Après son souhait de relancer l'Union des marchés de capitaux, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, plaide pour une Union bancaire, un projet européen inachevé. « L'Europe a trop longtemps laissé la puissance financière aux autres ; elle a trop longtemps négligé l'atout que sont les banques et des institutions financières compétitives », a notamment déclaré le gouverneur, ce mardi, lors du Paris Finance Forum.
L'Europe doit mobiliser au service de ses entreprises « la ressource inconnue », l'excédent d'épargne, soit une capacité de financement nette de plus de 300 milliards d'euros. C'est l'objectif du marché unique des capitaux. Mais, estime le banquier central, l'Europe doit reprendre le chantier de l'Union bancaire, déjà engagé depuis dix ans avec l'union de la supervision bancaire et la mise en place du mécanisme de surveillance et de résolution unique, doté d'un fonds de garantie de 80 milliards d'euros.
Facteur de compétitivité
Mais cela n'est pas suffisant. Il faut davantage d'harmonisation entre les systèmes bancaires européens. La trop forte fragmentation des systèmes bancaires est, selon le banquier, un frein « à l'émergence de banques paneuropéennes ». Or, « la taille est un facteur objectif de compétitivité, en particulier parce qu'elle permet aux banques d'amortir le coût des investissements indispensables » dans les nouvelles technologies. « Les autorités européennes doivent inlassablement renforcer leur combat contre encore trop de divergences nationales à courte vue et d'obstacles nationaux », estime le gouverneur. L'échec récent de créer un scheme de cartes bancaires paneuropéen, dans le cadre du projet EPI, en est une illustration.
Le gouverneur avait déjà appelé à une plus forte consolidation du secteur bancaire en Europe lors de la présentation, fin mai, du rapport annuel de l'ACPR, le superviseur français de la banque et de l'assurance. Ces propos ont eu un écho particulier moins de quinze jours après que le président de la République, Emmanuel Macron, en réponse à une question de Bloomberg TV, s'était plutôt ouvert aux fusions transfrontières en zone euro. Le journaliste américain avait alors évoqué le cas fictif d'une fusion entre la banque espagnole Santander, trop vite interprété comme un scénario qui aurait l'assentiment de l'Élysée. Ce que l'exécutif a dû démentir.
Fusion or not fusion
Quelques jours plus tard, le directeur général de la Société Général, Slawomir Krupa a estimé lors de l'assemblée générale des actionnaires, que la probabilité d'une opération d'ampleur transfrontalière en Europe était « nulle ».
Il répondait ainsi aux spéculations de marché sur une possible OPA sur Société Générale mais aussi il traduisait ce que pensent une grande majorité de grands banquiers, à savoir que les fusions transfrontières étaient jugées au mieux compliquées, au pire contre productives. « Sur le marché de la banque de gros, la consolidation est déjà faite, avec une ou deux banques européennes qui dominent le marché aux côtés des banques américaines », observe un grand banquier de la place.
Peu de synergies dans la banque de détail
Sur la banque de détail, le constat est clair : les synergies à attendre d'une fusion transfrontière sont faibles. C'est d'ailleurs le constat fait par BNP Paribas qui n'a pas réussi à faire des plateformes communes pour ses banques de détail en France, en Belgique ou en Italie. Les produits bancaires, comme les produits d'épargne ou le crédit immobilier, sont encore trop différents, et les comportements des clients également.
Enfin, les règles prudentielles sont devenues tellement strictes que grossir coûte de plus en plus cher en capitaux propres. Ce qui est paradoxal alors que les régulateurs appellent de leurs vœux à une plus grande consolidation du secteur bancaire européen. Bref, l'union bancaire, comme d'ailleurs, l'union des capitaux, n'est pas pour demain. Surtout avec un Parlement européen plus recentré sur les intérêts nationaux.
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