Election du président de l'Assemblée nationale : tout savoir sur les titulaires du Perchoir

Le 19è président de l'Assemblée nationale de la Vè République sera élu, ce jeudi après-midi, par ses pairs sortis victorieux des élections législatives des 30 juin et 7 juillet. De Jacques Chaban-Delmas à Yaël Braun-Pivet, en passant par Edgar Faure, le titulaire du Perchoir incarne la pérennité du pouvoir législatif face aux instabilités ministérielles. Décryptage.
César Armand
Yaël Braun-Pivet est la 18ème présidente de l'Assemblée nationale depuis l'instauration de la Vè République (Photo d'illustration)
Yaël Braun-Pivet est la 18ème présidente de l'Assemblée nationale depuis l'instauration de la Vè République (Photo d'illustration) (Crédits : Reuters)

C'est le jour J pour l'Assemblée nationale. Les députés élus les 30 juin et 7 juillet se retrouvent, ce jeudi à 15 heures dans l'hémicycle du Palais-Bourbon, pour élire leur président(e). Ce dernier « incarne la pérennité de la représentation nationale et, face au gouvernement, se pose comme le défenseur toujours vigilant du pouvoir législatif », écrit Marc Abélès dans son livre Un ethnologue à l'Assemblée.

Reste maintenant à savoir qui succèdera à Yaël Braun-Pivet. La député des Yvelines a certes été réinvestie par son groupe Ensemble pour la République (ex-Renaissance), mais affrontera Naïma Moutchou (Horizons), André Chassaigne (Nouveau Front populaire), Charles de Courson (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires), Philippe Juvin (Les Républicains) ainsi que Sébastien Chenu (Rassemblement national).

Le ou la patronne du Palais-Bourbon, qui sortira des urnes cette après-midi après un, deux, voire trois tours de scrutin, sera élu(e), en théorie, pour cinq ans par ses pairs. Il préside les séances publiques, nomme des personnalités au Conseil constitutionnel ou au Conseil supérieur de la magistrature, et peut s'opposer à des amendements en vertu de l'article 40 de la Constitution.

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Quand une figure de la IVè ravit le Perchoir en 1973

Quel que soit le résultat, le nouveau titulaire du Perchoir sera le 19è président de l'Assemblée nationale depuis la naissance de la Vè République en 1958. Le premier d'entre eux est le gaulliste Jacques Chaban-Delmas, député de Gironde, maire de Bordeaux, qui tiendra jusqu'en juin 1969, date de sa nomination à Matignon au lendemain de l'élection de Georges Pompidou à la présidence de la République.

Suivra le résistant méconnu Achille Peretti, un avocat d'abord élu en Corse, puis dans les Hauts-de-Seine jusqu'en 1977, à la suite de quoi il siègera au Conseil constitutionnel. Aujourd'hui, son nom reste non pas associé au Palais-Bourbon, mais à Nicolas Sarkozy qui a épousé sa nièce Marie-Dominique Culioli avant de reprendre la mairie de Neuilly-sur-Seine à sa mort en 1983.

Toujours est-il qu'au lendemain des élections législatives de 1973, la figure de la IVè République, Edgar Faure, réussit à ravir le Perchoir. « Adepte de la décrispation avant Valéry Giscard d'Estaing et de l'ouverture avant Jean-Pierre Soisson qui fut son collaborateur, il comprit très vite qu'après la signature du Programme commun, il serait difficile de jeter un pont entre la majorité et l'opposition. Aussi, en 1973, prit-il du champ et de la hauteur en se faisant élire président de l'Assemblée nationale », rappelle l'historien Eric Duhamel dans le Dictionnaire historique de la vie politique française au XXè siècle.

Jamais deux sans trois pour Jacques Chaban-Delmas

C'est sans compter Jacques Chaban-Delmas qui parvient à reprendre le contrôle du Palais-Bourbon de 1978 à 1981, avant que le socialiste Louis Mermaz en prenne les rênes jusqu'en 1986. Cette année-là, les élections législatives conduisent à la victoire de la droite qui porte, pour la troisième et dernière fois, Jacques Chaban-Delmas à l'Hôtel de Lassay jusqu'en 1988.

« C'était quasiment mon père spirituel. Il m'a tout appris. Nous étions tous deux sportifs de haut niveau : moi, membre de la réserve de l'équipe de France de judo ; lui, champion de tennis, international de rugby et golfeur. Il m'a même demandé de créer un practice dans les sous-sols » confie aujourd'hui à La Tribune son directeur de cabinet Patrick Ollier, lui-même détenteur du Perchoir de mars à juin 2007.

Réélu président en 1988, François Mitterrand dissout l'Assemblée nationale, conduisant à l'élection de son ancien Premier ministre Laurent Fabius à la tête de la Chambre basse. L'élu de Seine-Maritime ne restera que quatre ans en poste, devenant, en 1992, premier secrétaire du Parti socialiste. C'est le Landais Henri Emmanuelli qui prendra le relais à la présidence de l'Assemblée nationale.

Fabius ou l'art de ne jamais aller au bout de ses mandats

Un mandat qui durera seulement un an, deux mois et dix jours, écourté par la victoire de la droite aux élections législatives de 1993. Tandis qu'Edouard Balladur entre à Matignon, le Vosgien Philippe Séguin préside aux destinées du Palais-Bourbon jusqu'en 1997. C'est sans compter le président Chirac qui dissout l'Assemblée nationale au profit de la gauche plurielle qui porte, de nouveau, Laurent Fabius au sommet.

Sauf que là encore, il ne va pas au bout de son mandat de cinq ans. A la suite de la démission de DSK du gouvernement Jospin en mars 2000, il devient ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Dans la foulée, le Belfortain Raymond Forni récupère le Perchoir pour deux ans, deux mois et vingt jours jusqu'à la réélection de Chirac en mai 2002 face à Jean-Marie Le Pen.

Dès lors, c'est son fidèle compagnon de route Jean-Louis Debré qui hérite de l'Hôtel de Lassay jusqu'en mars 2007, échéance à laquelle le chef de l'Etat le nomme président du Conseil constitutionnel. Aussitôt l'ancien directeur de cabinet de Chaban de 1986 à 1988, Patrick Ollier, est élu, mais il ne reste pas après les élections législatives de juin et doit laisser, au bout de quatre mois, son fauteuil au Haut-Savoyard Bernard Accoyer.

Une compensation, faute de nomination gouvernementale

A cet homme de droite, c'est logiquement un homme de gauche, Claude Bartolone, qui prend la présidence de l'Assemblée nationale en juin 2012 après l'élection de François Hollande. « Rares furent les titulaires à avoir intrigué pour y parvenir et, à l'inverse, nombreux sont ceux qui reçurent la charge comme une compensation, faute d'avoir été appelés au gouvernement », soulignent Jean-Jacques Urvoas et Magali Alexandre, co-auteurs du Manuel de survie à l'Assemblée nationale - L'art de la guérilla parlementaire.

Ils ne croient pas si bien dire. Trois personnalités de trois sensibilités différentes ont occupé ce poste depuis la victoire d'Emmanuel Macron en 2017: l'ex-écologiste François de Rugy jusqu'en 2018 avant sa nomination au ministère de la Transition écologique, l'ex-socialiste Richard Ferrand jusqu'en 2022, et bien sûr la marcheuse historique Yaël Braun-Pivet qui espère rempiler. Réponse en fin d'après-midi.

César Armand
Commentaires 15
à écrit le 19/07/2024 à 10:45
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Brown Pivert n'avait pas caché son amertume à l'égard de Micron après qu'il ait décidé de dissoudre l'Assemblé nationale. Maintenant qu'elle récupère sa planque et les avantages liés elle va de nouveau faire allégeance

à écrit le 18/07/2024 à 22:31
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Point surprise, ce sera Yaël, dieu l'a décidé. Tout le reste sert à amuser les gogos..

à écrit le 18/07/2024 à 14:22
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Madame Braun Pivet est trop marquée Macron pour être réélue , de ce fait ça va se jouer entre deux symboles à l'ancienne le coco Chassaigne et l'aristocrate de Courson !

à écrit le 18/07/2024 à 12:07
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Ça semble bien payé cette non responsabilité. Si il faut chercher des économies que l'on commence par le train de vie de l'état sans oublier les résidences de plaisir comme la Lanterne à Versailles..

à écrit le 18/07/2024 à 11:52
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Moi je pense à des personnes issues de la société civile comme Loana ou même pourquoi pas Michel Sardou pour rassembler à droite.

à écrit le 18/07/2024 à 11:23
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trop drole ,le RN vote pour le candidat LFI qui se retrouve elu grace a ses voix (quelle image) et le groupe Macron est cocu .tout le monde est servi...

à écrit le 18/07/2024 à 9:37
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Tous nos modes de scrutin ne correspondent plus à la réalité du corps électoral et ne sont donc plus du tout démocratiques, puisqu'on ne vote plus pour, mais contre .Le seul scrutin démocratique est le scrutin européen, car il est à un tour. Certes, ...

à écrit le 18/07/2024 à 9:20
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Quand je pense au budget que nous coûte cette assemblée de tristes sires, il y a de quoi pleurer! "traitement" de base 2024 d'un député: 7637,39. Au lieu de se préoccuper de la situation financière de la France, ils se font élire avec des slogans de ...

le 18/07/2024 à 11:19
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Peanuts..le deficit de la France est de 3000 milliards,une autre planete soit 6 000 millions de deputes

le 19/07/2024 à 7:03
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Le perchoir c'est dans les 15 000 euros pour donner la parole..

à écrit le 18/07/2024 à 9:20
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C'est marrant, la gauche ne veut plus d'une femme à la présidence de l'Assemblée nationale. Les autres non plus. Le wokisme serait-il trahi par les siens ? Une mode passe...

à écrit le 18/07/2024 à 9:15
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Bon, nous ne retrouverons pas de sitôt une personnalité de la trempe et de la hauteur de vue de Philippe Seguin. Mais tout de même, en l'absence de majorité, les députés NFP et d'autres auraient pu s'accorder sur la personne de Charles de Courson, q...

à écrit le 18/07/2024 à 8:58
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Le seul gouvernement qui pourrait marcher serait un cabinet technique guidé par le FMI sous la pression des marchés. Les députés seraient soit obligés de voter les mesures soit responsables du fait que ne seront pas payés retraites et salaires.

le 18/07/2024 à 9:58
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La version allemande de Dossier 51 c'est vraiment moche.

à écrit le 18/07/2024 à 7:35
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La vache fallait pas que les gosses y trainent à l'assemblée avec Chaban ...

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