En Russie, Vladimir Poutine menace de livrer des armes à des pays tiers pour frapper les intérêts occidentaux

Le président russe a menacé ce mercredi de livrer des armes à des pays tiers susceptibles de frapper les intérêts occidentaux, si l'Occident autorise l'Ukraine à frapper la Russie avec ses missiles de longue portée. Un droit que demande Kiev de longue date à ses alliés et que certains lui ont accordé, sous conditions, comme l'Allemagne et les États-Unis, quand d'autres, à l'instar de l'Italie, y sont opposés.
Vladimir Poutine a tenu une interview avec une quinzaine d'agences de presse, où il est apparu souriant mais aussi parfois agacé.
Vladimir Poutine a tenu une interview avec une quinzaine d'agences de presse, où il est apparu souriant mais aussi parfois agacé. (Crédits : Valentina Pevtsova)

Une fois n'est pas coutume, le président russe joue la carte des menaces. Alors que les pays occidentaux sont de plus en plus favorables à autoriser l'Ukraine à utiliser leurs armes pour frapper le territoire russe, sous conditions, Vladimir Poutine s'est dit prêt à répliquer. Et cela prendrait la forme de livraisons d'armes à des pays tiers susceptibles de frapper les intérêts occidentaux. Ainsi, si des missiles de longue portée nécessitant l'assistance de militaires occidentaux étaient tirés à l'avenir contre des cibles en Russie, Moscou riposterait avec ces livraisons.

« Si quelqu'un considère possible de fournir de telles armes dans la zone de combats pour frapper notre territoire (...), pourquoi n'aurions-nous pas le droit de fournir nos armes du même type dans des régions du monde où seront frappées les installations sensibles des pays qui agissent ainsi contre la Russie ? », a lancé ce mercredi Vladimir Poutine, lors d'une interview avec une quinzaine d'agences de presse, dont l'AFP, en marge du Forum économique de Saint-Pétersbourg.

L'Ukraine demande depuis des mois à ses alliés d'accorder à son armée une plus grande liberté pour frapper, avec leurs équipements, des cibles militaires à l'intérieur de la Russie russe et non seulement sur des zones ukrainiennes occupées. Une autorisation qui lui a déjà été accordée la semaine dernière par l'Allemagne et les États-Unis, mais seulement dans le cadre des efforts déployés par les soldats ukrainiens pour repousser les attaques contre sa région de Kharkiv. « Nous continuerons à travailler avec nos alliés sur l'élargissement de son champ d'application », a indiqué en début de semaine le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, assurant ne pas attendre « une autorisation à 100% » et reconnaissant qu' « il y a des règles à respecter ».

Ce sujet divise en tout cas les alliés de Kiev, plusieurs étant réticents à permettre à l'Ukraine de bombarder au-delà de la frontière, de peur que cela ne les rapproche d'un conflit direct avec Moscou. Certains pays de l'Otan, comme l'Italie, restent ainsi opposés à l'utilisation de leurs armes en territoire russe, notamment des missiles longue portée de haute précision.

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Désinformation sur la présence de militaires occidentaux

Lors de cette discussion d'environ trois heures, pour laquelle il est arrivé avec un retard de plusieurs heures sur l'horaire annoncé, Vladimir Poutine s'est aussi exprimé au sujet des supposés instructeurs militaires occidentaux présents en Ukraine. Pour rappel, la France a récemment annoncé réfléchir à en envoyer pour accélérer la formation des soldats ukrainiens. Mais d'autres pays, dont les États-Unis, ont écarté cette éventualité. Aucun État n'a en tout cas fait état de la présence de ses militaires en Ukraine.

Mais pour le président russe, ils sont bel et bien là. Il a ainsi réaffirmé que des instructeurs militaires occidentaux « se trouvent déjà en Ukraine, et y subissent des pertes ». Pertes sur lesquels « les États-Unis et les États européens préfèrent garder le silence », selon lui. La semaine dernière, il avait déjà assuré la même chose, disant que ces instructeurs étaient présents « sous l'apparence de mercenaires ». Ce mardi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a d'ailleurs indiqué qu' « ils représentent une cible tout à fait légitime pour nos forces armées ».

Poutine prêt à s'asseoir à la table des négociations

Vladimir Poutine a par ailleurs réitéré ses arguments selon lesquels la Russie était disposée à s'asseoir à la table des négociations. Et que le meilleur moyen d'arrêter la guerre était que les Occidentaux « cessent de livrer des armes » à l'Ukraine.

« Fournir des armes à une zone de conflit est toujours une mauvaise chose. Surtout quand les fournisseurs ne se contentent pas de fournir des armes, mais qu'ils les contrôlent. C'est une mesure très grave et très dangereuse », a-t-il encore déclaré, refusant de voir son offensive de février de 2022 comme le facteur central du conflit.

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Le président russe a refusé de chiffrer les pertes subies par l'armée russe après deux ans et demi de conflit, assurant qu'elles étaient « très inférieures » aux pertes ukrainiennes. « Si l'on parle de pertes irréparables (ndlr : de morts), alors le rapport est de un à cinq » avec les pertes subies côté ukrainien, a-t-il affirmé. Il a assuré que ce rapport était semblable à la différence entre le nombre de prisonniers de chaque camp. Selon lui, la Russie détient actuellement 6.465 soldats ukrainiens, contre 1.348 soldats russes prisonniers en Ukraine.

Depuis le début de l'assaut contre l'Ukraine, en février 2022, de nombreux experts occidentaux parlent de plusieurs dizaines de milliers de soldats russes tués. La BBC et le média russe indépendant Mediazona affirment avoir vérifié la mort d'au moins 50.000 militaires russes.

La Russie se défend « d'ambitions impériales »

Apparaissant souvent souriant pour cet entretien organisé à la veille des festivités marquant le 80e anniversaire du débarquement allié en Normandie, auxquelles la Russie n'a pas été invitée, Vladimir Poutine s'est aussi parfois montré agacé. Comme lorsqu'il a martelé que la Russie n'avait « pas d'ambitions impériales » et ne prévoyait pas d'attaquer l'Otan, en réponse à une question de l'AFP sur la présence des drapeaux de la Russie contemporaine, de la Russie impériale et de l'URSS devant le siège de Gazprom, l'entreprise publique russe d'énergie, où la rencontre avec les journalistes avait lieu. « Ne cherchez pas ce qui n'existe pas (...) ne cherchez pas nos ambitions impériales. Elles n'existent pas », a-t-il déclaré.

« On invente comme quoi la Russie veut attaquer l'Otan (...) Qui a inventé cette absurdité ? Des conneries », s'est emporté Vladimir Poutine.

Reste que la Russie a nié durant des mois préparer une offensive militaire contre l'Ukraine, avant de lancer son assaut le 24 février 2022. Et si le Kremlin dément vouloir recréer son empire perdu, Moscou a déjà annexé cinq régions ukrainiennes, nombre de responsables russes, Vladimir Poutine compris, pointant le fait que celles-ci appartenaient aux empires russes et soviétiques.

(Avec AFP)

Commentaires 20
à écrit le 07/06/2024 à 23:35
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@Alain d. Voici un cadeau pour vous[https://disclose.ngo/fr/article/ukraine-france-a-livre-armes-russie] 🙈🙉🙊

le 08/06/2024 à 10:25
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@Raymond Relations France-Russie dans le militaire, je connais tout ça en bien plus détaillé, STM, Safran, Thales, Airbus, Sodern, etc. Article qui oublie donc le spatial, satellites et lanceurs. Les coopérations dans les moteurs d'hélicoptères. E...

le 08/06/2024 à 11:56
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C'est quoi le fond? Vous souhaitez la mort de Thales, Safran, Airbus, Nexter, Naval Group, Arquus ? Les exportations militaires françaises servent nos armées et Picsou Bercy. Si ce n'est pas non entreprises qui vendent, ce seront les américaines ,...

le 08/06/2024 à 16:30
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@Alain d. C'est marrant comme vos valeurs sont à géométrie variable. Lorsque la France sera parvenue au paroxysme de l'escalade avec des coûts financiers et humains comme autant de conséquences, on verra les mêmes que vous venir se lamenter devant le...

à écrit le 07/06/2024 à 9:26
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Et comme on va faire don de plusieurs mirages 2000 à l'Ukraine, on peut se réjouir de mettre de l'huile sur le feu. Tout comme la France a cette fâcheuse tendance à oublier les millions d'euros qu'elle a perçu de la Russie - post 2014/révolution de M...

le 07/06/2024 à 12:49
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Poutine est le seul pyromane. Une cause > des effets, des conséquences !

le 07/06/2024 à 19:33
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@Alain d. Pourtant, sans l'intervention des "belles promesses économiques" de l'UE en Ukraine - dont la présidence de l'époque visait pourtant un rapprochement avec le Kremlin en privilégiant plutôt la zone économique Eurasiatique - il n'y aurait pas...

le 09/06/2024 à 2:14
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@Raymond: Tout faux ou juste une certaine partie de la vérité. Et au niveau des racines de la révolution de Maidan, ce n'est qu'une partie. L'annexion de la Crimée n'était pas une option obligatoire de la part de la Russie et la guerre de Donbass, sa...

le 09/06/2024 à 9:02
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@Ex-moscovite. C'est une guerre pour savoir qui retirera le mieux ses marrons du feu. Il vous fallait donc, comme dissident russe, venir en Occident au début des années 2000. Nous sommes plongés depuis 2008 au sein d'un changement de paradigme mondia...

à écrit le 06/06/2024 à 15:19
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Refusait-il avant, de vendre des armes à qui en demande, dont les 'ennemis' de l'occident, entre autres ? Peut-être, par pudeur ou éviter la prolifération (même si ça doit être complexe, la rétro-ingénierie), voire garder le meilleur pour soi. Là ce...

à écrit le 06/06/2024 à 13:38
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Mais la Russie est déjà le plus gros livreur d'armes auprès des dictatures, juntes et milices, qui supportent pas les démocraties, affirmées ou naissantes, occidentales ou pas. Elle arme la junte birmane comme la malienne, le Hezbollah, el-Assad, l'a...

le 06/06/2024 à 14:53
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Dans le monde civil, hors les céréales, des centrales nucléaire et des énergies fossiles, la Russie n'a pas de biens finis à vendre qui peuvent faire rêver les particuliers, entreprises ou compagnies d'Afrique : pas d'avions, ni voitures, ni trains, ...

à écrit le 06/06/2024 à 12:45
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Ha bon ? C'est pas déjà le cas? Et si on continue avec nos armes il va sévir? En envahissant l'Ukraine, par exemple?

à écrit le 06/06/2024 à 12:35
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Prendre des avertissements pour des menaces est le rôle du médiatque pour nous soumettre !

à écrit le 06/06/2024 à 12:05
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A). Le Kremlin veut livrer quoi? Ils sont déjà en manque d'armes et de munitions. Et à qui? Le nombre de candidats avec une menace réelle de frapper n'est pas si énorme. Les Houthis ont tout ce qu'il leur faut de l'Iran. Les organisations pro-Iran au...

à écrit le 06/06/2024 à 11:09
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vu qu ele hamas par ex a deja des armes russes je vois pas ce que ca va changer. de toute facon les russes doivent mettre toutes leur production au front, il vont pas en distraire un nombre signficatif pour fournir le hezbollah par ex

à écrit le 06/06/2024 à 10:21
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Frapper les intérêts des européens donc vu qu'on voit bien l'Iran ne pas chercher à contrarier les américains en ce moment. D'ailleurs qui peut frapper les américains ? A part un fou... L eproblème est qu'il faut dire à Poutine que les oligarques eur...

le 06/06/2024 à 11:00
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🧐Arrêtons surtout de livrer des armes ! Ça arrêtera la guerre ! Et ça plombera pas les déficits que nous laisserons à nos enfants ! Si Macron les oblige pas de force à s’enrôler L Ukraine était russe elle restera en partie russe et après ! 🤷‍♂️

le 06/06/2024 à 11:05
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Je me souviens d'un interview de Balladur qui disait je ne sais plus pour quelle occassion, que d'un coup les gens se osnt mis à bruler des voitures mais comme c'étaient les voitures les pauvres cela n'a pas dérangé les dirigeants." Par contre à un m...

le 06/06/2024 à 17:05
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@reponse de l'héritier- Il ne faut rien arrêter et continuer à pousser tant que la Russie se verra comme un empire. L'objectif est le démantèlement de la Russie de Poutine, ça peut demander du temps, mais aussi être très rapide.

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