Défense : l'Allemagne bloque la vente d'un fabricant de turbines à gaz à la Chine

Berlin a décidé de bloquer cette acquisition, car l'acheteur chinois produit notamment des moteurs pour des navires de guerre. Ainsi, la technologie des turbines à gaz de la division de l'entreprise allemande pourrait également être utilisée à des fins militaires.
Le ministre de l'Economie Robert Habeck (photo d'illustration)
Le ministre de l'Economie Robert Habeck (photo d'illustration) (Crédits : Reuters)

Pour des raisons de sécurité, le gouvernement allemand a bloqué l'acquisition d'un fabricant de turbines à gaz, filiale du groupe Volkswagen, par un investisseur chinois étroitement lié à l'industrie de défense du pays. « Le conseil des ministres a interdit aujourd'hui » cette acquisition « dans le cadre d'un examen des investissements », a déclaré à l'AFP un porte-parole du ministère de l'Économie. Néanmoins, aucun détail ne peut être fourni compte tenu des enjeux de sécurité ainsi que des secrets opérationnels de l'entreprise, a ajouté cette source.

L'investisseur chinois, GHGT et sa filiale Guanghan Gas Turbine GmbH, avaient signé en juin 2023 le contrat pour acquérir la division turbines de l'entreprise allemande MAN Energy Solutions, propriété de Volkswagen. Cette unité emploie une centaine de salariés, principalement sur un site de production à Oberhausen (ouest). L'acheteur chinois produit notamment des moteurs pour des navires de guerre chinois. Ainsi, la technologie des turbines à gaz de la division de MAN pourrait également être utilisée à des fins militaires, ce qui a alerté Berlin.

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L'Allemagne de plus en plus vigilante

Les craintes grandissent en Allemagne quant à une dépendance excessive à l'égard de Pékin, son premier partenaire commercial l'an dernier. De facto, le gouvernement outre-Rhin a accru sa vigilance sur les infrastructures critiques risquant de tomber entre les mains d'entreprises liées à l'État chinois.

« Nous devons protéger les technologies qui sont importantes pour la sécurité de l'ordre public », a commenté mercredi le ministre de l'Economie Robert Habeck lors d'un point presse.

Fin 2022, Berlin avait déjà bloqué l'achat de deux usines du secteur des semi-conducteurs convoitées par des capitaux chinois. Par ailleurs, la vente à une entreprise publique chinoise d'une participation partielle dans un terminal du port de Hambourg avait suscité une intense controverse au sein du gouvernement d'Olaf Scholz en 2022.

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Restreindre la Chine dans les domaines stratégiques

Les pays occidentaux se montrent généralement de plus en plus méfiants à l'égard de la Chine et de ses ambitions. Début juillet, l'Etat norvégien a mis un coup d'arrêt au projet de vente du dernier terrain en mains privées sur l'archipel du Svalbard dans l'Arctique pour se prémunir contre une cession à des acteurs étrangers comme la Chine.

L'avocat Per Kyllingstad, chargé de représenter les vendeurs, a expliqué avoir reçu des « marques d'intérêt concrètes » de potentiels acquéreurs chinois alors que le Svalbard baigne dans une région dont la valeur géopolitique et économique grandit à mesure que les tensions entre la Russie et l'Occident s'exacerbent et que la banquise recule.

Dans un autre secteur, début janvier, ASML, le fabricant néerlandais de machines permettant de produire des semi-conducteurs, avait indiqué qu'il n'enverrait plus certaines de ses machines en Chine. Pour rappel, les machines par rayonnement ultraviolet extrême produites par ASML sont indispensables pour fabriquer les puces les plus avancées (gravées en moins de 7 nm). Et l'Européen est le seul à maîtriser leur conception.

En outre, les Pays-Bas se sont récemment joints aux Etats-Unis et au Japon pour imposer des limites à l'exportation concernant les équipements de pointe de fabrication de puces. Objectif affiché : empêcher Pékin d'acquérir les puces les plus avancées, susceptibles d'être utilisées dans des armes et les hautes technologies.

Les Etats-Unis vont encore plus loin avec une liste noire commerciale d'entités chinoises. Les entreprises ajoutées à la « liste d'entités » ne peuvent pas obtenir d'articles et de technologies américaines sans autorisation gouvernementale. Certaines entités ciblées sont également liées au domaine du quantique, aux avancées des programmes nucléaires chinois, ou « impliquées dans l'expédition d'articles contrôlés vers la Russie », a précisé le département du Commerce.

Multiplication des ingérences chinoises

De son côté, Pékin multiplie les ingérences pour acquérir de nouvelles technologies. Encore fin avril, l'Allemagne a annoncé des arrestations ou inculpations de personnes soupçonnées d'espionnage au profit de la Chine. Dans son dernier rapport, publié fin 2023, le contre-espionnage militaire allemand avait mis en garde contre les activités de la Chine, prête à utiliser « des mesures de cyber-espionnage et d'espionnage classique » pour atteindre son but de devenir une grande puissance à l'horizon 2049.

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 04/07/2024 à 19:35
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Bonjour, incroyable nous arrivons a empêche la vente de turbine en Europe... Par compte pour la vente de turbine a vapeur au USA par Mr haullande et sont ministre ( Mr macron) sa ne pose aucun problème... Comme toujours je remarque que nous sommes ...

le 05/07/2024 à 8:01
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2x plus cher, et sans les turbines hydrauliques de Grenoble qui entre-temps ont été fermées et délocalisées et n'ont pas fait partie du rachat récent.. Triple-trahison de McKron et de sa bande mafieuse.

à écrit le 03/07/2024 à 19:18
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MAN Energy qui a jadis acheté une entreprise française SEMT Pielstick qui fabriquait des moteurs diesels très gros (pour navires y compris militaires, locomotives,...) avec un projet (réalisé ou pas ?) d'arrêter le production en France pour la concen...

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