Royaume-Uni : ce qu'il faut retenir des résultats des législatives

La gauche remporte une très large majorité au Parlement britannique, avec un total estimé à 410 sièges sur 650 à la Chambre des Communes. Une victoire qui met fin à quatorze années de règne conservateur. Keir Starmer, le chef du parti, entre au 10, Downing Street, remplaçant Rishi Sunak au poste de Premier ministre.
Dans un discours prononcé tôt dans la matinée, le Premier ministre Rishi Sunak, arrivé au pouvoir il y a moins de deux ans, a endossé la responsabilité de la défaite.
Dans un discours prononcé tôt dans la matinée, le Premier ministre Rishi Sunak, arrivé au pouvoir il y a moins de deux ans, a endossé la responsabilité de la défaite. (Crédits : Reuters)

Les sondages ne s'étaient pas trompés. Les travaillistes ont très largement battu les conservateurs lors des élections qui ont eu lieu jeudi au Royaume-Uni. La victoire de la gauche britannique s'est dessinée dès la clôture des bureaux de vote, à 22 heures, heure locale, avant de se confirmer progressivement durant la nuit à mesure que les résultats sont tombés.

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Les estimations actuelles portent la majorité travailliste à 410 sièges sur les 650 que compte la Chambre des Communes. Si c'est un peu moins que ce que prévoyait un récent sondage Ipsos, attribuant 453 sièges au parti, et que le raz-de-marée réalisé par Tony Blair en 1997 (418 sièges), la victoire demeure écrasante et constitue un désaveu cinglant pour les conservateurs et leur leader, le Premier ministre Rishi Sunak.

Effondrement des conservateurs, percée modeste de Reform UK

Avec seulement 127 sièges remportés, selon les estimations actuelles, loin des 365 obtenus lors des dernières élections de 2019, qui avaient porté Boris Johnson au pouvoir, la droite britannique réalise l'une de ses pires performances historiques. Dans un discours prononcé tôt dans la matinée, le Premier ministre Rishi Sunak, arrivé au pouvoir il y a moins de deux ans, a endossé la responsabilité de la défaite.

Il a annoncé qu'il avait appelé Keir Starmer, son homologue du parti travailliste, afin de le féliciter pour sa victoire. Maigre consolation pour le Premier ministre conservateur : il gardera finalement son siège de parlementaire à Richmond, dans le nord du pays, alors que certains sondages avaient prévu sa défaite dans son fief historique.

La droite britannique, paie notamment la facture du Brexit, désormais désavoué par la majorité des Britanniques. Mais aussi d'une succession de scandales au cours des dernières années, dont le « Partygate », des soirées organisées illégalement par Boris Johnson et son entourage durant la pandémie, ou encore une récente affaire impliquant des paris truqués de la part de plusieurs candidats conservateurs sur la date de scrutin des législatives.

Les électeurs ont aussi jugé sévèrement la capacité de la droite britannique à entretenir les services et infrastructures publics, en particulier le NHS (National Health Service), le système de santé public britannique. Ce dernier accumule les dysfonctionnements après des années de coupes budgétaires décidées par les conservateurs. Un récent sondage de l'institut Ipsos avait ainsi placé l'état du NHS en tête des préoccupations des électeurs, suivi du coût de la vie et de l'économie en général.

Une légère embellie économique accompagnée d'une baisse de l'inflation avait motivé Rishi Sunak à annoncer des élections dès le mois de juillet, alors que la plupart des commentateurs s'attendaient à ce qu'il attende la fin de l'année pour maximiser les chances de son parti. Un pari qui ne se sera finalement pas avéré payant.

L'élection est également marquée par une percée modeste de Reform UK, un nouveau parti anti-immigration récemment lancé par Nigel Farage, l'une des figures de proue du Brexit. Si les premières estimations tombées durant la nuit leur attribuaient 13 sièges, un nombre largement supérieur à celui annoncé par les sondages, il a finalement été ramené à 4.

Si le chiffre est modeste, le mode de scrutin uninominal à un tour en place au Royaume-Uni rend difficile le gain d'un grand nombre de sièges pour les petits partis. L'élection de Nigel Farage va, en outre, permettre à celui-ci de continuer à faire entendre sa voix et d'espérer peser sur l'échiquier politique britannique, alors que la droite traditionnelle sort fortement affaiblie du scrutin.

Avec 69 sièges actuellement estimés, les libéraux-démocrates, un parti centriste, renforcent également leur présence au Parlement, où ils ne comptaient jusqu'ici que 11 sièges. L'élection est aussi marquée par un spectaculaire effondrement du parti indépendantiste écossais, au pouvoir depuis 2019 : il ne remporterait que 10 sièges sur les 59 disponibles en Écosse, contre 48 en 2019. Le parti fait lui aussi les frais d'une actualité émaillée par les scandales.

Le positionnement centriste et rassembleur de Keir Starmer validé

Le verdict apparaît aussi comme une consécration pour Keir Starmer, le leader des travaillistes, un ancien avocat spécialiste des droits humains, âge de 61 ans. Son pari de mener une campagne modérée, afin de séduire les électeurs centristes lassés des conservateurs, s'il a pu lui attirer des critiques au sein de son propre camp, semble avoir porté ses fruits.

Contrairement à son prédécesseur, Jeremy Corbyn, qui avait positionné le Labour résolument à gauche, la ligne adoptée par Keir Starmer est plus centriste, et s'efforce d'afficher une image de sérieux budgétaire. Une stratégie autant dictée par le pragmatisme électoral que par la catastrophe Liz Truss, l'éphémère Premier ministre conservatrice - dont le gouvernement est tombé en moins de deux mois après l'annonce d'un budget riche en emprunts et baisses d'impôts, qui avait immédiatement été attaqué par les marchés financiers. Elle avait été remplacée en catastrophe par Rishi Sunak.

Dans un discours victorieux prononcé ce matin, le leader travailliste, portant son habituelle cravate rouge, a promis de « remettre la Grande-Bretagne au service des travailleurs. » Durant la campagne, Keir Starmer a mis en valeur ses origines modestes (père ouvrier et mère infirmière), en contraste avec un Rishi Sunak multimillionnaire, dont le parcours scolaire s'est fait au sein de prestigieux établissements privés, puis à l'université d'Oxford.

Son programme prévoit notamment de réduire rapidement les listes d'attente du NHS à l'aide d'un renflouement budgétaire, de créer une entreprise publique de l'énergie pour investir dans le renouvelable, et d'accélérer la construction de logements pour remédier à la flambée des prix qui affecte fortement le budget des ménages et entraîne une hausse du nombre de sans-abris.

Il a également promis de réduire l'immigration illégale en luttant contre les passeurs qui aident les clandestins à franchir la Manche à bord d'embarcations de fortune, une autre préoccupation importante pour les électeurs, selon le sondage Ipsos. Un rapprochement avec l'Union européenne fait également partie de ses promesses de campagne, sans toutefois qu'un retour sur le Brexit soit à l'ordre du jour.

Commentaire 1
à écrit le 05/07/2024 à 8:44
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Sans le brexit l'extrême droite aurait eu 10 fois plus de sièges. C'est bon ça vous pouvez valider ou vous allez perdre l'argent de l'UERSS ? La vache... -_-

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