À quoi pourrait ressembler le programme économique de Kamala Harris ?

La candidate, qui a reçu le soutien de Joe Biden, devrait poursuivre une politique économique proche du président. Néanmoins, elle porte une vision davantage progressiste sur certains dossiers comme le climat ou la santé. Tout l'enjeu pour elle sera de satisfaire la frange la plus à gauche des démocrates, tout en restant au centre pour attirer les indécis.
En se retirant de la Course à la Maison Blanche, dimanche 21 juillet, Joe Biden a offert la possibilité à sa vice-présidente, Kamala Harris, de prendre le relai et de devenir la première présidente des Etats-Unis.
En se retirant de la Course à la Maison Blanche, dimanche 21 juillet, Joe Biden a offert la possibilité à sa vice-présidente, Kamala Harris, de prendre le relai et de devenir la première présidente des Etats-Unis. (Crédits : Evelyn Hockstein)

« C'est la meilleure », clame le président américain. En se retirant par surprise de la course à la Maison Blanche, dimanche 21 juillet, Joe Biden a offert la possibilité à sa colistière, Kamala Harris, de prendre le relais et de devenir la première présidente des Etats-Unis. D'autant qu'elle a désormais reçu assez de soutien de la part de délégués démocrates pour être investie. Mais quelle est la vision économique de la vice-présidente de la première économie mondiale ? Pour l'heure, les contours de son programme restent flous.

Surtout, elle n'a distillé que peu d'informations concernant ses préférences économiques ces dernières années. A 59 ans, cette ancienne procureure générale de Californie et sénatrice, d'origine indienne et jamaïcaine, se distingue par une arrivée en politique assez récente qui diverge de Joe Biden, élu depuis les années 1970. Mais, une chose est sûre, « aucune révolution économique n'est à prévoir avec Kamala Harris », qui devrait ainsi poursuivre l'œuvre de Joe Biden, prévient Olivier Piton, avocat aux Etats-Unis et auteur de « Kamala Harris, la pionnière de l'Amérique ».

Du reste, Kamala Harris va devoir marcher sur des œufs si elle compte se faire élire. « Elle ne doit pas se radicaliser, pour rassurer les milieux financiers et les républicains modérés qui pourraient voter pour elle à la place de Trump », souligne Romuald Sciora, directeur de l'observatoire politique et géostratégique des Etats-Unis de l'Iris. Sauf que d'un autre côté, elle ne doit pas non plus « sembler trop à droite » et faire fuir l'électorat démocrate qui pourrait aller voter pour des candidats de partis plus marginaux, comme les écologistes du Green party ou encore le candidat indépendant Robert Francis Kennedy Jr.

Lire aussiLevée de fonds record pour Kamala Harris après le retrait de Joe Biden

Une candidate centriste

En campagne depuis quelques mois, l'ex-colistière a plébiscité les diverses politiques économiques menées par la Maison Blanche telles que l'Inflation Reduction Act, un paquet de réformes écologiques et sociales sensiblement protectionnistes et interventionnistes pour faire prendre aux Etats-Unis le tournant de la décarbonation, ou encore l'accord bipartisan sur les infrastructures, l'Infrastructure Investment and Jobs Act. « Grâce à la loi sur la réduction de l'inflation, nous déversons actuellement des milliers de milliards de dollars dans les rues des États-Unis pour reconstruire nos routes, nos ponts et nos trottoirs », a-t-elle notamment déclaré en mai à Milwaukee lors d'un événement organisé par la Maison Blanche.

La vice-présidente de Biden se présente aujourd'hui sur « une ligne plutôt centriste économiquement », commente Olivier Piton, « elle se situe dans l'aile traditionnelle des démocrates depuis Franklin Roosevelt et le New Deal [nom donné au programme de réformes économiques et sociales, déjà interventionnistes, mis en place en 1933, Ndlr] ». Dans ce contexte, « elle est également en faveur d'une hausse d'impôts sur les hauts salaires, comme Joe Biden », complète l'expert.

Néanmoins, elle a pu aller plus loin par le passé, en proposant notamment de retirer totalement les réductions d'impôts permises par Trump en 2017. Elle a également prôné la mise en place d'un crédit d'impôt lorsqu'elle était au Sénat, pouvant aller jusqu'à 6.000 dollars pour les ménages à plus faibles revenus. Des idées qui ne seront cependant pas retenues par le président Biden lors de son mandat.

Plutôt alignés sur la politique du commerce extérieur, Kamala Harris s'est néanmoins distinguée du président par son opposition à des traités de libre-échange. Ce fut le cas concernant l'Accord de partenariat transpacifique en 2016 lorsqu'elle était sénatrice ou encore lors du traité entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique en 2020 arguant pour la protection des travailleurs américains et de l'environnement.

Lire aussiAprès l'abandon de Joe Biden, attentiste, Wall Street scrute les premiers pas de Kamala Harris

Une politique progressiste sur la santé et le climat

La vice-présidente s'affiche donc dans la continuité du président mais peut se montrer davantage progressiste. « Pendant quatre ans, elle a développé une politique centriste, qui a pu néanmoins sembler davantage à gauche aux Etats-Unis, plus proche de celle de Bernie Sanders que de celle d'Obama », précise de son côté Romuald Sciora de l'Iris. Elle a notamment soutenu, lorsqu'elle était sénatrice, le « Medicare for All » de Bernie Sanders, consistant à éliminer les assurances privées et à transférer les Américains vers un programme géré par l'Etat. Lors de sa campagne à l'investiture démocrate pour la présidentielle de 2020, elle a évolué vers une proposition plus modérée, renonçant à supprimer les assurances privées. Joe Biden avait alors fustigé une proposition encore trop progressiste, alors que l'aile la plus à gauche estimait qu'elle n'allait pas assez loin.

C'est surtout sur le climat que Kamala Harris apparaît plus progressiste que Biden. En tant que sénatrice, elle a soutenu le « Green New Deal », un ensemble de projets d'investissements dans les énergies décarbonées porté par l'aile gauche des démocrates, dont l'élue à la Chambre des représentants Alexandria Ocasio-Cortez. Elle s'est par ailleurs positionnée contre la fracturation hydraulique, une technique d'extraction des hydrocarbures controversée en raison de son impact sur l'environnement. A tel point qu'elle a même attaqué l'administration Obama à propos d'une évaluation environnementale qui pouvait ouvrir la voie à la fracturation hydraulique en Californie.

Rien n'est encore joué cependant pour la candidate même si pour le moment, d'après le dernier sondage de CBS News-YouGov du 21 et 22 juillet, 45% des démocrates estiment que leurs chances sont meilleures contre Trump depuis le départ de Biden. Et seuls 10% estiment que la situation est pire.

Le droit à l'avortement au cœur de sa campagne

Loin des enjeux purement économiques, Kamala Harris a principalement géré le dossier des droits reproductifs lors de son mandat de vice-présidente, qu'elle a choisi de placer désormais au cœur de sa campagne. Pour rappel, la Cour suprême a décidé en 2022 de supprimer le droit à l'avortement dans le pays, la question appartenant dorénavant aux Etats.

« Nous allons nous battre pour le droit à disposer de son corps en sachant très bien que si Trump en a l'occasion, il promulguera une interdiction de l'avortement dans chacun des Etats » américains, a-t-elle rappelé lundi, à l'occasion de son premier événement de campagne.

Commentaires 6
à écrit le 24/07/2024 à 21:14
Signaler
"À quoi pourrait ressembler le programme économique de Kamala Harris ?" A l'évidence se poser la question c'est déjà y répondre, Kamala Harris n'a aucun programme autre que s'incruster à la maison blanche. Reste à savoir si elle projette de so...

à écrit le 24/07/2024 à 20:26
Signaler
Sans illusion... car si cela devait changer d'un iota, elle ne serait pas élue !

à écrit le 24/07/2024 à 15:15
Signaler
Bonne idée ! Voyons voir, jouons aux Cassandre ou aux devinettes ! A quoi pourrait ressembler un programme de redressement et de réindustrialisation de la France ? Les partis représentés à l'assemblée ou au Sénat ayant maintes fois démontré leur ...

à écrit le 24/07/2024 à 11:59
Signaler
A rien du tout, elle est nulle...On l'appelle calamity Harris là bas

à écrit le 24/07/2024 à 11:50
Signaler
Justement elle a un boulevard devant elle afin de proposer une politique redistributive ce que les centristes sont incapables de comprendre car incapables de comprendre grand chose par principe même. Elle n'est qu'outsider c'est le moment de proposer...

à écrit le 24/07/2024 à 8:05
Signaler
Il est comique de voir que les U.S.A. finissent par virer encore plus a gauche que la France

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.