Sabotage à la SNCF : « Cela ressemble à un acte de l’ultragauche » (Frédéric Péchenard, ex-directeur général de la Police nationale)

ENTRETIEN EXCLUSIF - Aujourd’hui vice-président LR de la Région Île-de-France, l’ancien grand flic revient sur le sabotage subi par la SNCF et les menaces qui pèsent sur les Jeux.
Jules Pecnard
Le haut fonctionnaire est chargé des questions de sécurité auprès de Valérie Pécresse. Ici, en 2021.
Le haut fonctionnaire est chargé des questions de sécurité auprès de Valérie Pécresse. Ici, en 2021. (Crédits : SÉBASTIEN SORIANO/FIGAROPHOTO)

L'attaque d'ampleur perpétrée contre notre réseau ferré dans la nuit de jeudi à vendredi, et dans quatre départements de façon simultanée, a temporairement paralysé une partie du pays le jour de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques à Paris. La résilience de la SNCF a permis au trafic de reprendre progressivement mais rapidement : hier, sept TGV sur dix circulaient sur les axes Nord, Bretagne et Sud-Ouest. Directeur général de la Police nationale de 2007 à 2012, Frédéric Péchenard a eu à gérer l'affaire de Tarnac, fin 2008, à la suite du sabotage de plusieurs caténaires. À l'époque, comme c'est le cas aujourd'hui, la gauche radicale avait été pointée du doigt.

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LA TRIBUNE DIMANCHE - Le sabotage subi par le réseau SNCF a entraîné de fortes perturbations à un moment crucial pour la sécurité de la France. N'est-ce pas alarmant ?

FRÉDÉRIC PÉCHENARD - C'est très difficile de sécuriser la totalité d'un réseau ferroviaire. Il est plus aisé de le faire pour l'aviation commerciale. Les trains sont vulnérables en gare, mais aussi sur nos dizaines de milliers de kilomètres de rails. J'en tire deux conclusions. La première est que les responsables ont bénéficié d'une complicité intérieure, car il y a eu plusieurs attaques et de manière simultanée. Même si une des quatre a échoué, cela nécessite d'être bien renseigné. La seconde est qu'on a affaire à des gens déterminés, bien que la finalité de leur sabotage paraisse curieuse. On peut penser, au vu de la sécurisation massive de la cérémonie d'ouverture des Jeux à Paris, qu'ils ont voulu s'attaquer à des endroits moins surveillés. Cet effet d'aubaine est d'ailleurs le risque pour les semaines à venir.

Comment peut-on prévenir ce genre d'attaque coordonnée ?

Il y a deux manières. La plus visible est la surveillance physique qui, encore une fois, a fonctionné pour une des quatre attaques préparées. La deuxième manière, plus efficace, c'est le renseignement. Le travail de nos services consiste à s'introduire au sein de groupes suspects puis procéder à des interpellations avant le passage à l'acte. La surveillance des milieux islamistes, d'ultragauche, mais aussi d'une puissance étrangère comme la Russie, relève de la responsabilité de la DGSI. Si vous avez tous ces fers au feu, vous vous en sortez. On l'a vu avec le nombre important d'actes déjoués ces dernières années.

Le terreau est fertile, influencé de manière dangereuse par Jean-Luc Mélenchon et ses amis de La France insoumise

Cela ressemble tout de même à un cauchemar pour nos forces de l'ordre...

C'est un vrai sujet, d'autant plus qu'on est en période de vacances et de chassés-croisés. Durant la préparation des JO, beaucoup se sont demandé : si tout notre dispositif de sécurité est à Paris, qui va protéger le reste de la France ? Pour y répondre, c'est assez simple, on a fait supprimer quasiment tous les congés de nos policiers. Plus de 95 % d'entre eux sont mobilisés, y compris dans le reste du pays. Après, le cauchemar numéro un, c'était la cérémonie d'ouverture. Tous les politiques étaient présents, les athlètes aussi, avec un énorme public sur place et un milliard de téléspectateurs. Tout incident aurait eu un retentissement extrême. Maintenant, il nous reste quinze jours d'épreuves. On a tous en mémoire l'attentat terroriste de Munich, aux Jeux de 1972, où une dizaine d'athlètes israéliens ont été assassinés. Il ne faut pas baisser la garde.

D'expérience, est-ce que le mode opératoire de ce sabotage vous en rappelle un en particulier ?

Déjà, qualifions cet acte de terroriste, pour simplifier les choses. Cela reste la principale menace qui pèse sur les Jeux. Ce terrorisme peut être islamiste, d'ultragauche, voire d'État. L'enquête le déterminera, mais il n'est jamais exclu que ce soit combiné. On l'a vu dans notre histoire avec la Fraction armée rouge, alliée aux Palestiniens pour détourner des avions, ou encore Action directe agissant en sous-main pour les Iraniens. C'est toujours difficile de savoir qui est derrière, et ce n'est pas parce qu'on arrête les exécutants qu'on identifie les commanditaires. En l'espèce, cela ressemble plutôt à un acte de l'ultragauche, de plus en plus violente. On le voit autour des mégabassines ou avec l'intervention du black bloc dans nos manifestations. Cela ressemble à l'émergence d'une nouvelle organisation de type Action directe. Le terreau est fertile, influencé de manière dangereuse, selon moi, par Jean-Luc Mélenchon et ses amis de La France insoumise, qui cherchent en permanence le chaos et l'affrontement. À côté de ce mouvement politique qui met de l'huile sur le feu, nous avons des militants qui n'ont pas peur de commettre des actes de sabotage et qui sont à deux doigts de basculer dans le terrorisme.

La cérémonie s'est-elle bien déroulée d'après vous ?

Oui, incontestablement. On peut discuter des problèmes de circulation et des mesures très restrictives, mais en matière de sécurité tout s'est parfaitement bien passé. La préfecture de police et le ministère de l'Intérieur ont fait un travail remarquable. D'abord par le nombre de policiers déployés, qui a permis une saturation de l'espace. Au moindre souci, la réponse gendarmique et policière aurait été très rapide. Ensuite, tout a été fait en amont. Le service national des enquêtes administratives de sécurité (SNEAS) a pu cribler pas loin d'un million de personnes, ce qui a permis d'en empêcher quelques milliers, à risque, d'être invités. Le barriérage, aussi, a obligé les gens à passer par des sas pour être fouillés. C'est pénible pour les Parisiens, mais on n'avait pas d'autre choix. Dernière raison du bon déroulement : le travail de la Région Île-de-France sur les transports. Il faut rendre hommage à Valérie Pécresse, qui a été la première à dire qu'on ne pourrait pas transporter un million de personnes. Il y aurait eu un risque de bousculades. On a obtenu une jauge à 400000, ce qui a permis à Île-de-France Mobilités de gérer les choses convenablement.

Quels sont les principaux risques désormais ?

Pour l'instant, ce sont les Jeux. Ce que cherchent avant tout les terroristes, c'est la répercussion d'actions spectaculaires. Le risque plus global lié au terrorisme, quelle qu'en soit l'origine, va durer encore des mois, voire des années. L'attaque du Hamas en Israël, le 7 octobre, l'a fait monter d'un cran. Il y a aussi un risque lié au terrorisme d'État : n'oublions pas qu'on participe à une coalition contre la Russie. Il serait étonnant que Moscou, grâce au savoir-faire du FSB ou du GRU, ne tente rien contre nous. Ils le font déjà, de façon agressive, par le biais de leurs hackers informatiques.

Jules Pecnard

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Commentaires 12
à écrit le 29/07/2024 à 15:42
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Mouais... On voit bien comment les accusations de "l'ultra-gauche" pour Tarnac ont fait flop... Ca peut être n'importe qui. Y compris des personnes/groupes manipulés par al Russie ou affiliés. Ils sont à l'origine de plusieurs incendies criminels ...

à écrit le 29/07/2024 à 9:35
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L'Ultra gauche, comme le groupe AZF qui avait saboté des rails a l'époque ? alors que finalement c'etait un patron un peu bizarre. Ou alors comme l'affaire Julien Coupat? Alors que finalement ce n'était pas lui? Mais qui par contre se fait encore ...

à écrit le 29/07/2024 à 8:55
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"Sabotage à la SNCF : « Cela ressemble à un acte de l’ultra-gauche » (Frédéric Péchenard, ex-directeur général de la Police nationale)". Hello La Tribune, pourquoi ne rappelez-vous pas à vos lecteurs que Péchenard c'est l'intox de Tarnac? Donc depuis...

à écrit le 28/07/2024 à 18:12
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c'est probablement un acte de sabotage mais je crains que ces actes se renouvellent d'une façon ou d'une autre histoire de mettre la pagaille est de mettre' la pression sur macron il y a des gens tres doues de tout bord et qui n'hesiterons pas a...

le 29/07/2024 à 8:39
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nous savons tous que ces gens son protéger par le pouvoir et la justice et meme les instances de l'europe le privilege rouge eux ont le droit de tout dire et surtout de casser ce sont aux autre de payer la casse le pouvoir vas meme demander leu...

à écrit le 28/07/2024 à 15:13
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Et pourquoi pas de l'extrême droite ?

à écrit le 28/07/2024 à 15:13
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Et pourquoi pas de l'extrême droite ?

à écrit le 28/07/2024 à 11:16
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Police et Cnews, au même titre tout hier, semblent quand même étroitement liés, avouez que c'est bizarre pour une chaine qui revendique une "pluralité idéologie" ? LOL ! ^^

à écrit le 28/07/2024 à 10:15
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Péchenard aura-t-il fait des progrès depuis l'affaire de Tarnac, dont il est directement responsable du fiasco judiciaire?. Rappelons qu'en 2018, il s'est lamentablement planté, le Tribunal correctionnel de Paris admettant que le 'groupe de Tarnac' ...

à écrit le 28/07/2024 à 9:04
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Cela ressemble a du terrorisme étatique pour maintenir la division et éloigner la critique ! La faute c'est les autres !

à écrit le 28/07/2024 à 8:36
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LOOOL ! OSS 117 est sur le coup ! ^^

à écrit le 28/07/2024 à 7:56
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C'est bizarre... Tarnac... Il y a eu relaxe non ? ...😉 Tout de même, ces ultra gauche sont vraiment partout ! Quand ca va mal et avant même que ça aille mal...🤣 Enfin le pays n'est pas en grande forme grâce à l'ultra centre et à l'ultra néolibér...

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