![(Photo d'illustration).](https://static.latribune.fr/full_width/2403133/urne-legislatives.jpg)
La campagne électorale entre dans sa dernière ligne droite. À la veille du scrutin, les trois grands blocs (Rassemblement national, Nouveau Front populaire et Renaissance) vont jeter leurs dernières forces dans cette bataille éclair. Trois semaines après l'onde de choc de la dissolution, les scénarios sont loin d'être tranchés.
En tête dans les sondages, le RN serait en position pour récupérer une majorité de sièges à l'Assemblée nationale. Mais les multiples désistements de l'entre deux tours ont réduit les chances pour le parti nationaliste d'obtenir une majorité absolue au Palais Bourbon. Dans ce contexte troublé, les économistes sont largement montés au front pendant cette campagne menée au pas de charge.
La bataille des listes de soutien
Politique de l'offre, patriotisme économique ou relance keynésienne et bifurcation écologique ? Les trois grands blocs ont esquissé les grandes lignes de leurs politiques économiques pour tenter de rassurer les milieux financiers et dirigeants, particulièrement inquiets après l'annonce fracassante de la dissolution. Derrière ces grandes orientations, les économistes ont rapidement mis en place des listes de soutien aux différentes forces politiques. A commencer par les 300 économistes qui ont affiché leur appui au programme économique du Nouveau Front populaire dans une tribune publiée par Le Nouvel Obs.
Parmi les plus connus figurent Thomas Piketty, Camille Landais président du Conseil d'analyse économique rattaché à Matignon, Emmanuel Saez de l'université de Californie (Berkeley) ou encore Julia Cagé (Sciences-Po Paris). « J'ai signé avec 300 économistes une tribune soutenant le programme du Nouveau Front populaire (NFP) pour une raison importante. C'est le seul programme qui explique clairement comment la France va trouver des ressources pour investir dans l'avenir », a expliqué dans un entretien accordé à La Tribune, l'économiste Thomas Piketty.
Au centre, les économistes proches de la majorité présidentielle ont rapidement formé une liste des 100, composée entre autres d'Olivier Blanchard (ex-chef économiste du FMI), Philippe Aghion (Collège de France), Gilbert Cette (président du Conseil d'orientation des retraites) ou Alexandra Roulet. Au lendemain du second tour, Philippe Aghion, Jean-Pisani Ferry et Alexandra Roulet ont estimé, malgré leur position en faveur de la ligne économique d'Emmanuel Macron, que « les programmes RN et NFP ne peuvent pas être mis sur un pied d'égalité ».
A l'extrême droite, très peu d'économistes ont affiché publiquement leur soutien au parti lepeniste. Vilipendé sur les questions économiques, le Rassemblement national de Jordan Bardella a largement élagué son programme économique et social. Après le ralliement d'Eric Ciotti, le RN fait par exemple volte-face sur sa promesse d'enterrer définitivement la réforme des retraites à 64 ans, quitte à semer la confusion sur les mesures qu'il mettrait en place après les législatives.
La bataille du chiffrage des programmes
En plein marasme budgétaire, les candidats ont présenté des programmes montés dans l'urgence. Dénonçant « l'échec de la politique économique, budgétaire et sociale d'Emmanuel Macron », le Nouveau Front populaire (NFP) a promis « un choc fiscal » à son arrivée à Matignon pour financer ses mesures. Dans son programme présenté il y a deux semaines, la coalition des gauches et des écologistes a annoncé dans le même temps une enveloppe de dépenses de 150 milliards d'euros.
« Nous sommes la seule force politique à proposer un chiffrage de notre programme », a clamé Eric Coquerel (LFI), ancien président de la Commission des finances à l'Assemblée nationale, lors d'un point presse. En première ligne, l'économiste Julia Cagé a participé à la construction des grandes mesures économiques. Il s'agit « d'une politique de relance par le pouvoir d'achat et une politique de relance par la recherche et l'investissement », a résumé la spécialiste de la fiscalité et des médias.
En face, les économistes défendant une grande coalition du centre prônent « une politique économique fondée sur l'emploi et la productivité ». C'est, à leurs yeux, « la meilleure stratégie pour répondre aux défis économiques de notre époque, du pouvoir d'achat aux inégalités, en passant par la souveraineté technologique et la soutenabilité des finances publiques ». Dans le bloc du centre, les résultats du second tour ont amoindri les chances pour le président Macron de placer un nombre majoritaire de députés sur les sièges de l'Assemblée.
Face au possible raz-de-marée de l'extrême droite, le chef économiste d'Allianz, Ludovic Subran, a lancé un cri d'alerte. « Les gens qui voient dans le RN l'antidote à l'hyper socialisme français se trompent. Ce sont des national-socialistes. Arrêtons d'avoir peur des rouges, ils ne gouverneront pas. Craignez les bruns, ils sont aux portes du pouvoir et vous coûteront votre emploi et votre épargne !». Une perspective que redoutent désormais un grand nombre d'économistes français.