Kamala Harris danse. Ses comptes de campagne font des arabesques et le ballet des allégeances démocrates est continu. La vice-présidente s'apprête aussi à entamer un pas de deux : d'ici à mercredi, elle dévoilera l'identité de son colistier, le futur vice-président, si elle accède à la Maison-Blanche. En public, les caciques démocrates affichent leur unité derrière leur nouvelle cheffe. En privé, chaque soupirant se démène pour devenir l'élu.
La faiseuse de prince n'est pas pressée : elle savoure la fenêtre médiatique que lui a ouverte la défection de Joe Biden il y a deux semaines. Demain, elle devrait connaître un nouveau moment de gloire avec l'officialisation de sa candidature par le parti. En profitera-t-elle pour désigner celui qu'elle inscrira sur son ticket ?
Le choix de l'homme blanc
Une chose est sûre. Pour capter un électorat que la vice-présidente ne peut atteindre, l'intégralité des candidats pressentis sont des hommes, blancs, plutôt centristes, et élus dans l'un de ces fameux États clés qui décideront de l'élection du 5 novembre. « Il nous faut tenir le centre, rafler une majorité d'électeurs modérés et remobiliser la large coalition qui a contribué à la victoire de Joe Biden en 2020 », explique Kate de Gruyter, du think tank de centre gauche Third Way.
Il y a encore une semaine, une dizaine de noms circulaient. Ils ne sont plus que trois désormais. Premier sur la liste, Mark Kelly, ex-astronaute reconverti en sénateur de l'Arizona, plaît pour son storytelling : sa femme est une rescapée d'une tentative d'assassinat et depuis, le couple milite pour le contrôle des armes à feu. Le second prétendant, Tim Walz, est son exact opposé puisqu'il est un partisan de la gâchette. Cet ancien enseignant a l'avantage d'être le gouverneur du Minnesota, un État progressiste mais de plus en plus tenté par le trumpisme. Il bénéficie aussi du soutien de plusieurs syndicats. Pas inutile si l'on veut séduire le vote ouvrier. Enfin, son confrère Josh Shapiro est également dans le viseur de Kamala Harris. Fervent défenseur de la politique d'Israël au Moyen-Orient, il administre la Pennsylvanie, un « swing State » qui pourrait drainer un nombre important d'électeurs en novembre.
En raison du retrait de Joe Biden et d'un calendrier bouleversé, les trois favoris ont eu très peu de temps pour convaincre Kamala Harris de les choisir. Alors, ils vont à l'essentiel en flattant la vice-présidente, jusqu'à en être flagorneurs. Au fil des interviews, chacun essaie aussi de mettre ses qualités en avant. De son côté, Harris a passé ces derniers jours à scanner leurs profils. Aidée de l'ancien procureur général d'Obama, de sa responsable de campagne et de sa directrice de cabinet, elle examine minutieusement le moindre détail et les éventuels faux pas du passé. « Il n'est pas question de choisir quelqu'un qui pourrait lui porter préjudice », explique Brigid Harrison, de l'université d'État de Montclair. Il ne s'agirait pas de se retrouver dans la position de Donald Trump qui, depuis dix jours, voit son colistier, JD Vance, accumuler bourdes et déclarations hasardeuses.