Etats-Unis : malgré une inflation stable, la Fed n'est pas encore prête à baisser ses taux

L'inflation est restée stable en avril aux Etats-Unis, à 0,3% sur un mois et 2,7% sur un an, comme attendu, selon l'indice PCE, privilégié par la banque centrale américaine (Fed), publié vendredi par le département du Commerce. Mais il en faudra sans doute plus pour convaincre l'institution monétaire de baisser ses taux.
L'inflation est restée stable en avril aux Etats-Unis. (photo d'illustration)
L'inflation est restée stable en avril aux Etats-Unis. (photo d'illustration) (Crédits : ANDREW KELLY)

Est-ce suffisant pour que la Fed commence à baisser ses taux ? L'inflation est restée stable en avril aux Etats-Unis, un soulagement après le rebond du début de l'année, les prix élevés étant une des principales préoccupations des Américains, en pleine campagne électorale.

Dans le détail, la hausse des prix à la consommation est ressortie à 0,3% sur un mois et 2,7% sur un an, comme attendu, selon l'indice PCE, publié vendredi par le département du Commerce. C'est cette mesure que privilégie la banque centrale américaine (Fed), et qu'elle espère ramener à 2% en 2026. L'inflation dite sous-jacente, qui exclut les prix volatils de l'alimentation et de l'énergie, est elle aussi stable sur un an, à 2,8%, mais ralentit sur un mois, à 0,2%.

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Croissance en berne

Le lent dégonflement de l'inflation est très attendu par les Américains, qui ont vu leur pouvoir d'achat considérablement réduit. Donald Trump, qui espère revenir à la Maison Blanche, en profite même pour accuser le président Joe Biden d'être responsable de cette forte inflation.

Les dépenses des ménages américains ont ainsi fortement ralenti en avril, augmentant de 0,2% par rapport à mars - qui avait enregistré une hausse des dépenses de 0,7% par rapport à février, a également annoncé le département du Commerce. La croissance de leurs revenus est également moins forte, à +0,3% en avril contre +0,5% en mars.

« Les premières données sur les dépenses pointent vers un nouveau ralentissement de la consommation au deuxième trimestre », a souligné Rubeela Farooqi, cheffe économiste pour High Frequency Economics.

Sauf que la consommation reste le moteur de croissance de la première économie du monde, représentant plus des deux-tiers du PIB. Mais les Américains ont dans l'ensemble réduit leurs dépenses au cours des trois premiers mois de l'année. Excepté pour certaines catégories inévitables : les soins de santé, les services financiers, les assurances. L'économie américaine avait déjà ralenti début 2024, avec une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 1,3% en rythme annualisé, contre 3,4% au 4e trimestre 2023.

La croissance du PIB a donc déçu au premier trimestre 2024, atteignant son plus bas niveau depuis près de deux ans, après une année 2023 qui avait surpassé toutes les espérances, et déjoué les pronostics de récession. Elle avait même accéléré, à 2,5%, contre 1,9% en 2022.

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A quand une baisse des taux aux Etats-Unis ?

D'autant que pour contrer la hausse des prix, la banque centrale américaine (Fed), qui est en première ligne, maintient des taux très élevés depuis l'été dernier. Une double peine pour des consommateurs américains très dépendants au crédit, y compris pour des achats de moindre valeur.

Mais malgré la stabilisation de l'inflation, il en faudra toutefois plus pour convaincre la Fed de commencer à baisser ses taux : « Le contexte inflationniste suggère que les responsables (de la Fed) se montreront patients », a commenté Rubeela Farooqi. Selon elle, cependant, ils « seront prêts à réagir si le marché du travail s'affaiblit plus que prévu, ce qui pèserait sur la demande et la trajectoire de croissance ».

Quant à l'autre principale mesure de l'inflation, l'indice CPI - sur lequel sont indexées les retraites -, publié plus tôt dans le mois, elle a repris sa trajectoire à la baisse en avril, à 3,4% sur un an contre 3,5% en mars. Plutôt une bonne nouvelle.

La prochaine réunion de la Fed aura lieu les 11 et 12 juin, mais aucun miracle n'est attendu. Les responsables de la banque centrale américaine s'étaient, lors de leur dernière réunion les 30 avril et 1er mai, inquiétés du rebond et de la trajectoire de l'inflation. Ils avaient maintenu les taux inchangés, au plus haut depuis plus de vingt ans, entre 5,25% et 5,50%. Et avaient souligné que le moment de commencer à les abaisser arriverait plus tard que prévu, certains membres étant même prêts à les relever de nouveau si nécessaire.

Le président de la Fed de New York, John Williams, a par exemple indiqué jeudi ne ressentir « aucune urgence » à commencer à abaisser les taux, compte-tenu de la bonne santé de l'économie aux Etats-Unis, et du niveau toujours élevé de l'inflation.

« Je ne ressens aucune urgence ni besoin de me presser pour prendre une décision maintenant », a-t-il, devant l'Economic Club de New York, estimant « que les choses vont dans la bonne direction ». Il a par ailleurs indiqué que la politique monétaire actuelle, avec des taux très élevés, « est bien positionnée ».

Les acteurs du marché tablent majoritairement sur septembre, ou même novembre, pour une première baisse, selon l'évaluation de CME Group. Certains responsables de la Fed sont même prêts à les relever de nouveau si nécessaire, mais, selon Christopher Waller, l'un des gouverneurs de l'institution, « désormais, la probabilité est très faible d'avoir une hausse des taux ».

Zone euro : l'inflation remonte en mai sans menacer la baisse des taux

Outre-Atlantique, la baisse des taux va sans doute arriver plus rapidement. Et ce alors que l'inflation est repartie à la hausse en mai dans la zone euro. L'inflation s'est accélérée plus que prévu à 2,6% sur un an, après 2,4% en mars et avril, dans les vingt pays partageant la monnaie unique, selon les chiffres publiés vendredi par Eurostat.

Il semble malgré tout acquis que la BCE baissera une première fois ses taux lors de la réunion de son conseil des gouverneurs le 6 juin, selon les déclarations récentes de ses dirigeants. Pour la suite, l'assouplissement monétaire pourrait être moins rapide qu'attendu jusqu'ici.

La hausse des prix à la consommation en zone euro a été plus que divisée par quatre depuis le record de 10,6% sur un an atteint en octobre 2022, quand les tarifs de l'énergie flambaient dans le contexte de la guerre en Ukraine. Pour endiguer l'inflation, la BCE a augmenté les coûts d'emprunt à un rythme sans précédent depuis juillet 2022. Ses taux sont maintenus inchangés à un niveau record depuis octobre 2023, au prix d'une croissance économique en berne.

Cette hausse « n'empêchera pas la baisse des taux d'intérêt en juin, clairement annoncée. Mais la BCE sera prudente et il est peu probable qu'elle abaisse (à nouveau) ses taux d'intérêt lors de la réunion de juillet », a estimé Riccardo Marcelli Fabiani pour Oxford Economics

Néanmoins, les chiffres décevants du mois de mai devraient donner des arguments aux responsables de la BCE qui plaident pour l'attentisme au-delà de juin. Ils étaient déjà confortés par la croissance économique plus forte qu'attendu au premier trimestre en zone euro, à +0,3% par rapport aux trois derniers mois de l'année dernière, et les craintes alimentées par les hausses de salaires.

(Avec AFP)

Commentaires 6
à écrit le 03/06/2024 à 23:45
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arretez d inventer un éventuel baisse des taux, on vamonter encore 8x pour atteindre au moins 7/8%

à écrit le 01/06/2024 à 14:06
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Les investisseurs aiment bien aussi des taux d'intérêt élevés... pour les obligations d'état.

le 01/06/2024 à 16:21
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Tout à fait, les investisseurs et les spéculateurs sur le marché OTC (marché secondaire) en sont friands jusqu'au retournement du marché obligataire et les demandes anticipées de remboursement. Ou comme aux États-Unis qui assistent déjà à un retourne...

à écrit le 01/06/2024 à 14:01
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Les investisseurs aiment bien aussi des taux d'intérêt élevés... pour les obligations d'état.

à écrit le 31/05/2024 à 18:29
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Tout va bien dans le "Meilleur des mondes"🎈🧨

à écrit le 31/05/2024 à 18:25
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« désormais, la probabilité est très faible d'avoir une hausse des taux » Cela n'annonce nullement une baise des taux ! Les américains qui contiennent le troupeau.

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