Lors de son intervention au Paris Air Forum 2024, le chef d'état-major de l'armée de l'Air et de l'Espace, le général Stéphane Mille, qui va célébrer les 90 ans de l'Armée de l'air le 28 juin à Versailles, prépare les aviateurs français à entrer dans un nouveau monde très incertain. Un futur où il ne s'agit pas selon lui d'opposer les matériels low-cost - « plutôt medium cost » - à des matériels high tech, mais de trouver un équilibre entre les deux. « La haute technologie permet d'emporter la décision », a-t-il assuré, tout en rappelant le plancher de 185 avions de combat, qui est inscrit dans la loi de programmation militaire (LPM) couvrant la période 2024/2030.
Tout comme la haute technologie, la polyvalence est clé pour l'armée de l'air avec des appareils capables de remplir différentes missions comme le Rafale, l'A400M et le MRTT. Il a d'ailleurs tenu à souligner la pertinence de l'organisation et des entraînements français, notamment à travers des opérations Pégase, qui ont permis une intervention « exceptionnelle » en termes d'intensité, en Nouvelle-Calédonie, avec le déploiement de huit MRTT, de nombreux équipages, certains en rotation à partir de Honolulu, et d'une dizaine d'A400M, qui ont transporté sur place hélicoptères et carburant.
Capacité d'évolution
En dépit de l'absence de supériorité aérienne dans le conflit russo-ukrainien, il constate que l'aviation de combat est tout à fait indispensable pour remporter un conflit. Et c'est, selon lui, son absence qui explique la difficulté de l'Ukraine. C'est la raison pour laquelle le président Zelinsky appelle de ses vœux la constitution d'une flotte militaire. D'ailleurs, l'annonce de la cession d'un certain nombre de Mirage 2000-5 à Kiev, si elle ne remet pas en cause a priori la base de Luxeuil, aura pour conséquence la réorganisation de la flotte Rafale. Le chef d'état-major de l'armée de l'air serait « favorable à ce qu'on compense ces appareils par des Rafale », en fonction des capacités de production de Dassault Aviation et des possibilités d'adaptation du calendrier de livraison.
La capacité d'évolution semble être pour le général Stéphane Mille une des caractéristiques de l'Armée de l'Air, devenue aussi celle de l'Espace depuis 2020. Elle travaille actuellement à la mise au point du SCAF (Système de combat aérien du futur), ce système de systèmes composé entre autres d'un avion de nouvelle génération, mais connecté aux satellites et autres composants - hélicoptères, cloud de combat et même navire et drones - qui représente « la totalité de ce qu'on voudrait avoir dès aujourd'hui ». Actuellement, « le projet avance de façon nominale » avec les partenaires, a-t-il souligné. « Je n'ai pas de crainte sur l'atteinte de jalons en 2025 », notamment sur les décisions définitives de la phase 2 sur la conception qui doivent être prises à cette date.
Ce système de systèmes, basé sur la connectivité entre ses différentes composantes, comprendra également un aspect spatial important. Le chef d'état-major de l'armée de l'air souhaite d'ailleurs que « tous les aviateurs et les officiers aient un vernis spatial ». Après l'inauguration du bâtiment du commandement de l'Espace dans les semaines à venir, il restera à « mettre en œuvre concrètement les principes de cette défense active », notamment avec la mise en orbite du satellite Yoda.
Nouvelles technologies
L'armée de l'air veut également profiter de nouvelles opportunités, notamment celle qu'offre la très haute altitude (THA) entre 20 et 100 km. Là encore, il s'agit de s'adapter avec les technologies déjà existantes, comme les radars. Parmi les changements les plus importantes des prochaines années, la défense sol-air sera entièrement renouvelée d'ici 2030. L'arrivée des drones dépendra de l'usage qu'on veut en faire : si le Reaper semblait « l'alpha et l'omega » au Sahel, il ne le sera pas en cas de conflit de très haute intensité.
L'armée de l'air de demain continuera en tout cas à travailler son interopérabilité avec les autres flottes, mais également avec les autres armes : « Il faut apprendre à utiliser le panel des autres capacités », a-t-il précisé. Cette évolution passe aussi par les pilotes de demain, avec une augmentation mécanique du nombre de pilotes de drones. L'arrivée de nouvelles technologies, comme l'IA, les ordinateurs quantiques, auront des conséquences sur l'usage des matériels, et participeront aux évolutions futures de l'armée de l'Air et de l'Espace.
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