros d'épargne financière (ce qui est vrai) soit deux fois la dette. Comment en fait on est tout doucement en train de nous habituer à l'idée...

le 05/07/2024 à 19:29
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Ce n'est pas 6.000 euros mais 6.000 milliards d'euros dont 1.800 milliards en assurances vie dans lesquels sont logés une partie de la dette de l'état sous forme d'OAT ( obligation assimilable au trésors ) les intérêts des assurances vie sont taxés ...

à écrit le 05/07/2024 à 18:56
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Le NFP va prendre le même chemin que la NUPES, celui de la dissolution !

à écrit le 05/07/2024 à 18:50
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1) En ce qui concerne l'augmentation des tranches de l'IR, c'est une mesure de justice sociale. Les 4 tranches actuelles sont profondément injustes et inégalitaires. Difficile d'admettre que la tranche marginale de 30% concerne des revenus allant de ...

le 05/07/2024 à 19:04
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Une tranche d'IR à 90 % est spoliateur et qui va avec un ISF triplé de faire partir beaucoup de créateurs d'entreprises innovantes sans compter la taxation sur l'héritage. Beaucoup de pays voisins n'ont ni ISF, ni impôt sur l'héritage. Les français s...

le 05/07/2024 à 19:19
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Il n'existe aucune raison ni légale ni morale de voler l'argent issu d'un héritage. L'héritage et le fruit du travail d'une ou de plusieurs vies. Il n'y a que les médiocres qui sont incapables de laisser un patrimoine à leurs enfants.

le 05/07/2024 à 19:26
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@ dossier 51 - Ça me rappelle Georges Marchais.."au dessus de 50% je prends tout". Les US ont longtemps taxe jusqu'à 80% voire 90% . ( ce n'est pas tout à fait vrai dans la réalité ), mais ces chiffres avaient le mérite d'exister. Ça a bien changé.

le 05/07/2024 à 19:35
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Vous pouvez jouter la flat tax cadeau de Macron aus plus aisés qui plafonne à 30% csg comprise les revenus financiers .A ma modeste échelle cette disposition me fait économiser 2.000 euros d'impôts par an .Quant aux droits de succession laissez moi r...

le 06/07/2024 à 1:05
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Appliquons les mêmes tranches d'ir qu'en Allemagne. Sinon on n'aura jamais des emplois qualifiés et les entrepreneurs developperont leus business ailleurs. Les gens aisés ne payeront plus leur impôts sur les héritages en France, qui sont déjà les p...

à écrit le 05/07/2024 à 16:51
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Personne nz suit les consignes, et personne iu pesque n ira voter pour ces mystificateurs qui ont enfin fait tomber leur masque de mere theresa pour montrer celui du moustachu qui se cachait

à écrit le 05/07/2024 à 16:44
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Bonjour, la question que pose le titre est complètement hors sol. Le front républicain n'a rien à voir avec la défense de ses propres intérêts financier. Il s'agirait justement de passer outre par PRINCIPE et attachement à des valeurs autre que moné...

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