Soupçons d'espionnage en Russie : le Français Laurent Vinatier placé en détention provisoire jusqu'au 5 août

Par latribune.fr  |   |  686  mots
Le Kremlin a inculpé le Français arrêté jeudi. (Crédits : EVGENIA NOVOZHENINA)
Laurent Vinatier, arrêté jeudi en Russie par les autorités, avait été inculpé plus tôt dans la journée. Suspecté d'avoir illégalement récolté des informations sur les activités militaires de la Russie, il est formellement poursuivi à ce stade pour avoir violé une loi traitant des « agents de l'étranger ». Mais le langage des enquêteurs laisse présager des poursuites encore plus graves.

[Article publié le vendredi 7 juin à 10H44 et mis à jour à 17H11] Le Français Laurent Vinatier, accusé d'avoir violé la loi sur les « agents de l'étranger », est placé en détention provisoire jusqu'au 5 août, a ordonné ce vendredi un tribunal de Moscou. L'accusé a pourtant présenté des « excuses » pour ne pas s'être enregistré comme agent de l'étranger et a affirmé avoir « porté la position de la Russie » dans son travail.

Le Comité d'enquête russe, puissant organe d'investigation, avait demandé le placement en détention provisoire de Laurent Vinatier, a indiqué ce vendredi à l'AFP son avocat, Alexeï Sinitsyne.

« Le Comité d'enquête dépose actuellement une requête auprès du greffe du tribunal pour demander la détention de Laurent Vinatier », a déclaré l'avocat.

L'homme de 48 ans qui travaille pour l'ONG suisse de résolution des conflits, « Centre pour le dialogue humanitaire », avait été interpellé dans un restaurant de Moscou, selon une vidéo diffusée par le comité d'enquête russe, jeudi, sur fonds d'accusations d'espionnage. Il a ensuite été inculpé de collecte de renseignements militaires, a rapporté ce vendredi l'agence TASS citant le comité d'enquête.

Laurent Vinatier est suspecté d'avoir illégalement récolté des informations sur les activités militaires de la Russie, mais a été formellement poursuivi à ce stade pour avoir violé une loi traitant des « agents de l'étranger », législation utilisée par Moscou pour réprimer ses détracteurs, et un délit passible de cinq ans de prison. Mais le langage des enquêteurs, qui évoquent une « collecte ciblée d'informations dans le domaine des activités militaires et militaro-techniques de la Russie », laisse présager des poursuites encore plus graves. Les informations qu'il aurait récoltées, « si elles sont obtenues par des sources étrangères, pourraient être utilisées contre la sécurité de l'État » russe, a affirmé la même source sans plus de précisions.

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Selon des sources interrogées par l'AFP, Laurent Vinatier, né en 1976, travaillait depuis de longues années sur le conflit entre la Russie et l'Ukraine, dans le cadre de discrets efforts diplomatiques en parallèle des États.

Macron affirme qu'il « recevra toutes les protections consulaires »

L'employeur de ce Français, a demandé jeudi « la libération » de son collaborateur. De son côté, Emmanuel Macron a confirmé, quelques heures après l'annonce de l'arrestation jeudi soir, qu'un ressortissant français avait été arrêté en Russie.

« Oui, un de nos compatriotes a été arrêté en Russie, (...) il s'agit d'un de nos compatriotes qui travaille pour une ONG suisse fondée par un ancien secrétaire général des Nations unies Kofi Annan et qui fait de la diplomatie » a-t-il déclaré jeudi soir.

Emmanuel Macron a toutefois nié les accusations d'espionnage formulées à son encontre par les autorités russes, dénonçant une campagne d'« intoxication » de Moscou en parallèle à la guerre en Ukraine. Le président a aussi affirmé que le Français arrêté « recevra toutes les protections consulaires » prévues dans ce cas-là.

Une montée des tensions

Cette arrestation intervient en pleines tensions politico-militaires entre Paris et Moscou. Après la récente annonce de l'Elysée sur un possible envoi de conseillers militaires français au Donbass, le Kremlin a prévenu qu'ils seront ciblés et éliminés. Les tensions vont aussi croissant entre la Russie et la Suisse, à la veille de la tenue d'une « conférence pour la paix » le 15 juin à Bürgenstock, où Moscou a décidé de n'envoyer aucune délégation.

Moscou enchaîne les provocations. Le 1er juin, les Parisiens ont découvert, au pied de la Tour Eiffel, des cercueils recouverts d'un drapeau français portant l'inscription « soldats français de l'Ukraine ». Puis, le 3 juin, la direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI) a arrêté un Russo-Ukrainien, à Roissy-en-France (Val-d'Oise), soupçonné d'avoir voulu mener une action violente.