Sur la carte de France du premier tour des législatives 2024, l'Ouest et la Bretagne plus particulièrement restent encore très multicolores. Si la vague Rassemblement national reste forte et confirme la montée observée lors des élections européennes, la digue bretonne, de tradition modérée, n'a pas encore rompu. Et pas seulement près des remparts de Saint-Malo. Dans la ville corsaire, le député sortant DVD Jean-Luc Bourgeaux (ex-LR depuis le ralliement d'Eric Ciotti au RN, courtisé par Horizons), est arrivé en tête avec 43,33 des voix. Il distance le candidat RN Dylan Lemoine arrivé deuxième avec 28,20% des voix, et Nicolas Guivarc'h du Nouveau Front populaire, troisième avec 23,20% des voix. Il s'est désisté lundi soir.
Sur les 27 circonscriptions que compte la région, où le taux de participation s'est élevé à 73,4%, le Rassemblement national imprègne l'ensemble du territoire, avec des scores élevés dans le Morbihan. Il ne se place toutefois en tête que dans cinq circonscriptions, entre terre et mer : dans le Finistère à Quimperlé-Concarneau (Christian Perez, 30,80%), dans le Morbihan central de Pontivy (Antoine Oliviero, à 35,85%) ainsi qu'à Hennebont-Gourin (Nathalie Guihot-Vieira, 34,69%), dans les terres rurales de Guingamp (Noël Lude à 34,30%) et à Redon en Ille-et-Vilaine (Jacques François à 32,30%).
Ailleurs, la majorité présidentielle limite la casse et le Nouveau Front populaire réalise de bons scores, autour des métropoles traditionnellement à gauche, de Rennes et Brest. Dimanche soir, Ensemble, gagnant dans dix circonscriptions, est arrivé en tête avec 29,7% des voix, devant le Nouveau Front populaire (29,6%) et le RN à 27,7%.
À l'exception de celle de Mickaël Bouloux, député NFP sortant élu dès le premier tour dans la 8e circonscription de Rennes avec 50,87% des voix, des triangulaires pourraient se jouer au second tour dans quelques circonscriptions, mais les jeux des alliances et les désistements des candidats battus ou arrivés troisième devraient ne pas remettre en question les grands équilibres actuels. À Saint-Brieuc et à Dinan, les députés sortants Ensemble, Michaël Cosson et Hervé Berville se retrouvent en ballotage favorable. Dans les duels (parfois serrés) opposant des candidats du Nouveau Front populaire et la majorité présidentielle, l'un ou l'autre l'emportera. À Lorient, Damien Girard (NFP) devance ainsi de peu Lysiane Métayer avec 35,56% des voix, contre 34,60%
Au contraire, dans les territoires ruraux, populaires ou industrieux gagnés par le RN, les désistements seraient à même d'inverser la tendance. À Guingamp, la députée sortante Murielle Lepvraud (Union de la gauche), devancée de 1.900 voix par le candidat RN, pourrait bénéficier du désistement de Cyril Jobic (majorité présidentielle).
Au lendemain des élections européennes, Thomas Frinault, enseignant-chercheur en sciences politiques à l'université Rennes 2 estimait dans le quotidien régional Ouest-France que malgré les « territoires où le RN est susceptible de se qualifier pour le second tour, ce qui n'a encore jamais été le cas en Bretagne jusqu'à présent, les conditions d'une victoire au second tour ne semblent pas encore complètement réunies ».
En n'envoyant aucun député RN le 7 juillet à l'Assemblée nationale, la Bretagne se démarquerait du reste du pays.
