![Le président de la CPME, François Asselin.](https://static.latribune.fr/full_width/2373136/francois-asselin-cpme.jpg)
LA TRIBUNE - Vous avez été reçu hier en fin de journée par la ministre du Travail, Catherine Vautrin, avant que ne soit annoncée ce week-end la réforme de l'assurance chômage. Comment s'est passé l'échange ?
FRANÇOIS ASSELIN - Elle nous a confirmé l'idée de revoir les critères de l'entrée dans l'affiliation : il faudra désormais travailler 8 mois minimum sur les 20 derniers mois pour pouvoir être indemnisé. Nous ne sommes pas opposés à ce changement de durée d'affiliation. Car même si l'économie ralentit, il y a toujours des postes à pourvoir dans de nombreux secteurs.
Le gouvernement explique que cela va permettre d'atteindre le plein emploi . Vous êtes d'accord ?
Jouer sur la durée est une bonne chose, mais ce n'est pas une fin en soi. Car le retour à l'emploi repose sur plusieurs paramètres : il y a aussi l'éducation, l'orientation, la formation initiale, la formation continue... Est-ce que cela va permettre d'atteindre le plein-emploi ? Je ne sais pas, car reste la question de l'emploi des seniors. Nous regrettons vivement que le gouvernement, sur ce sujet, ne nous ait pas entendus alors que nous proposions une mesure incitative pour l'emploi des seniors : une exonération des cotisations pour tout contrat d'un plus de 57 ans.
C'est une occasion manquée de débloquer cette chape de plomb qui pèse sur les travailleurs les plus âgés. Car il faut le rappeler : aujourd'hui, les entreprises, nous payons une cotisation de 4,5 %. Notre idée : si d'aventure l'entreprise licenciait le senior, elle aurait remboursé la cotisation non payée. Le gouvernement n'a pas retenu cette option, et finalement, cela montre aussi que nous n'avons aucunement la main sur la gouvernance.
Mais sur les seniors, le gouvernement va mettre en place un dispositif.
Oui, en cas d'embauche d'un senior à un salaire moindre qu'avant, la ministre évoque la possibilité de prendre sur l'assurance chômage, pour compenser et maintenir le niveau de salaire antérieur de la personne. Pourquoi pas ? Mais cela n'incitera pas plus les employeurs à embaucher. Alors que je rappelle qu'aujourd'hui, les entreprises sont les seules à cotiser à l'Assurance chômage. Fin décembre, la dette s'élevait à 59 milliards d'euros, ce n'est pas le moment de ponctionner les fonds du régime. Aujourd'hui, avec leurs cotisations, les employeurs alimentent France Travail, etc., sans être entendus.
La réforme devrait aussi comporter la généralisation du bonus-malus. Ce système vise à pénaliser financièrement les entreprises qui ont trop souvent recours aux contrats courts et en revanche encourager les autres...
La ministre dit que ce n'est pas totalement arbitré, mais nous sommes sur nos gardes. Car nous sommes très opposés à cette idée : cela n'aura aucun impact financier, mais aussi parce que ce système de bonus-malus est piloté au sein de la filière et de la branche. De fait, une entreprise seule n'a pas toujours les moyens d'éviter les contrats courts, surtout que dans certains secteurs (comme l'intérim, etc.), ce modèle économique est parfois imposé par les clients. Pour nous, cette généralisation serait inefficace et décourageante.
Plus globalement, nous sommes attentifs car nous voyons bien la tentation du gouvernement sur de nombreux sujets de revoir son soutien. Par exemple, sur l'apprentissage, qui a pourtant fait ses preuves, nous alertons : réduire les primes à l'embauche d'un jeune, comme l'envisage le gouvernement, serait une grave erreur.