![Le Premier ministre et le président de la République au Mont-Valérien, le 18 juin.](https://static.latribune.fr/full_width/2408203/macron.jpg)
L'opération démission se prépare. Selon nos informations, Emmanuel Macron a prévu d'accepter ce mardi celle de Gabriel Attal et de son gouvernement. De quoi permettre aux 17 ministres élus députés après ces élections législatives anticipées de participer au vote pour la présidence de l'Assemblée, programmé pour jeudi. Dans leurs ministères, ils continueront en même temps à gérer les a aires courantes. Situation baroque sinon incompréhensible aux yeux de l'opinion publique, justifiée dans le camp macroniste par l'importance de l'échéance.
Chaque voix comptera en effet dans cet hémicycle tronçonné en trois gros blocs dont aucun ne peut prétendre approcher seul la majorité absolue. Et l'élection au perchoir fixera le premier rapport de force de l'après-dissolution. C'est d'ailleurs bien à ce rendez-vous que pensait le chef de l'État quand, dimanche dernier, il a annoncé qu'il attendait « la structuration de l'Assemblée » pour « prendre les décisions nécessaires ».
Car pendant que le pays s'enfonce un peu plus dans un épais brouillard politique, toujours sans majorité claire et sans nouveau gouvernement, un plan commence à percer à l'Élysée. Le président pense avoir trouvé une martingale pour se sortir de l'ornière dans laquelle il s'est lui-même enfoncé : il veut « inventer l'esprit de coalition à la française ». Il a d'ailleurs échangé à ce sujet avec le chancelier Olaf Scholz lors du sommet de l'Otan à Washington.
Les calculs du président se heurtent parfois aux ambitions déconfinées au sein de son camp
Mercredi, il en avait déjà dessiné les contours dans sa lettre aux Français, expliquant que « seules les forces républicaines représentent une majorité absolue » et que « la nature de ces élections, marquées par une demande claire de changement et de partage du pouvoir, les oblige à bâtir un large rassemblement ». Il n'a pas changé d'avis depuis. « Les Français nous disent qu'il n'y a pas d'offre politique parfaite, observe l'un des proches du chef de l'État. Ils veulent un bout de chacun des programmes des partis de l'axe républicain. »
L'Élysée recense avec gourmandise « les signaux positifs » qui viennent conforter son ambition. Comme cette ouverture de Laurent Wauquiez, nouveau patron du Selon nos informations, groupe LR canal historique, finalement plus souple que son prédécesseur Olivier Marleix et qui évoque à présent la possibilité d'un « pacte législatif » avec le camp présidentiel, sans accepter pour autant de participer à une coalition. Ou encore les quelques paroles en son sens venues d'une gauche qui ne parvient toujours pas à s'entendre pour proposer un nom de Premier ministre. « On voit bien que les raisonnables savent qu'on ne peut pas gouverner avec un programme des années 1970 », souffle-t-on au Château, dans une référence transparente au NFP.
D'où l'intérêt, pense-t-on, de laisser encore la situation se décanter. Avec le risque qu'elle tourne à l'aigre et un contre-exemple en tête, l'ultimatum présidentiel lancé fin juin 2022, après les législatives. « Emmanuel Macron avait donné quarante-huit heures aux forces politiques pour se mettre d'accord, cela avait été un énorme flop », se souvient-on dans l'entourage du chef de l'État.
Situation assez tendue
Des calculs qui se heurtent parfois aux ambitions déconfinées au sein du camp présidentiel. Emmanuel Macron avait en effet imaginé pouvoir tenir son groupe à l'Assemblée au moyen d'une direction collégiale qui aurait dilué le pouvoir. Las, Gabriel Attal a mieux manœuvré que les autres et c'est lui seul qui a été élu hier à la tête des députés Renaissance, gagnant son bras de fer avec l'actuel ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin. Une situation assez tendue pour qu'Emmanuel Macron ressente le besoin de réunir ses troupes en urgence à son retour du sommet de l'Otan pour tenter de limer les canines de ceux qui ont déjà lancé la bataille de 2027. « Après, c'est un peu normal, relativise-t-on à l'Élysée, on a concentré en trois semaines ce qui se serait dilué en trois ans sur les ambitions des uns et des autres. »
Selon l'entourage du président, « l'essentiel est préservé, l'unité du groupe est maintenue à une ou deux exceptions près» . Dans le détail, Gabriel Attal a réuni hier 84 voix sur les 98 votants. Dans son tout premier message à ses troupes, il a lui aussi insisté sur sa volonté de préserver « l'unité » de son camp, annonçant vouloir « chercher à construire des ponts avec les forces politiques attachées à la République, et à la réussite de la France, dans le respect de nos valeurs ». Le voilà donc Premier ministre bientôt démissionnaire et président de groupe à l'Assemblée. Un double rôle illustré par son agenda de demain. Il tiendra une première réunion en tant que président des députés Renaissance, mais effectuera aussi un déplacement sur le thème des JO avec sa casquette de Premier ministre. Combien de temps devra-t-il cultiver ce don d'ubiquité? À l'Élysée, on se refuse à donner la moindre date pour la nomination d'un nouveau chef de gouvernement. « Cela peut être avant les Jeux, mais aussi après. » Le temps que l'esprit de coalition à la française finisse d'infuser... ou pas ?