![Michel Picon (U2P), Patrick Martin (Medef), François Asselin (CPME) lors des auditions des candidats aux législatives ce jeudi.](https://static.latribune.fr/full_width/2394291/medef-legislatives.jpg)
Le patronat compte bien peser dans la campagne éclair des législatives. Devant un vaste parterre de patrons, les candidats des principales forces politiques sont venus exposer leurs priorités dans la salle Gaveau du 8e arrondissement de Paris, ce jeudi. Etaient présents Edouard Philippe (Horizons), Boris Vallaud (PS) et Eric Coquerel (LFI), Jordan Bardella (RN) et Eric Ciotti, Bruno Le Maire, et Bruno Retailleau (LR). En revanche, aucune femme n'était sur la scène pour présenter les grands axes des programmes économiques. Cette absence criante de parité n'a pas manqué de faire réagir certains observateurs à l'extérieur.
Après l'annonce fracassante de la dissolution par le chef de l'Etat Emmanuel Macron, les principales organisations patronales (Medef, CPME et U2P) sont restées silencieuses pendant plusieurs jours. Renonçant à publier un communiqué commun, elles ont finalement pris position récemment, mais individuellement. Signe que ce sujet est particulièrement sensible au sein des états-majors du patronat tricolore. Le Medef a finalement décidé de s'exprimer sur les risques que représentaient à leurs yeux l'arrivée à Matignon du Rassemblement national (RN) ou du Nouveau Front populaire (NFP) dans une dizaine de jours.
Majorité présidentielle : politique de l'offre et fin de la CVAE d'ici 2027
En plein marasme budgétaire, la fiscalité a occupé une large part des échanges de la matinée. La veille, la Commission européenne a tapé sur les doigts de la France pour ses déficits excessifs. Bruxelles a estimé que la trajectoire du programme de stabilité présenté au printemps ne permettait pas à l'Hexagone de revenir sous la barre des 3% d'ici 2027. Malgré ce contexte de finances publiques dégradé, Edouard Philippe a plaidé pour « la stabilité fiscale ». « Il s'agit de permettre aux entreprises françaises d'être à peu près compétitives face à nos voisins. Il ne faut absolument pas changer de logique », a insisté l'ancien Premier ministre.
« On ne change pas une fiscalité bonne pour les entreprises », a abondé le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, affirmant que « la stabilité fiscale » est sa première priorité.
Interrogé sur les impôts de production, le locataire de Bercy a confirmé qu'il allait « supprimer la CVAE d'ici 2027 » s'il était encore aux manettes après le 7 juillet, date du second tour des législatives. Sur ce point, Bruno Le Maire avait rétropédalé sur le calendrier de suppression de cette taxe. Ce qui avait fait bondir les dirigeants. S'agissant des ménages, les deux représentants du bloc central ont été peu prolixes durant leur intervention respective. Le Premier ministre, Gabriel Attal, s'est engagé à baisser la fiscalité sur les classes moyennes de 2 milliards d'euros, mais cette promesse n'a pas du tout été évoquée pendant les auditions.
Rassemblement national : suppression de la CVAE et C3S dans le viseur
Accompagné de l'ancien président de LR, Eric Ciotti, le chef de file du Rassemblement national Jordan Bardella était en opération apaisement. « J'ai compris qu'il fallait que je rassure les milieux économiques, » a annoncé le prétendant au siège de Matignon. Promettant de « remettre de l'ordre dans les pays et les comptes publics », Jordan Bardella a confirmé qu'il ferait « un audit des finances de la nation ».
« Le gouvernement va hériter d'une situation financière de quasi faillite. Cette situation appelle à la responsabilité ».
Coté entreprises, le vingtenaire entend « poursuivre la baisse des impôts de production. La CVAE (Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) sera intégralement supprimée et le chantier de la C3S (Contribution sociale de solidarité des sociétés) sera poursuivi ». S'agissant des salariés, l'ancien porte-parole du RN propose une hausse de 10% des salaires pour les personnes payées jusqu'à trois SMIC, «sans cotisations patronales » et «la liberté est laissée aux entreprises ». Dans le viseur du RN, Jordan Bardella a promis de s'attaquer « aux contraintes normatives qui pèsent sur l'entreprise ».
Nouveau Front populaire : « Le choc fiscal ne concernera pas 90% des entreprises »
A l'autre bout du spectre politique, le Nouveau Front populaire (NFP) a défendu une politique de relance keynésienne. « La politique d'Emmanuel Macron est l'inefficacité de la politique de l'offre. La France investit moins que ses voisins [...]. La productivité en berne », a déclaré Boris Vallaud, député socialiste des Landes sortant. S'agissant des entreprises, les représentants du bloc des gauches ont insisté sur le fossé entre les TPE et les PME et les grandes entreprises. « Il n'y a pas de hausse prévue de la fiscalité pour les PME », a précisé l'ancien secrétaire général adjoint de l'Elysée sous François Hollande.
« S'agissant du cadre fiscal, rien ne va changer pour 90% des entreprises. Nous voulons être aux côtés des petites entreprises ».
Sur les grandes entreprises, Boris Vallaud et l'ancien président de la Commission des finances à l'Assemblée nationale Eric Coquerel (LFI) sont restés très vagues. Sur le SMIC à 1.600 euros net qui inquiète particulièrement les milieux patronaux, « cela peut être un choc pour certaines entreprises », a consenti l'ancien député de Seine-Saint-Denis. «Nous allons compenser les surcoûts pour les PME », a ajouté Boris Vallaud.
Pour la fiscalité des ménages, l'ancien directeur de cabinet d'Arnaud Montebourg à Bercy a demandé « un effort patriotique des milliardaires, car nous sommes dans un moment de réarmement productif ». « L'effort fiscal est à 50% chez les Français et à 27% chez les milliardaires », a complété le haut fonctionnaire.
Dans son programme, la coalition des gauches a proposé un retour sur l'impôt sur la fortune (ISF) avec un volet climat. Sur le front des finances publiques, « nous prévoyons un budget détaillé pour le début de la première période », a expliqué Eric Coquerel. «Nous ne comptons pas sur une explosion des déficits. Le développement de la croissance va faire des rentrées fiscales et de cotisations. Le déficit ne permettra pas de financer principalement notre programme ». Reste à connaître les détails de leur programme économique.