![L'UE impose jusqu'à 38% de droits de douane supplémentaires sur les véhicules électriques chinois.](https://static.latribune.fr/full_width/2194311/drapeau-union-europeenne.jpg)
[Article publié le jeudi 04 juillet 2024 à 11h58 et mis à jour à 17h40] L'Union européenne met ses menaces à exécution. Bruxelles avait annoncé le 12 juin jusqu'à 38% de droits de douane supplémentaires sur les importations de véhicules électriques chinois à partir du 4 juillet, accusant Pékin d'avoir favorisé illégalement ses constructeurs automobiles. Ce sera finalement chose faite à partir de vendredi 5 juillet.
De leur côté, les constructeurs automobiles chinois XPeng et NIO ont assuré à l'AFP n'avoir aucune intention de quitter le marché européen, ce jeudi. « En tant qu'entreprise avec une vision globale, Xpeng ne changera pas sa stratégie d'exploration des marchés étrangers. Nous trouverons des moyens de minimiser l'impact sur les consommateurs » européens, a indiqué l'entreprise.
De son côté, son rival chinois NIO, aux modèles haut de gamme, a indiqué jeudi à l'AFP « suivre de près » le dossier. « A ce stade, NIO maintient les prix de ses modèles actuels sur ses marchés européens. Toutefois, il n'est pas exclu que les prix soient ajustés ultérieurement en raison de l'imposition de ces droits de douane », a affirmé la compagnie à l'AFP.
De son côté, MG France, filiale du groupe automobile chinois SAIC, a pris les devants en dédouanant et stockant 2.600 véhicules électriques, a confirmé jeudi sa direction. Du côté de la Fédération chinoise des constructeurs de voitures individuelles (CPCA), un organisme représentant le secteur automobile du géant asiatique, on dénonce une « erreur complète » de la part de l'UE.
Sur la base d'une vaste enquête antisubventions entamée en octobre 2023, Bruxelles estime que le secteur des véhicules à batterie électrique en Chine « bénéficie de subventions déloyales, ce qui constitue une menace de préjudice économique pour les producteurs européens ».
Bruxelles imposera des droits dits « compensateurs » de 17,4% au fabricant chinois BYD, de 19,9% à Geely et 37,6% à SAIC - des montants différents selon les niveaux de subventions publiques perçues. Par rapport aux niveaux annoncés le 12 juin, ces droits provisoires ont été légèrement abaissés, sur la base des observations soumises par les entreprises ciblées. Les autres constructeurs seront soumis à un droit supplémentaire moyen de 21% s'ils ont coopéré à l'enquête ou de 37,6% dans le cas contraire. Selon l'institut allemand Kiel, ces droits additionnels pourraient réduire de 42% les importations de véhicules électriques venant de Chine, une baisse « largement compensée par l'augmentation des ventes de producteurs européens et d'importations de pays tiers ».
Quatre mois pour imposer des droits définitifs
Ces nouveaux droits de douane compensateurs s'ajoutent aux taxes de 10% déjà appliquées par l'Union européenne aux véhicules fabriqués dans les usines en Chine. Ils permettront de freiner les importations de véhicules électriques chinois sans les bloquer complètement, selon l'UE, qui affirme se conformer aux règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Elle espère ainsi protéger une filière qui emploie 14,6 millions de salariés dans l'UE tout en évitant un conflit mortifère avec son deuxième partenaire économique derrière les Etats-Unis.
Cette décision avait déjà fait réagir Pékin, en juin. La Chine avait immédiatement dénoncé « un comportement purement protectionniste » des Européens, via un communiqué du ministère du Commerce. Elle avait averti qu'elle « prendra[it] toutes les mesures pour défendre fermement ses droits légitimes ». La Chine a déjà annoncé mi-juin une enquête antidumping sur les importations de porc européen. Une autre enquête avait été lancée en janvier sur les eaux-de-vie de vin de l'UE (dont le cognac). Désormais, vins, produits laitiers et voitures à grosses cylindrées seraient aussi dans son viseur, selon la presse chinoise.
Bruxelles a désormais quatre mois, après l'institution de ces droits provisoires, pour imposer des droits définitifs valables cinq ans, ce qui ouvre une fenêtre de dialogue jusqu'en novembre. « Des contacts se poursuivent au niveau technique en vue de parvenir à une solution (...) qui réponde de manière adéquate aux préoccupations de l'UE », insiste la Commission. Mais les pays membres pourront les écarter si au moins 15 d'entre eux, représentant au moins 65% de la population de l'UE, s'y opposent.
Volkswagen « rejette » ces droits de douane
Or, cette mesure ne fait pas l'unanimité au sein des Vingt-Sept. L'Allemagne, très engagée en Chine, avait bataillé avec la Suède et la Hongrie pour éviter des sanctions dans ce dossier, craignant des représailles - à l'unisson des inquiétudes des constructeurs automobiles allemands Audi, BMW, Mercedes et Volkswagen qui réalisent près de 40% de leurs ventes mondiales en Chine.
Le premier constructeur automobile européen Volkswagen a déclaré ce jeudi « rejeter » ces droits de douane, que le groupe allemand juge « préjudiciables ». « Les effets négatifs de cette décision l'emportent sur les avantages possibles pour l'industrie automobile européenne et en particulier pour l'Allemagne », a déclaré le groupe. La France et l'Espagne ont au contraire poussé pour des mesures proportionnées.
22% du marché européen
Bruxelles emboîte le pas aux Etats-Unis, qui avaient annoncé mi-mai une hausse des droits de douane sur les véhicules électriques chinois à 100%, contre 25% précédemment. Championne des moteurs essence et diesel, l'industrie automobile européenne craint de voir ses usines disparaître si elle échoue à endiguer la déferlante annoncée des modèles chinois qui ont une longueur d'avance dans l'électrique. Les véhicules électriques chinois représentent près de 22% du marché européen, contre près de 3% il y a trois ans, selon les estimations du secteur. Les marques chinoises comptent pour 8% des véhicules électriques vendus dans l'UE.
Cette décision s'inscrit dans un contexte plus large de tensions commerciales entre les Occidentaux et le géant asiatique, également accusé de détruire la concurrence dans plusieurs autres secteurs comme les éoliennes, les panneaux solaires ou encore les batteries. Pékin a déjà annoncé en janvier une enquête visant toutes les eaux-de-vie de vin importées de l'UE, dont le cognac. Le vin, les produits laitiers, le porc et les voitures à grosses cylindrées seraient aussi dans le viseur, selon la presse étatique chinoise.
(Avec AFP)
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