Défaillances d'entreprises : alerte rouge pour les PME et TPE françaises

Les défaillances d'entreprises ont bondi de 23% au second trimestre 2024 par rapport à la même période en 2023, selon le cabinet d'Altares. Après ce « terrible trimestre », l'horizon est loin de se dégager pour les entreprises. Dans le bâtiment, les indicateurs continuent de plonger. Outre la croissance atone, l'incertitude commence à peser sur le moral des dirigeants.
Grégoire Normand
Dans BTP, les entreprises s'enfoncent dans la crise.
Dans BTP, les entreprises s'enfoncent dans la crise. (Crédits : Reuters)

L'économie française commence à tanguer sérieusement. Après le fort ralentissement de la croissance en 2023, les inquiétudes se propagent à très grande vitesse dans les milieux dirigeants. Les résultats des élections législatives sont loin d'avoir apaisé toutes les craintes des chefs d'entreprise. Plongé dans un épais brouillard, le patronat a tiré la sonnette d'alarme depuis l'annonce fracassante de la dissolution de l'Assemblée nationale par le chef de l'Etat Emmanuel Macron. Les organisations patronales réclament de « la stabilité » (Medef, CPME, U2P) pour tenter d'y voir plus clair alors que l'incertitude a grimpé dans les principaux secteurs de l'économie.

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Dans ce contexte politique troublé, le cabinet Altarès a dévoilé ce mardi 10 juillet des chiffres préoccupants sur la santé des entreprises. « Nous avons un trimestre assez terrible. Il y a assez peu de référence équivalente dans notre histoire récente. Les rares périodes aussi douloureuses correspondent à la crise financière de 2009 ou la crise des dettes souveraines de 2012-2013 », explique Thierry Millon, directeur des études, contacté par La Tribune. Au total, près de 69.000 emplois seraient menacés rien que sur le second trimestre et plus de 220.000 sur l'année 2024. Sur le départ, le gouvernement de Gabriel Attal pourrait laisser un dossier potentiellement explosif au prochain exécutif.

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Défaillances : +23,4% entre le T2 2023 et le T2 2024

Dans le détail, le nombre de défaillances a bondi de 23,4% entre le second trimestre 2023 et le second trimestre 2024, passant de 13.266 à 16.371. A titre de comparaison, la moyenne était autour de 10.000 sur les cinq dernières années. Comment cette vive accélération s'explique-t-elle ? « Ce n'est pas une surprise. On sort d'une période atypique. Le niveau de défaillances est descendu très bas en 2021 et il remonte progressivement », souligne Thierry Millon.

Pour rappel, le gouvernement avait mis en place de nombreuses mesures du « quoi qu'il en coûte » pour préserver le tissu productif tricolore (PGE, Fonds de solidarité, chômage partiel). A cela s'étaient ajoutés un report des cotisations sociales Urssaf et une suspension des tribunaux de commerce. Ce qui avait permis d'éviter des faillites en cascade. Mais la fermeture progressive du robinet des aides et les échéances de remboursement des PGE ont mis sous pression des entreprises déjà fragilisées. « Le choix des entreprise a été de faire les remboursements de manière progressive pour les dettes Urssaf ou les PGE », rappelle Thierry Millon. Or, « la croissance est positive mais elle ne permet pas de dégager des résultats suffisants pour investir et rembourser les PGE », juge l'expert.

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Les micro-entreprises dans le rouge

Par taille, ce sont les micro-entreprises qui enregistrent la hausse la plus spectaculaire (+26%). Et, elles concentrent la grande majorité (75%) des défaillances du second trimestre 2024. « Les entreprises qui tombent sont avant tout des micro-entreprises. Ce sont des employeurs implantés sur les territoires », indiquent Thierry Millon.

Viennent ensuite les PME de 50 à 99 salariés qui sont« sévèrement » frappées.«  Elles affichent une augmentation très rapide du nombre de défauts (+48%) et elles subissent également une forte poussée des liquidations judiciaires (+91%) ». En première ligne, figurent les entreprises du transport et celles de la sécurité privée. A l'opposé, la situation se détend pour les PME de plus de 100 salariés et les entreprises de taille intermédiaire (ETI).

Le BTP s'enfonce dans la crise

Plombé par la chute des carnets de commande et le durcissement des conditions financières, le BTP s'enfonce dans le rouge. « Le point noir est la construction », alerte Thierry Millon. « L'immobilier est en situation de crise ». Cela « se répercute en cascade sur tous les acteurs »Sur le gros œuvre par exemple, « la maçonnerie est le secteur qui engendre le plus de faillites ».  « Dans le bâtiment, les carnets de commande sont très bas. Il faut remonter à 2015 pour retrouver ces niveaux là », souligne Olivier Garnier, directeur général de la Banque de France. Parmi les autres secteurs en difficulté, apparaissent le commerce de véhicules automobiles, la pharmacie. Dans l'industrie, les entreprises spécialisées dans les déchets subissent de plein fouet la chute de l'activité.

64.000 défaillances en vue en 2024 pas loin du record de 2014

Concernant les perspectives, elles sont loin d'être d'être favorables. Le cabinet table toujours sur une prévision de 64.000 défaillances à mi-année. « Nous avons l'espoir que cela tienne en raison des jeux olympiques et sur la reprise de la consommation. Pour arriver à 64.000, il faut que le second semestre soit bon », prévient l'expert.

En France, la moyenne annuelle des défaillance s'établit autour de 60.000. « Nous avons l'espoir que cela tienne en raison des jeux olympiques et sur la reprise de la consommation ». Pour ne pas aller au delà, « il faut que la construction ne dérape pas davantage. On peut imaginer que les perspectives de l'immobilier soient meilleures que dans les derniers mois ». Avec 64.000 défaillances au total, l'Hexagone s'approcherait du record de 2014 à 65.000. Et même si c'est un record, Thierry Millon considère que « ce n'est pas si grave si on prend le nombre d'entreprises qui auraient dû tomber pendant la période Covid ». Reste à savoir si cette barre fatidique sera franchie.

Coup de mou sur la croissance au second trimestre

La croissance du produit intérieur brut (PIB) serait particulièrement atone (+0,1%) au deuxième trimestre 2024 après un début d'année légèrement meilleur (0,2%), selon la dernière enquête de la Banque de France dévoilée ce mercredi 10 juillet. « Sur la variation trimestrielle du PIB, il n'y a pas d'impact de l'incertitude politique » explique Olivier Garnier, directeur des études à la Banque de France. En revanche, les entreprises interrogées semblent avoir beaucoup d'interrogations sur l'avenir. « L'indicateur d'incertitudes montre qu'il y a une très forte et soudaine hausse dans les services, l'industrie et le bâtiment ».

Grégoire Normand
Commentaires 29
à écrit le 11/07/2024 à 22:19
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"Défaillances d'entreprises : alerte rouge pour les PME et TPE françaises" Comme prévu les patrons voyous déposent le bilan (cf. entreprises zombies à l'impunité illimitée) et comptent les millions de dette publique (cf. PGE) déposés sur leur co...

à écrit le 11/07/2024 à 16:57
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Les chefs d'entreprises se sont laissés vivre plutôt que d'innover et investir , ils ont cru à l'exemple du pge que l'état serait toujours là ...

le 11/07/2024 à 19:05
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@Idx. Ô combien je souscris à votre intervention 👍Y a qu'à voir seulement les sommes pharaoniques des aides publiques reçues par le secteur privé de 2000 à 2019 (avant les aléas de la pandémie et du conflit Russo-Ukrainien). Des aides qui rappelons-l...

à écrit le 11/07/2024 à 16:48
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Pourtant à vous lire ces derniers jours (en particulier avant les élections!), nous avions cru comprendre que la situation de notre pays s'améliorait de jour en jour! :):):)

à écrit le 11/07/2024 à 16:15
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C’est le bilan de votre mentor depuis 7 ans.....

à écrit le 11/07/2024 à 13:37
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Conséquences de la politique de l'offre.

le 11/07/2024 à 13:55
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oui, mais comme ils sont tous jamais responsables de leurs actions et décisions économiques, pour ensuite raconter que les autres sont dangereux lorsqu'ils veulent aider la population ! ce qui montre que nous ne sommes plus en démocratie, et que cel...

le 11/07/2024 à 14:20
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Le problème n'est pas tant une question d'offre ou de demande que de la cohérence du choix avec la démographie car compte tenu du logiciel économique français, la population de forme de la France se situerait entre 30 et 40 millions d'individus alors...

à écrit le 11/07/2024 à 11:28
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Les alertes pour cacher quoi? en ce moment je vis un enfer lors de travaux globaux dans une résidence de 100 appartements pour la rénovation énergétique et ...tous les ouvriers sont étrangers et 98% d'entre eux ne parlent pas français dont on ne sait...

le 11/07/2024 à 12:06
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Alors, les ouvriers qu'ont provoques l'incendie de Notre Dame, étaient-ils des étrangers ?

le 11/07/2024 à 12:15
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l'escroquerie se joue dans la nomination des hauts fonctionnaires dans ces multinationales ! c'est pourquoi ils ne font pas d'audit sur la dette ou sur les attributions de financement ! les mêmes qui vont se localiser a l'étranger sont ceux qui tou...

à écrit le 11/07/2024 à 11:08
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Un nombre certain d'entreprises et d'investisseurs vont geler leurs investissements pendant cette longue période d'instabilité politique qui va durer jusqu'au Présidentielle. Il faudrait être kamikaze pour décider autrement. Apres les Présidentiell...

à écrit le 11/07/2024 à 10:36
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Il ne faut pas s'inquiéter. Nous avons un Président qui pense qu'il n'a pas perdu les élections (avec 20 % des votes), et qui comprend très bien la réalité. Restez calme, tout va bien. En plus, comme tous ceux de son parti, il ASSUME...Vous voyez, av...

le 11/07/2024 à 11:48
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Aucun parti n'a gagné ces élections.

à écrit le 11/07/2024 à 8:38
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Ce n'est pas étonnant, le secteur privé regorgeant d'entreprises en carton vivotant des aides publiques ou qui se refinançaient avec l'argent magique des banques centrales, mais maintenant que les taux ont remonté, se refinancer coûte plus cher et po...

le 11/07/2024 à 9:40
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Il est question des TPE... alors le refinancement auprès des banques centrales... Non, c'est le contre coup des PGE et de l'inflation et par conséquent de la remonté des taux depuis le début de la guerre en Ukraine qui font ralentir l'économie. Dès ...

le 11/07/2024 à 9:40
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Il est question des TPE... alors le refinancement auprès des banques centrales... Non, c'est le contre coup des PGE et de l'inflation et par conséquent de la remonté des taux depuis le début de la guerre en Ukraine qui font ralentir l'économie. Dès ...

le 12/07/2024 à 8:24
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@globul : par "l'argent magique des banques centrales", je faisais allusion à la longue séquence de baisse des taux d'intérêt permettant à des entreprises matures et peu rentables de vivoter en faisant du credit-revolving, comme par exemple les ensei...

à écrit le 11/07/2024 à 8:01
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Croire que l’on re- industrialiser la France est une illusion. Notre pays croule sous la dépense publique qui atteint 58 % du PIB et la folie normative et fiscale . Nos charges salariales sur les hauts salaires atteignent un niveau record et nos élit...

à écrit le 11/07/2024 à 7:35
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Fallait réfléchir un peu avant de faire campagne pour LFI au nom du "barrage républicain".

à écrit le 11/07/2024 à 7:18
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Six mois, max 12 et la France sera sous tutelle du fmi. La fete est presque fini.

le 11/07/2024 à 9:20
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espérons mais je crains que ça n'aille pas aussi vite. Une cure à la grecque remettrait le pays au travail et finalement c'est le seul moyen de redonner aux créateurs et aux bosseurs la place qu'ils méritent

le 11/07/2024 à 14:44
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@AdieuBCE : l'austérité grecque n'a pas remis le pays au travail bien au contraire, elle a fait fortement augmenter le chômage malgré le départ d'un demi-million de jeunes (généralement les plus capables), d'où un nivellement généralisé par le bas et...

le 11/07/2024 à 17:07
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En Grèce, les socialistes, en utilisant de l'argent emprunté garanti par l'UE, ont dorloté la population qui a accepté avec joie, ce qui a entraîné un déficit budgétaire de 13 %, que le gouvernement grec a essayé de dissimuler. Plus ou moins ce qui s...

le 12/07/2024 à 1:06
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@revo : le gros problème en Grèce est surtout l'ampleur de la fraude fiscale et quand j'évoquais les jeunes ayant quitté le pays, c'est que les premières victimes de l'austérité avaient été les entreprises jouant le jeu...

à écrit le 11/07/2024 à 6:59
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C'est une bonne nouvelle. C'etait vraiment tres enervant, en 2020 et 2021, de voir toutes ces entreprises de BTP s'en mettre plein les poches, alors qu'on était perclus de taxes

à écrit le 11/07/2024 à 6:59
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Les célèbres prévisionnistes Macron et LeMaire nous avaient promis tout le contraire ... encore la faute aux Français et aux extrêmes en particulier

le 11/07/2024 à 11:55
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Donc on attends pour les resultats les promesses explicietes de LFI.

à écrit le 10/07/2024 à 22:53
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Ah les entreprises "zombies" qui n'ont dû leur survie (temporaire) qu'aux généreuses aides de l'État🙈

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