Avant toute chose, il convient de lever toute ambiguïté. Il ne saurait y avoir de débat sur la différence entre chocolatine et pain au chocolat. Car il n'y en a pas. La première est le mot usuel dans le sud-ouest de la France ainsi qu'au Nouveau-Brunswick et au Québec tandis qu'on parle de « couque au chocolat » chez nos voisins belges. Le second est celui couramment pratiqué. Ce qui importe aujourd'hui, c'est de savoir si un pain au chocolat doit comporter une ou deux barres. Mais là encore, le débat est au bord de l'extinction. La règle des deux barres semble le langage commun. Fini l'époque où l'on économisait savamment la destruction de son pain au chocolat en réservant pour la fin et de façon transversale l'irrésistible présence du chocolat avec la mie du pain. Aujourd'hui, comme s'il fallait remplir l'espace, surjouer et colorier très fort, il y a deux barres. Point barre.
Cela dit, ne sommes-nous pas pour autant à l'orée des trois barres ? Des pâtissiers comme Christophe Roussel, à La Baule, sont adeptes du bi. « Encore faut-il bien choisir son chocolat, dit-il. Souvent, il s'agit d'une médiocre poudre de cacao. Pour notre part, nous travaillons les barres de 11 grammes avec du Valrhona. Ce qui nous importe, c'est de ne pas trop "pousser" la pâte pour qu'il ne soit trop gonflé et afin de préserver son croustillant. Nous évitons également d'utiliser des pâtes mortes réalisées avec de la poudre de cacao pour accentuer le croustillant sur le dessus ; nous préférons beurrer légèrement deux fois pour un léger brillant pour ces pains confectionnés à la main. »
Un exercice délicat qui se joue sur la magie d'un feuilletage aux atours de brioche
Même son de cloche (au chocolat) chez Christophe Felder, à Mutzig, qui y va carrément avec deux grosses barres de 16 grammes (extra bitter Valrhona). « Il nous faut surtout éviter qu'il brûle sur les côtés et faire lever la pâte tout doucement. L'idéal, le vrai repère, c'est le croissant de boulangerie dans sa vraie nature bonhomme et dodue. La tendance les réduit vers les 60 grammes alors que les nôtres restent autour de 90 grammes. » Et alors que tout le monde avale sans broncher des abominations à 2,50 euros sur les aires d'autoroute, ceux des authentiques artisans tournent autour de 1,50 euro. Cet exercice délicat se joue enfin sur la magie d'un feuilletage aux atours de brioche. Tout est alors question de doigté : ne pas trop mélanger le beurre à la pâte pendant le tourage et imperméabiliser les différentes couches. Le pain au chocolat appartient à cet univers candide des pâtisseries apparemment simples mais ultra-techniques. Et profondément bienveillantes.
LA BAULE CHAMONIX MUTZIG PARIS Bo&Mie, 91, rue de Rivoli (1er). Des Gâteaux et du Pain, 89, rue du Bac (7e). Julien, 75, rue Saint-Honoré (1er). Christophe Louie, 12, rue Dupetit-Thouars (3e). Boulom, 181, rue Ordener (18e). Sain, 13, rue Alibert (10e). Boulangerie Vandermeersch, 278, avenue Daumesnil (12e)Notre sélection
Christophe Roussel, 6, allée des Camélias.
Maison Bourdillat, 424, rue Joseph-Vallot.
Les pÂtissiers, 29, rue du Maréchal-Foch.
Atelier P1, 157, rue Marcadet (18e).
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