Mayotte s’invite à Matignon et à l'Élysée

Emmanuel Macron entend associer élus locaux et partis d’opposition à la réforme du droit du sol sur l’île.
Ludovic Vigogne
Gérald Darmanin et Marie Guévenoux en visite à Mayotte le 11 février.
Gérald Darmanin et Marie Guévenoux en visite à Mayotte le 11 février. (Crédits : © LTD / David Lemor/ABACAPRESS.COM)

Le 13 juin, Gabriel Attal a convoqué un séminaire gouvernemental pour discuter de l'avenir de Mayotte. À Matignon, les élus mahorais participeront aux côtés des ministres à cette réunion consacrée exceptionnellement à un seul territoire.

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Le gouvernement prépare en effet deux projets de loi concernant ce département ultramarin situé aux confins de l'océan Pacifique et frappé par de multiples crises. Le premier, ordinaire, contiendra un ensemble de dispositions pour lutter contre l'immigration irrégulière, renforcer la capacité d'action des forces de l'ordre, accompagner le développement économique de l'île, et moderniser son fonctionnement institutionnel. Le second, constitutionnel, vise à abroger le droit du sol dans le département, conformément à l'annonce faite sur place par Gérald Darmanin mi-février. Marie Guévenoux, la ministre déléguée aux Outre-Mer, a la charge de ces deux textes, qui devraient être prêts pour la fin juin et examinés à l'automne au Parlement. Depuis sa nomination au gouvernement Attal le 8 février, elle s'est déjà rendue à quatre reprises à Mayotte.

Dans la foulée de ce séminaire gouvernemental, Emmanuel Macron organisera à l'Élysée un autre rendez-vous dans un format qui ne passera pas inaperçu. Le chef de l'État y réunira les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, ceux des groupes politiques des deux chambres et des commissions concernées, ainsi qu'à nouveau les élus de Mayotte afin d'évoquer les projets de loi en préparation. Le président avait fait la confidence à ces derniers d'une telle initiative lorsqu'il les avait reçus à l'Élysée le 17 mai.

Sorte de déclinaison des rencontres de Saint-Denis, lors desquelles le chef de l'État avait convié à la rentrée dernière les chefs de parti pour échanger avec eux sur les grands sujets de la Nation, le rendez-vous élyséen consacré à Mayotte vise à « un partage des responsabilités », selon un des proches du président, et à éviter ainsi la mise en place d'un face-à-face entre Emmanuel Macron et le reste des acteurs politiques, comme c'est le cas sur la plupart des sujets sensibles. Si elle est réclamée par la population de l'île, en proie à une immigration illégale galopante et à une explosion de l'insécurité, la suppression du droit du sol sur le territoire mahorais est en effet très loin de faire l'unanimité. Si le RN et LR y sont favorables, la gauche y est opposée. Quant à la majorité, elle est divisée à propos de cette révision constitutionnelle abrasive.

« Chacun pourra ainsi expliquer sa position aux élus de l'île les yeux dans les yeux » - Un acteur du dossier

Président (Renaissance) de la commission des lois, Sacha Houlié est contre. La suppression du droit du sol à Mayotte « est un mirage », déclarait le député de la Vienne dans L'Opinion le 27 mars : « Non seulement cela ne va rien régler, mais en plus cela va créer une pagaille locale et des problèmes vis-à-vis de l'Hexagone. On l'a vu sur l'immigration : on sait que certaines oppositions sont maximalistes et ne s'arrêteront pas à la question mahoraise. »

En privé, Yaël Braun-Pivet ne cache pas non plus être très réservée sur une telle évolution institutionnelle. « Elle est assez sur la ligne Valls », confie un proche de la présidente de l'Assemblée nationale. « [Cette évolution] pourrait mettre en danger la cohérence historique et territoriale de notre droit de la nationalité, écrivait l'ancien Premier ministre dans une tribune publiée par Le Monde le 21 février. [...] En ouvrant avec autant de légèreté la boîte à communication, on prend le risque d'entrouvrir celle de Pandore. » De son côté, Sylvain Maillard, le chef des députés Renaissance, a fait part récemment à Gabriel Attal de ses craintes de voir des élus de l'aile gauche prendre ce prétexte pour s'éloigner de son groupe, alors que la majorité relative rend déjà tout compliqué.

En convoquant ce grand rendez-vous mahorais, Emmanuel Macron entend mettre chacun devant ses responsabilités. « Chacun pourra ainsi expliquer sa position aux élus de Mayotte les yeux dans les yeux », rapporte un acteur du dossier. Le 17 mai, le locataire de l'Élysée avait clairement signifié à ces derniers qu'il s'agirait également pour eux de convaincre leurs pairs métropolitains réticents à l'idée de mener une réforme du droit du sol de changer d'avis.

Dans tous les cas, au sein de l'exécutif, on s'attend à une rude bataille à l'Assemblée lors de l'examen du texte. Mathilde Panot, la présidente du groupe LFI, a en effet d'ores et déjà prévenu que ses troupes mèneraient le combat jusqu'au bout pour s'opposer à une évolution du droit du sol à Mayotte.

Ludovic Vigogne
Commentaire 1
à écrit le 02/06/2024 à 8:38
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Ma question est: mais pourquoi nous avons récupéré cette île ? Nous cherchions peut être un mouillage en eau profonde dans cette région ? Et avons nous mis le paquet pour stabiliser cette décision lourde en conséquences. Il en faudra un peu plus que...

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