Atos : coup de théâtre, le consortium Onepoint retire subitement son offre de rachat

Par latribune.fr  |   |  1110  mots
(Photo d'illustration) (Crédits : Benoit Tessier)
Le consortium mené par David Layani, choisi pour assurer le sauvetage financier d'Atos, a finalement annoncé ce mercredi retirer son offre. Le groupe lourdement endetté pourrait donc être racheté par le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky qui a renouvelé son intérêt pour reprendre les discussions.

[Article publié le mercredi 26 juin 2024 à 9h09, mis à jour à 14h17] Les rebondissements n'en finissent plus. Ce mercredi, le consortium mené par l'entreprise française Onepoint, candidat pour assurer le sauvetage financier d'Atos, lourdement endetté, a annoncé retirer son offre.

« Le consortium Onepoint, Butler Industries et Econocom a constaté que les conditions n'étaient pas réunies pour conclure un accord ouvrant la voie à une solution pérenne de restructuration financière et de mise en œuvre » de son projet, a annoncé Onepoint dans un communiqué.

Pourtant, le 11 juin, le conseil d'administration de l'ex-fleuron informatique français avait annoncé que « Atos travaillera avec le consortium Onepoint (emmené par David Layani, NDLR) pour parvenir à un accord définitif de restructuration financière qui sera ensuite mis en œuvre par le biais d'une procédure accélérée dédiée d'ici juillet 2024. »

Juste après l'annonce de Onepoint, le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, autre candidat au rachat a d'ailleurs renouvelé son intérêt pour reprendre les discussions. Celui-ci a adressé « un courrier réitérant son intérêt pour participer à sa restructuration financière », a confirmé Atos. En attendant la confirmation du repreneur, pour « satisfaire la demande de liquidité à court et moyen terme du groupe », Atos indique avoir reçu de la part de ses créanciers « une proposition globale de restructuration financière révisée ».

« Les discussions se poursuivent avec le comité représentatif des créanciers et certaines banques sur la base de cette proposition en vue de parvenir à un accord dans les meilleurs délais », a-t-il ajouté. De nombreuses annonces qui ont finalement été appréciées par les investisseurs, puisque le titre d'Atos s'est envolé de 10% en Bourse ce mercredi à 9h30.

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Atos doit réduire sa dette de 3 milliards d'euros

Pour rappel, embourbé dans une crise financière depuis près de trois ans, qui a fait notamment chuter sa valorisation boursière à des niveaux inédits sous les 2 euros, Atos avait enclenché en février une procédure de restructuration, sous l'égide de la spécialiste du sauvetage d'entreprises Hélène Bourbouloux, qui avait notamment travaillé sur les dossiers Casino ou Orpéa. L'ex-fleuron de la « French Tech » a annoncé début mai avoir besoin de 1,1 milliard d'euros de liquidités pour son activité en 2024-2025 et vouloir réduire de 3,2 milliards d'euros sa dette brute, qui avoisine les 5 milliards, pour sauvegarder son activité.

Lourdement endetté, Atos devait choisir un repreneur. Encore début juin, deux propositions de restructuration financière s'offraient au groupe : celle d'EPEI, du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, allié au fonds Attestor et l'autre du consortium mené par Onepoint, son principal actionnaire, et emmené par David Layani.

Onepoint préféré pour le rachat d'Atos

Mais la proposition du consortium mené par Onepoint répondait à plus de critères : « Le Conseil d'administration a conclu, sous l'égide de la Conciliatrice, que la proposition reçue du consortium Onepoint est la mieux orientée en matière d'intérêt social d'Atos, y compris de ses salariés, clients, fournisseurs, créanciers, actionnaires et autres parties prenantes », précisait un communiqué de presse du groupe publié le 11 juin. La proposition respecte également les « principaux paramètres financiers fixés par la Société, assure une structure de capital plus solide et apporte notamment des liquidités financières adéquates pour financer l'activité ».

Dans le détail, la proposition du consortium Onepoint comprenait principalement la restructuration de la dette financière du groupe ainsi que l'instauration d'une structure de capital durable. Elle proposait également 2,9 milliards d'euros de dette existante à convertir en fonds propres. « Sous réserve d'ajustements finaux », elle était assortie de l'apport de 1,5 milliard d'euros sous forme de dette et d'une augmentation de capital de 250 millions d'euros, entraînant la répartition du capital suivante : 21% pour le consortium mené par Onepoint et 9% pour les obligataires.

L'État veut reprendre les activités stratégiques d'Atos

Autre dossier brûlant sur la table pour Atos : le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a annoncé fin mai son intention de placer Worldgrid, la filiale stratégique d'Atos dédiée au «contrôle-commande » des centrales nucléaires françaises, sous le contrôle de l'État. Une annonce qui s'inscrit dans la volonté de l'État d'acquérir les activités d'Atos jugées « stratégiques », afin qu'elles ne tombent pas entre les mains d'acteurs étrangers.

Le 14 juin, un communiqué de l'entreprise a révélé que l'Etat avait fait une offre de 700 millions d'euros pour racheter les activités jugées stratégiques et sensibles du groupe, dont les supercalculateurs utilisés pour la dissuasion nucléaire. La proposition de l'Etat, formulée dans une « lettre d'offre confirmatoire non engageante », concerne « l'acquisition potentielle de 100% des activités d'Advanced Computing, de Mission-Critical Systems et de Cybersecurity Products de la division BDS (Big Data & Cybersécurité) » d'Atos, a précisé ce dernier. Ces activités englobent les supercalculateurs utilisés pour la dissuasion nucléaire, les contrats avec l'armée française et les produits de cybersécurité. « Cette offre confirmatoire non-engageante porte sur une valeur d'entreprise globale de 700 millions d'euros », a poursuivi le groupe.

« Nous avons tenu parole. J'ai toujours dit qu'il fallait préserver les activités stratégiques d'Atos, nous le faisons », a réagi peu de temps après l'annonce du 14 juin Bruno Le Maire. « Nous avons pris nos responsabilités pour acheter [ces activités, ndlr] avec d'autres entreprises qui pourraient être partenaires », a-t-il ajouté.

Le ministère de l'Économie a aussi réalisé un prêt de 50 millions d'euros à l'entreprise et acquis une « action de préférence » lui permettant de mettre son veto à certaines opérations au niveau de Bull, la filiale qui construit ses supercalculateurs.

« Les actifs souverains ont bien été sécurisés par une "Golden Share" de l'Etat et l'opération de rachat de ces actifs souverains par l'Etat en lien avec des industriels se poursuit en parallèle comme prévu », a indiqué Bercy à l'AFP ce mercredi.

« L'Etat via le Comité interministériel de restructuration industrielle continue de suivre très précisément le dossier afin de favoriser les solutions de continuité pour l'entreprise Atos », a-t-on ajouté de même source.

Partenaire informatique mondial du Comité international olympique (CIO) depuis 2002, Atos sera l'un des piliers technologiques des JO de Paris. Il sera chargé de la gestion des accréditations, de la diffusion instantanée des résultats ou encore de la cybersécurité.

(Avec AFP)