Fed : Jerome Powell ouvre enfin la voie à une baisse des taux cette année aux Etats-Unis

Lors d'une conférence à Washington, ce mardi, le président de la Réserve fédérale américaine a affirmé que les derniers chiffres de l'inflation « renforcent quelque peu la confiance » dans l'atteinte de l'objectif de 2%. Surtout, il a affirmé que l'institution pourrait rapidement baisser ses taux en cas d'affaiblissement du marché du travail.
« Si nous devions constater un affaiblissement inattendu du marché du travail, nous pourrions également réagir en conséquence », a assuré Jerome Powell.
« Si nous devions constater un affaiblissement inattendu du marché du travail, nous pourrions également réagir en conséquence », a assuré Jerome Powell. (Crédits : ELIZABETH FRANTZ)

Jerome Powell change de discours. Après avoir joué la montre et répété que le combat contre l'inflation n'était pas gagné et que la Réserve fédérale américaine ne baisserait pas ses taux si l'inflation ne ralentissait pas davantage, le président de l'institution s'est montré beaucoup plus optimiste lundi.

« Notre niveau de confiance ne s'était pas accru au premier trimestre, mais les données des trois mois du deuxième trimestre, y compris celui de la semaine dernière (les chiffres de juin, NDLR), renforcent quelque peu la confiance », a déclaré Jerome Powell devant l'Economic Club de Washington.

Pour rappel, les taux de la Fed, qui guident les taux des crédits accordés par les banques, sont depuis près d'un an à leur plus haut niveau en plus de 20 ans, dans la fourchette de 5,25 à 5,50%, dans l'objectif de ralentir l'investissement et la consommation et, in fine, l'inflation. L'institution a, plusieurs fois, affirmé vouloir être certaine que la hausse des prix atteigne son objectif de 2% par an avant de détendre sa politique monétaire. Or, la dynamique des prix avait repris de plus belle en début d'année.

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Mais les choses semblent changer. Selon l'indice PCE, privilégié par la Fed, l'inflation a atteint 2,6% sur un an au mois de mai. Surtout, elle a ralenti en juin en passant à 3%, contre 3,3% en mai, selon l'indice CPI du département américain du Travail, publié jeudi.

Le spectre du chômage refait surface

En dehors du ralentissement de l'inflation, le changement de point de vue de l'institution responsable de la politique monétaire des Etats-Unis est animé par la peur de faire grimper le taux de chômage.

La Fed dispose d'un double mandat, visant à favoriser au maximum le plein-emploi tout en maintenant l'inflation autour de sa cible de 2%. Mais en maintenant ses taux directeurs à un niveau élevé, la gardienne du dollar ralentit l'activité économique, ce qui pèse sur l'emploi. « J'ai toujours pensé qu'il existait un moyen de ramener l'inflation à notre objectif de 2% de manière durable sans que le marché du travail ne souffre, sans que le taux de chômage ne soit élevé », a souligné le président de la Fed. Notamment parce que le marché du travail, qui a connu une importante pénurie de main d'oeuvre, a été « tellement en surchauffe qu'il pourrait se calmer un peu ».

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Mais le taux de chômage aux États-Unis a légèrement progressé le mois dernier, pour atteindre 4,1%, alors que les créations d'emplois ralentissent par rapport au mois précédent, restant cependant au-dessus des attentes. Au total, 206.000 emplois ont été créés sur le mois écoulé, contre 218.000 le mois précédent, selon les données publiées vendredi par le département du Travail. C'est donc moins qu'au mois de mai, durant lequel 218.000 emplois avaient été créés. « Nous assistons à la poursuite du rééquilibrage du marché du travail. Mais nous anticipons que la croissance se poursuive et que le taux de chômage reste faible, ce qui devrait soutenir l'activité économique cette année », a de son côté commenté dans une note la cheffe économiste de HFE, Rubeela Farooqi.

« Si nous devions constater un affaiblissement inattendu du marché du travail, nous pourrions également réagir en conséquence », a donc assuré Jerome Powell, laissant entendre que les taux pourraient alors être abaissés rapidement.

Une première baisse en septembre?

Avec cette nouvelle intervention positive lundi, c'est désormais la troisième fois que Jerome Powell exprime sa confiance dans l'évolution de l'inflation ces derniers mois, après des commentaires similaires à l'occasion d'un forum des banquiers centraux à Sintra, au Portugal, le 2 juillet et lors de son audition au Sénat, le 9 juillet.

Face à tant de commentaires positifs, plus de 75% des analystes anticipent une première baisse pour la réunion de mi-septembre, selon l'outil de veille de CME FedWatch.

Des remarques qui ont « renforcé notre confiance dans le fait que la Fed va abaisser ses taux en septembre. Mais le chemin à suivre est plus incertain que d'habitude du fait de l'élection présidentielle », ont estimé de leur côté les analystes d'Oxford Economics dans une note. « Nous pensons toujours qu'un relâchement (des taux, ndlr) en juillet aurait été optimal mais nous sommes inquiets que les décideurs avec des vues plus "incisives" se positionnent contre une baisse en septembre », a de son côté jugé Gregory Daco, chef économiste pour EY, également dans une note.

Un tel scénario ferait intervenir la première baisse à l'occasion de la dernière réunion de la Fed prévue avant la tenue de l'élection présidentielle aux Etats-Unis, qui se déroulera le 5 novembre prochain. Il est néanmoins peu probable que les taux reviennent au niveau historiquement bas qu'ils avaient atteint entre la crise financière mondiale et la pandémie, a averti Jerome Powell.

La Banque centrale européenne en avance sur la Fed

A contrario de la Fed, début juin, la Banque centrale européenne (BCE) a effectué une première baisse de son taux directeur de 0,25 point de pourcentage. Ainsi, le taux de dépôt passe à 3,75%, tandis que le taux de refinancement et le taux de facilité de prêt marginal s'établissent respectivement à 4,25% et 4,5%.

Cette première baisse intervient après un cycle de forte hausse qui s'est étalé entre 2022 et 2023. Une conséquence économique du déclenchement de la guerre en Ukraine, qui a entraîné notamment une flambée des coûts de l'énergie en Europe. Depuis septembre 2023, le taux directeur de la BCE avait été maintenu entre 4% et 4,75%, au plus haut depuis la création de l'euro.

Néanmoins, début juillet, Christine Lagarde, la présidente de la BCE avait tenu à prévenir que le match contre l'inflation élevée « n'était pas encore gagné », la cible de 2% ne devant pas être atteinte avant fin 2025. En raison de cette volatilité de l'inflation toujours en cours, la BCE reste prudente quant à une éventuelle nouvelle baisse de son taux directeur durant l'année 2024.

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 17/07/2024 à 8:26
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"en cas d'affaiblissement du marché du travail." Il serait temps d'apprendre l'américain les gars ! ^^

à écrit le 16/07/2024 à 14:41
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"Fed : Jerome Powell ouvre enfin la voie à une baisse des taux cette année aux Etats-Unis" Manifestement le camps démocrate est aux abois au point réaliser un LBO pour la prochaine présidence américaine... A noter que dès le 1er août l'inflat...

à écrit le 16/07/2024 à 14:25
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En terme de taux des emplois (U3 & U6), il n'est plus utile de parler des modélisations édulcorées du BLS américain, tant les rétropédalages ensuite furent emblématiques d'un profond malaise. Et maintenant, concernant le taux de l'inflation, malgré d...

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