La Cour suprême américaine étend l'immunité de Trump, son procès fédéral est repoussé

Par latribune.fr  |   |  956  mots
Par cette jurisprudence, Donald Trump sera « enhardi à faire ce qu'il veut, quand il veut » en cas de victoire à la présidentielle de novembre, a estimé son adversaire démocrate, Joe Biden. (Crédits : Brendan McDermid)
La Cour suprême américaine à majorité conservatrice a étendu lundi l'immunité pénale du président, une victoire pour Donald Trump dont le procès fédéral est une nouvelle fois retardé, tandis que son adversaire Joe Biden a dénoncé un « dangereux précédent ».

Donald Trump, l'ex-président américain et candidat aux élections présidentielles de novembre, peut être soulagé. La Cour suprême américaine à majorité conservatrice a en effet étendu lundi son immunité pénale présidentielle, retardant ainsi une nouvelle fois son procès fédéral pour son rôle lors de la prise d'assaut du Capitole le 6 janvier 2021. Le candidat américain s'est félicité d'une « décision historique », assurant qu'elle invalidait l'essentiel des charges dans les quatre procédures pénales contre lui.

En décidant le 28 février de se saisir de cette question, puis en fixant les débats près de trois mois plus tard, la plus haute juridiction des Etats-Unis avait déjà considérablement différé le procès fédéral de l'ex-président républicain pour tentative d'inverser illégalement les résultats de l'élection de 2020 remportée par Joe Biden.

Par une majorité de six voix contre trois - les juges conservateurs contre les progressistes - la Cour considère que « le président ne jouit d'aucune immunité pour ses actes non officiels » mais qu'il « a droit au moins à une présomption d'immunité pour ses actes officiels ». Au nom de la majorité, le président de la Cour, John Roberts, motive cette décision par des « principes constants de séparation des pouvoirs ».

La Cour renvoie donc le dossier au tribunal de première instance pour déterminer quels actes sont potentiellement immunisés de poursuites pénales. A charge pour l'accusation de démontrer qu'ils ne le sont pas lorsqu'ils ont été accomplis dans l'exercice de ses fonctions. L'ancien conseiller de Donald Trump Steve Bannon s'est rendu quant à lui lundi dans une prison fédérale du nord-est des Etats-Unis afin de commencer à purger sa peine pour entrave à l'enquête parlementaire sur l'assaut du Capitole.

Joe Biden dénonce une décision qui crée un « dangereux précédent »

Lors d'une allocution télévisée, le président Joe Biden a lui dénoncé une décision qui crée un « dangereux précédent », car les pouvoirs de président « ne seront plus limités par la loi ». Par cette jurisprudence, Donald Trump sera « enhardi à faire ce qu'il veut, quand il veut » en cas de victoire à la présidentielle de novembre, a estimé son adversaire démocrate.

Au-delà du cas de Donald Trump, cette décision « redéfinit l'institution de la présidence » en transformant son titulaire en « roi au-dessus des lois dans chaque usage de son pouvoir officiel », écrit la juge Sonia Sotomayor, dans son avis de désaccord auquel se joignent ses deux collègues progressistes.

« Quand le président le fait, ça veut dire que ce n'est pas illégal », ironise sur X John Dean, conseiller juridique de la Maison Blanche au moment du scandale du Watergate en 1974, citant la ligne de défense du président de l'époque Richard Nixon. Selon Steven Schwinn, professeur de droit constitutionnel à l'Université de l'Illinois à Chicago, « dans la mesure où Donald Trump essayait de faire traîner le dossier jusqu'à après l'élection, il a totalement réussi ».

Lire aussi« Le pire scénario pour Trump est que Biden décide de se retirer » (Romuald Sciora, directeur de l'Observatoire politique et géostratégique des États-Unis à l'IRIS)

Visé par quatre procédures pénales, Donald Trump fait feu de tout bois pour passer en jugement le plus tard possible, en tout cas après le scrutin présidentiel. Reconnu coupable le 30 mai par la justice de New York de « falsification comptable aggravée pour dissimuler un complot visant à pervertir l'élection de 2016, » il connaîtra le 11 juillet sa peine. Mais selon plusieurs médias américains, les avocats de Donald Trump ont envoyé lundi une lettre au juge dans cette affaire, pour revenir sur la condamnation et repousser le prononcé de la peine à la lumière de la décision de la Cour suprême.

Faute de véritable procès avant le vote, « il pourrait y avoir des audiences détaillées sur les faits incriminés dans l'acte d'accusation pour déterminer sur lesquels joue l'immunité, ce qui permettra de rappeler à la population tous les actes de Trump et les événements du 6 janvier 2021 », souligne néanmoins l'ex-procureur fédéral et professeur de droit pénal Randall Eliason.

Un sénateur démocrate réclame à Joe Biden des gages sur sa santé

Un sénateur démocrate, Sheldon Whitehouse, a jugé lundi que les Américains voulaient être « sûrs » que Joe Biden était « honnête sur son état » dans un entretien diffusé lundi par une chaîne de télévision locale. Cet élu de l'Etat de Rhode Island (représentant de l'aile gauche du Parti démocrate), se dit « passablement horrifié » par la confrontation sur CNN, lors de laquelle le président américain est apparu très confus, et par moments complètement perdu. Le lendemain, le démocrate de 81 ans, qui avait retrouvé une certaine énergie, avait cherché à rassurer lors d'un meeting de campagne en Caroline du Nord (sud-est) : « Je ne me représenterais pas si je ne croyais pas, de tout mon cœur et de toute mon âme, que je peux faire ce boulot ».

Si jusqu'ici les poids lourds du parti lui affirment publiquement leur soutien, depuis le débat de jeudi dernier la nervosité monte chez des sympathisants et donateurs, dont certains reprochent au cercle rapproché du président un manque de transparence sur ses facultés. D'autres demandent à Joe Biden de répondre concrètement aux inquiétudes, en multipliant les conférences de presse ou les échanges sans filet avec des journalistes ou des partisans.

(Avec AFP)