Tony Estanguet : « Merci les Français ! »

ENTRETIEN - S’il était confiant dans la réussite populaire de ces Jeux, le président du Comité d’organisation a été surpris par le supplément d’âme.
Tony Estanguet au village olympique, le 2 juillet.
Tony Estanguet au village olympique, le 2 juillet. (Crédits : © LTD / Aurelien Meunier/Getty via AFP)

Devant une banane et une Danette au chocolat, Tony Estanguet reçoit dans un bureau éphémère de l'Arena Paris Sud, vendredi, après la médaille de bronze de l'équipe masculine de tennis de table. Malgré les nuits courtes, il a bonne mine...

LA TRIBUNE DIMANCHE - Pensiez-vous que ces Jeux prendraient autant ?

TONY ESTANGUET - Ça a dépassé mes rêves. Quelque chose que je n'explique pas s'est produit le soir de la cérémonie d'ouverture ou le premier jour, et c'est allé au-delà de ce qu'on imaginait. Quand je voyais nos sites de compétition, ça ne pouvait qu'être beau. Mais ça s'est avéré plus joli en vrai que sur ordinateur. On a mis toutes les conditions pour que l'alchimie prenne mais j'ai été surpris par cette ferveur, par la manière dont les Français se sont approprié ces Jeux.

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Comment l'expliquer ?

Je pense qu'on en avait collectivement besoin. Dès le début, la mobilisation a été inédite. Au-delà des sites. Près de 5 millions de personnes dans les zones de célébrations, on n'a vu ça nulle part. C'est le résultat d'années de boulot. On a su anticiper beaucoup de sujets et faire en sorte que ça puisse se tenir dans des bonnes conditions : ambiance, transports, sécurité... Ce pays sait faire des choses folles et ce n'est pas un hasard quand ça se passe bien. Acteurs publics, privés, monde sportif : tout le monde a vraiment joué le jeu. Mais le petit supplément d'âme, c'est beau. Et ça, on ne le maîtrisait pas. Donc merci les Français !

Aujourd'hui, on vous arrête pour vous remercier. Était-ce souvent le cas avant les Jeux ?

Non. Mais j'y ai toujours cru parce qu'à chaque étape ça cartonnait. À l'ouverture de la billetterie, on a vendu des millions de places en quelques jours ; le CIO n'avait jamais vu ça. On ouvre la plateforme pour les volontaires ? On a 300 000 demandes pour 45 000 places. L'arrivée de la flamme à Marseille ? Un carton. Ça nous a démontré qu'il y avait beaucoup d'envie. Oui, il y a eu de nombreuses critiques, mais on entend souvent plus les mécontents que les autres. Mais c'est vrai, c'est chouette que les gens soient heureux. Personne ne me dit que le prix des places est un scandale, ils ont l'impression d'avoir vécu un truc fou.

Cette communion, c'est une autre forme d'héritage ?

Oui, l'éphémère du spectacle laisse aussi un héritage. Une trace dans nos mémoires collectives, comme en 1998. Des millions de jeunes vont se mettre au sport, et ça, c'est le plus bel héritage. Sans la magie des Jeux, ça n'existe pas.

Avez-vous réussi à prendre du plaisir pendant quinze jours ?

On dort peu mais c'est magique. Tous les jours, je vis ma meilleure vie. Ça me ramène aussi aux émotions de ma carrière. Comme ça s'est plutôt bien passé sur la partie opérationnelle, j'ai eu du temps pour aller sur les sites, rencontrer les volontaires, les équipes, les fédérations internationales, les médias...

Quel moment vous a touché ?

J'ai l'impression d'en avoir vécu une quarantaine. Mais je dois reconnaître que l'allumage de la vasque... Derrière, Céline Dion. Le déluge n'aura pas empêché ce moment-là, c'était beau. Le soulagement. J'étais stressé pendant cette cérémonie, c'était affreux. À chaque tableau, je me disais : OK, on a réussi à le sauver. Le suivant ? C'est bon. Jusqu'au dernier.

Tous les jours, je vis ma meilleure vie

Le vendredi 26 juillet, quand vous découvrez la météo pourrie et le sabotage des lignes TGV, vous vous dites quoi ?

Ça a été la journée la plus longue de ma vie. Mauvaise nouvelle sur mauvaise nouvelle. Jusqu'à 18 heures, on nous prédisait une heure de petite pluie. Puis on a compris que ça n'allait pas être ça. Et ça n'a fait qu'empirer. Il a fallu tenir l'énergie des équipes, et je suis très fier de la manière dont elles ont réagi. Au fond, cette dramaturgie fait partie de l'histoire. Les gens s'en souviendront peut-être plus parce qu'il a plu que si le temps avait été parfait. Les images télé auraient été plus jolies et on aurait vu plus de choses, mais on aurait perdu ce côté hors norme de début de Jeux. La pluie, on avait anticipé. Mais pas de cette intensité pendant quatre heures. Une folie. Je ne savais plus où me mettre. J'étais mal à l'aise vis-à-vis des gens, des invités, des artistes, des sportifs qui, pour certains, sont restés deux heures sous la flotte. Ils m'ont remercié à la fin alors que je pensais qu'ils allaient me mettre des baffes.

Êtes-vous surpris d'avoir aussi peu de polémiques au regard de toutes celles qu'il y a eues avant ?

Ça se passe toujours comme ça. Sebastian Coe [président de Londres 2012] m'avait prévenu. Les Jeux écrasent tout.

Il y a tout de même la Seine. Même si les épreuves ont eu lieu, elle n'a pas été aussi baignable qu'espéré...

Sur le dernier mois, elle l'a été beaucoup plus souvent que l'inverse. Vous avez vu les conditions météorologiques ? Ça ne pouvait pas être pire. On a eu l'équivalent d'un mois de pluie sur les vingt-quatre premières heures des JO. Mais depuis qu'il fait beau, les chiffres sont excellents. L'eau est vraiment de très bonne qualité. Le dispositif fonctionne.

La difficulté, là, c'est de ne pas se relâcher jusqu'à la cérémonie de clôture ?

Oui, il y a des enjeux de sécurité jusqu'au bout. Tous les jours, des gens essayaient d'entrer par effraction. Il faut rester très vigilant. Et puis c'est un peu le début de la fin. La nostalgie commence à poindre chez certains alors que ce n'est pas fini. On a hâte d'être aux Jeux paralympiques. Ça va nous faire beaucoup de bien. J'ai le succès de Londres en tête et j'ai hâte de voir comment notre pays va réagir.

Que s'était-il passé ? L'envie de prolonger la fête ?

C'est un peu ça. Beaucoup de gens n'ont pas eu de places pour les JO et veulent goûter à ça. À des prix très accessibles. Ce sont des athlètes et des disciplines qu'on connaît moins, donc on va découvrir de nouvelles choses. Et puis ce sont des leçons de vie incroyables. Je donne vraiment rendez-vous aux Français. Ils vont être très impressionnés par le niveau sportif, la ferveur et la magie des sites - qui sont les mêmes. On vend cinq fois plus de billets par jour qu'avant le début des Jeux. Il y a un impact, et c'est classique. On en a vendu à peu près la moitié, mais il en reste encore beaucoup pour quasiment tous les sports.

Emmanuel Macron a annoncé une parade sur les Champs-Élysées le 14 septembre pour l'ensemble des athlètes français. Qu'en pensez-vous ?

C'était important car ils nous ont offert des moments magiques et sont pour beaucoup dans ce qui s'est passé. La tradition veut que les médaillés soient reçus par le chef de l'État ; la volonté est de le faire sur les Champs pour qu'un maximum de Français vivent ce moment.

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Commentaires 16
à écrit le 13/08/2024 à 14:26
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J.O. 2024 ? Ne manquez pas de lire "Oxymore" de Jean Tuan chez C.L.C. Éditions. L'auteur observateur attentif de la Chine, le pays de son père, nous dévoile comment la Chine utilise tous les moyens pour que ses athlètes triomphent au niveau mondial....

à écrit le 12/08/2024 à 22:30
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Ajoutons: "Tony Estanguet : Merci le Comité d'organisation des JO pour ces budgets et ces rémunérations somptuaires ! " Evènement sportif plutôt réussi certes et qui aura réjoui les amateurs et pratiquants de sport (malgré l'absence injustifiée de...

à écrit le 12/08/2024 à 12:51
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Va te baigner dans la Seine

à écrit le 12/08/2024 à 12:46
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Estanguet remercie les français pour sa rémunération indécente ? Je serais curieux de connaître la rémunération de tous ces bobos (notamment ceux en charge de la cérémonie d'ouverture) qui n'ont jamais enfilé une paire de baskets mais ont profité du ...

à écrit le 12/08/2024 à 11:53
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il ne faut jamais desesperer de la "masse biologique".

à écrit le 11/08/2024 à 20:33
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Apres la France ruinée par 50 ans déficits ( +1000 milliards sous Macron,) La "fête des JO" pour voler le résultat des élections.Macron démission!!!

le 12/08/2024 à 20:03
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Les JO ont été une réelle réussite. Réjouissez vous au lieu de toujours critiquer.

à écrit le 11/08/2024 à 20:29
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Apres

à écrit le 11/08/2024 à 17:10
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J.O. 2024 ? Ne manquez pas de lire "Oxymore" de Jean Tuan chez C.L.C. Éditions. L'auteur observateur attentif de la Chine, le pays de son père, nous dévoile comment la Chine utilise tous les moyens pour que ses athlètes triomphent au niveau mondial....

le 12/08/2024 à 23:44
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Raffarin sort de ce corps lol …ce mec travaille contre les intérêts de son propre pays..

à écrit le 11/08/2024 à 17:00
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Par contre Johnny au grand palais c'était pas obligé, mettre de l'ambiance ok se vautrer dans.la beaufitudede de décideurs incultes c'est moche. C'est incroyable d'ailleurs ce réflexe de responsables de se précipiter directement vers le très mauvais...

le 12/08/2024 à 9:59
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Comment voulez-vous que cette caste de petits arrivistes aient une once de bon gout? Ce sont pour la plupart des incultes n'ayant qu'un seul but. Se remplir les poches les plus rapidement possible. Ils aiment la vulgarite, sont cyniques jusqu'au b...

le 13/08/2024 à 12:56
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Il avait l'air quand même bien épuisé avant ces jeux

à écrit le 11/08/2024 à 8:49
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"La tradition veut que les médaillés soient reçus par le chef de l'État" Ça tombe bien il n'attend que ça le gars, ça va être encore pénible. Le sport, la compétition, les champions c'est magnifique mais il est quand même profondément regrettable...

le 12/08/2024 à 20:05
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Tous les présidents ont reçu les médaillés des J.O. - Mais comme c'est Macron ce n'est pas bien n'est ce pas ?

le 13/08/2024 à 12:47
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Les traditions approximatives ça s'arrête.

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