Le marché de la publicité vit, depuis des années, une profonde transformation. C'est ce que montre une nouvelle fois l'Arcom, le régulateur de l'audiovisuel, dans son rapport annuel publié la semaine dernière. En 2023, le total des recettes publicitaires des six grands médias (l'affichage, le cinéma, la presse, la radio, la télévision et Internet) a atteint 14,9 milliards d'euros. Ce qui représente forte hausse de 4,7% par rapport à l'exercice précédent. Le gâteau n'a jamais été aussi gros, et le marché s'est bien remis de la crise du Covid-19, qui avait vu les annonceurs lever le pied sur leurs investissements.
(Crédits: Arcom)
Alors champagne ? Pas pour tout le monde. Comme le souligne l'Arcom, « cette hausse est portée principalement par le numérique », et « cette reprise masque des disparités fortes entre supports médias, certains n'ayant pas encore retrouvé les niveaux de recettes d'avant-crise ». L'exercice 2023 a été historique pour la publicité sur Internet, qui représente, désormais plus de la moitié (51%) des recettes publicitaires. À titre de comparaison, c'était moitié moins en 2015 (24%), il y a seulement 9 ans...
(Crédits: Arcom)
Mais pour la télévision, c'est toujours la soupe à la grimace. Sa part de marché continue de baisser, lentement mais sûrement. En 2023, elle accuse une baisse de 2 points, à 23%, pour un montant de 3,3 milliards d'euros. Rappelons, là encore, qu'en 2015, les champions du petit écran captaient un tiers (32%) des recettes publicitaires totales dans l'Hexagone. « L'exercice 2023 est donc une année de ralentissement pour le marché publicitaire télévisuel, qui parvient difficilement à maintenir le retour à des niveaux d'avant-crise », précise l'Arcom.
Basculement des audiences
Ce constat préoccupe évidemment les chaînes privées gratuites, comme TF1 et M6, pour qui la publicité constitue l'essentiel de leurs sources de revenus. Ce basculement progressif des audiences, et notamment des plus jeunes, vers le numérique (Netflix, Youtube, etc...) contribue à diminuer la durée d'écoute de la télévision (DEI), et finit, au bout du bout, par impacter leur chiffre d'affaires publicitaire.
L'Arcom rappelle que « les évolutions successives du paysage audiovisuel payant et gratuit ont eu progressivement un impact sur l'audience des chaînes de télévision ». Concrètement, cette fameuse DEI n'a cessé de croître de 1996 à 2012, où elle était de 3 heures et 50 minutes au quotidien. Mais elle n'a ensuite cessé de baisser. Un regain de la DEI a certes été constaté en 2020, mais cela est dû à la crise sanitaire et aux différents confinements. Depuis, la durée d'écoute individuelle poursuit son érosion, et n'était plus, en 2023, que de 3 heures et 19 minutes.
(Crédits: Arcom)
On notera, par ailleurs, la forte baisse de la DEI de la tranche d'âge des 35-49 ans. Entre 2018 et 2023, celle-ci a baissé de près d'une heure, à 2 heures et 33 minutes ! Seuls les plus de 65 ans voient leur DEI, sur la même période, légèrement progresser.
(Crédits: Arcom)
Les grandes chaînes gratuites comme TF1 et M6 ne savent que trop bien que cette décroissance menace leur activité. Ils ont d'ailleurs bien tenté de se marier en 2022, en arguant que leur union leur permettrait de mieux concurrencer les géants du Net. Mais leur deal a finalement été retoqué par l'Autorité de la concurrence. Ils tentent, depuis, de faire leur nid dans le numérique. C'est la raison pour laquelle TF1 comme M6 ont lancé les plateformes de streaming TF1+ et M6+. Avec l'ambition de suivre et de préserver leurs audiences. Ce qui ne sera pas une mince affaire.
Sujets les + commentés