Présidentielle américaine : le choix incontournable de Kamala Harris

RÉCIT. La vice-Présidente est en pole position pour être la nouvelle candidate qui affrontera Trump en novembre suite au désistement, dimanche, de Joe Biden qui l'a d'ailleurs immédiatement adoubée dans ce rôle.
Garance Le Caisne
Depuis son élection à la vice-présidence en 2020, Kamala Harris, 59 ans, a toujours montré une loyauté sans faille au président, Joe Biden.
Depuis son élection à la vice-présidence en 2020, Kamala Harris, 59 ans, a toujours montré une loyauté sans faille au président, Joe Biden. (Crédits : Brendan McDermid)

Après « Joe le tordu » ou « Joe l'endormi », voilà maintenant « Kamala l'hypocrite » et
« la copilote qui caquette ». S'il fallait mesurer l'importance que Donald Trump accorde à ses adversaires politiques aux surnoms dont il les affuble, le candidat républicain semble donc prendre au sérieux l'éventualité de la candidature de Kamala Harris pour remplacer Joe Biden.

Depuis la prestation désastreuse du président sortant lors du débat télévisé contre Trump le 27 juin, ses énièmes gaffes et les appels chaque jour plus nombreux de sénateurs et de députés démocrates pour lui suggérer de quitter la scène, sa colistière devient presque incontournable. « Kamala Harris est la candidate légitime pour le remplacer, affirme depuis New York Romuald Sciora, directeur de l'observatoire politique et géostratégique des États-Unis à l'Iris. Elle a gagné avec lui presque l'ensemble des primaires, elle est numéro 2 sur le ticket démocrate. C'est elle qui devrait naturellement être intronisée à la Convention des démocrates ».

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Kamala Harris n'a d'ailleurs pas attendu pour faire acte de candidature. « Je ferai tout ce
qui est mon pouvoir pour unifier le parti démocrate -et unir notre nation- pour battre Donald Trump », a-t-elle déclaré hier soir dans un communiqué. Elle a aussi salué « l'acte désintéressé et patriotique » que constituait le forfait du Président.

Dans un ballet qui semble avoir été réglé par avance, Biden a de son côté immédiatement adoubé sa vice-présidente. D'autres poids lourds du parti ont embrayé, comme le couple Clinton ou le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, qui était pourtant vu comme un possible rival. En revanche, Barack Obama s'est montré beaucoup plus prudent, s'abstenant de tout message de soutien à l'endroit de l'ancienne procureure. Les instances du parti démocrate se réuniront mercredi pour définir les règles de nomination du futur candidat.

Habituée à briser les plafonds de verre

Depuis son élection à la vice-présidence en 2020, Kamala Harris, 59 ans, a toujours montré une loyauté sans faille au président. Ces dernières semaines plus que d'habitude, excusant les lapsus du candidat, expliquant ses postures, défendant son programme. « Nous croyons en notre président, Joe Biden, et nous croyons en ce qu'il représente », a-t-elle déclaré juste après le débat télévisé. Une fidélité qui ferait presque oublier ces années où l'élue a attiré les critiques, peinant à convaincre son propre camp. Et une fidélité qui pourrait rapporter gros maintenant que Biden a lâché l'affaire.

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Considérée il y a quelques années comme une étoile montante du parti, Kamala Harris a l'habitude de briser les plafonds de verre : première femme noire à endosser les habits de procureure générale de Californie en 2011, première femme originaire d'Asie du Sud à siéger au Sénat en 2017. Puis, en 2020, première femme de couleur à s'installer au 1, Observatory Circle, la résidence des vice-présidents installée sur les terres de l'Observatoire naval à Washington, non loin de la Maison-Blanche.

Née en Californie, d'un père jamaïcain, économiste et professeur à l'université de Stanford, et d'une mère indienne, biologiste et oncologue, la jeune Kamala a toujours mis en avant une conscience d'une identité noire. Des premières années de sa vie, alors que le pays plonge dans la lutte pour les droits civiques, à ses études supérieures à la prestigieuse université Howard, surnommée la « Harvard noire », Kamala Harris baigne dans une communauté noire privilégiée. Sûre d'elle-même et de ses origines, la future procureure sera d'ailleurs qualifiée d'« Obama au féminin ». Un piège ? Son arrivée à la vice-présidence suscite de très fortes attentes.

Il est d'autant plus délicat pour elle d'y répondre que sa place sur le ticket Biden est le résultat d'une intense activité de lobbying au moment de la campagne de 2020. Joe Biden dut se résoudre à accepter cette colistière de vingt ans sa cadette, qui n'hésite pas à porter des chaussures de baskets et laisser éclater sa joie dans des rires communicatifs. Biden sait qu'elle pourrait donner un coup de peps à sa candidature, mais il ne l'aime pas. L'homme n'a en fait jamais digéré les attaques de Kamala Harris lors des primaires pour la campagne de 2020, quand elle n'était que candidate à l'investiture.

« Elle avait été très dure envers Biden, rappelle Romuald Sciora. Elle avait attaqué son fils Hunter à propos d'un trafic d'influence en Ukraine. Elle avait violemment critiqué Barack Obama, dont Biden était le vice-président, pour ne pas avoir tenu sa promesse de frapper la Syrie si elle franchissait la ligne rouge en utilisant des armes chimiques ». Ce qu'avait fait Damas contre sa population en août 2013. « Toutes ces attaques ont laissé des traces », ajoute le spécialiste des États-Unis.

« Jamais un vice-président n'a été autant marginalisé »

Le duo Biden-Harris manquera d'ailleurs de complicité. Très vite, Harris va décevoir. Les médias américains pointent du doigt « l'invisibilité » de Kamala Harris, « l'incroyable disparition de la vice-présidente », un « mandat décevant »... Et ce n'est pas Joe Biden qui lui aura facilité la tâche. « Jamais un vice-président n'a été autant marginalisé, affirme Romuald Sciora. Elle n'a pratiquement jamais été envoyée sur la scène internationale comme l'avait été Biden du temps de Barack Obama, par exemple. Il ne faut pas oublier que les États-Unis sont un pays de cow-boys ».

« Il y a de la mauvaise foi et un manque de réflexion dans les critiques à l'encontre de Kamala Harris, ajoute le spécialiste des Etats-Unis. Sa marginalisation a donné l'impression qu'elle était incompétente, c'est faux. Elle a géré des dossiers importants ».

Celui du Covid, de la lutte contre le réchauffement climatique, la question de l'immigration à la frontière avec le Mexique, qui lui a d'ailleurs valu le surnom de « tsar des frontières » par le camp républicain. Mais c'est sur la question des droits reproductifs qu'elle a le mieux montré sa calme détermination.

Son image pose en tout cas un réel défi, et une urgence, dans la campagne démocrate. Les 3.900 délégués du parti doivent officiellement désigner leur candidat lors de la convention démocrate qui se tiendra du 19 au 22 août à Chicago. Mais ce nom doit d'abord être validé lors d'une réunion virtuelle des délégués début août. Soit dans dix jours.

En plus de sa loyauté et sa jeunesse, l'ancienne sénatrice a un autre atout, majeur, essentiel, pour être désignée. En tant que colistière de Biden, elle possède les clés du trésor de campagne, plusieurs dizaines de millions de dollars déjà dans les caisses et d'autres sous forme de promesses. D'ailleurs, alors que les dons s'asséchaient depuis le calamiteux débat de la fin juin, ils sont remontés en flèche hier, après l'annonce du retrait de Biden. ActBlue, le groupe qui s'occupe de la levée de fonds pour le parti, a annoncé avoir enregistré sa plus grande collecte de fonds en une seule journée. Elle s'est élevée à 46,7 millions de dollars.

Garance Le Caisne
Commentaires 3
à écrit le 22/07/2024 à 20:10
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Bonjour . Bon avoir un soutien important est impérative dans la course a la maison blanche.. Mais ils faut etre capable de tenir un discours politique , economique et de géopolitique cohérent... Etre capable de tenir tete a Mr Trump et surtout donné...

à écrit le 22/07/2024 à 16:02
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Les outrances de Trump risquent de moins bien passer qu'avec Jo Biden. Difficile de taper sur une femme surtout quand on a eu des problèmes avec la Justice pour le paiement d'une prostituée, pour des propos sexistes et dans un environnement "me too L...

le 23/07/2024 à 16:46
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"Difficile de taper sur une femme" De toute évidence pour Saint-Donald il ne sera pas difficile de mettre en évidence l'absence de programme de Harris sinon le génocide des américains par la promotion du meutre de la jeunesse in vivo via l'avor...

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