Attractivité de la France : « Il y a vraiment eu un bond des projets d'investissements à partir de 2017 » (Nicolas Bouzou)

Emmanuel Macron s'est félicité lundi de la septième édition du sommet Choose France, qui permet d'engranger 56 projets d'investissements pour un montant de 15 milliards d'euros. Fiscalité, marché du travail, décarbonation... L'économiste Nicolas Bouzou, directeur du cabinet de conseil Asterès, revient pour La Tribune sur les atouts économiques de la France vis-à-vis des investisseurs étrangers.
L'économiste français Nicolas Bouzou.
L'économiste français Nicolas Bouzou. (Crédits : Jacques Witt-Sipa.)

LA TRIBUNE- Que retenez-vous de cette septième édition du sommet Choose France ?

NICOLAS BOUZOU- La France est le pays le plus attractif en nombre de projets d'investissements au niveau européen, en incluant le Royaume-Uni. En regardant les données, historiquement, il y a vraiment eu un bond à partir de 2017. Il s'est passé quelque chose de positif en France en matière d'attractivité, cela ne fait absolument aucun doute. Les annonces de Choose France 2024, qui sont supérieures à celles de 2023, s'inscrivent dans ce contexte d'amélioration de l'attractivité.

Pourquoi les investisseurs étrangers choisissent-ils la France ?

Il y a beaucoup de choses : évidemment tous les facteurs classiques qui existaient avant Choose France, à savoir les infrastructures, la position géographique et la qualité de la main-d'œuvre. Depuis 2017 et l'élection d'Emmanuel Macron, la normalisation fiscale de la France est un facteur supplémentaire, notamment en matière de fiscalité sur le capital. Nous avons aussi un marché du travail relativement flexible, qui fonctionne bien.

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Autre élément un peu nouveau qui explique les montants record cette année, c'est le fait que d'autres terres d'investissement deviennent moins attractives : le Royaume-Uni en raison du Brexit, la Chine en raison de la politique de plus en plus interventionniste du gouvernement vis-à-vis des entreprises, et l'Allemagne en raison des problèmes d'énergie, non décarbonée. La France bénéficie de cet effet comparatif. C'est très clair en matière de décarbonation. Le fait que l'électricité soit décarbonée en France est très importante pour les investisseurs et est un très gros atout pour le pays.

La stratégie « industrie verte » de l'exécutif est-elle payante ?

Elle fonctionne, grâce à cette électricité décarbonée. Il faut continuer d'investir beaucoup puisque les besoins en électricité sont colossaux, continuer de produire beaucoup de renouvelables, comme nous le faisons déjà, et planifier la montée du nucléaire, ce qui est fait également. Dans le domaine écologique, nous avons en plus depuis cette année des outils fiscaux, notamment un crédit d'impôt industrie verte, inspiré de l'IRA américain (Inflation Reduction Act). Je pense que notre stratégie est la bonne.

Au niveau européen, les investisseurs disent que ce qui est aussi très positif, c'est l'impression que la stratégie de décarbonation économique est absolument structurelle et que rien ne pourra la remettre en cause. C'est un élément de stabilité qui les intéresse beaucoup. Cette politique de décarbonation, qui est avant tout environnementale, commence aussi à avoir des effets positifs du point de vue économique.

Quel chemin reste-t-il à parcourir ?

Pour nuancer l'enthousiasme, je dirais que toute cette attractivité, tous ces projets annoncés au sommet Choose France n'ont pour l'instant pas eu d'impact sur l'industrie et la réindustrialisation, puisque le niveau de production industrielle est toujours bas. Cela va sans doute avoir un impact à terme, parce qu'il y aura des ouvertures d'usines, parce que la France fera venir de la R&D, que Microsoft annonce des investissements, etc. Mais pour l'instant, cela n'a pas entraîné de réindustrialisation.

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Quels sont les obstacles que la France doit encore surmonter ?

Bercy s'y attèle, mais c'est vraiment la question de la complexité, des délais de mise en œuvre des usines, la disponibilité du foncier aussi, qui s'est compliqué avec la zéro artificialisation nette (ZAN), la contestation de beaucoup de projets et la judiciarisation quasi-automatique de beaucoup de projets. Je pense que c'est dans le domaine réglementaire et judiciaire maintenant qu'il reste un travail très important à faire.

Comment anticipez-vous la note de S&P fin mai ?

Les performances en matière d'emploi ne sont pas si mauvaises. L'inflation a baissé, donc les taux d'intérêt devraient aussi baisser. Nous avons un énorme problème de finances publiques, mais finalement, au regard de l'activité économique, la situation économique de la France n'est pas du tout mauvaise.

Pour l'instant, nous avons plutôt eu de bonnes surprises sur les notations, justement parce qu'il y a de l'activité économique en France et parce que le gouvernement essaie quand même de réduire les déficits. Il a pris conscience du problème et des facteurs structurels très connus, notamment le fait que nous avons un rendement d'impôts en France qui est exceptionnellement élevé. Dire que la France est dans la même situation que la Grèce est absurde. Tout le travail qu'il faut faire en matière de finances publiques, c'est un travail qui nous permette d'éviter que nous devenions la Grèce à terme. Les agences de notation ont l'esprit assez clair là-dessus. De toute façon, même en cas de dégradation de la note, il n'y a pas de raisons que cela ait beaucoup d'impact sur les marchés. Mais il faut être très sérieux et régler le problème du déficit public en rendant la sphère publique beaucoup plus efficace.

Commentaires 5
à écrit le 15/05/2024 à 12:38
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Sauf que ce gars qui se prétend économiste devrait apprendre le concept de l'addition et de la soustraction. Depuis 2017 les sommets "choose France" ont certes permis un investissement de quoi 50 à 70 milliards d'euros d'argent étranger? Mais en même...

à écrit le 14/05/2024 à 9:29
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"Tout le travail qu'il faut faire en matière de finances publiques, c'est un travail qui nous permette d'éviter que nous devenions la Grèce à terme" La Grèce aura probablement en 2030 des finances publiques meilleures que les nôtres. Si on regarde ...

à écrit le 13/05/2024 à 22:44
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Il faudrait qu'il précise mieux ce qu'il veut dire, plutôt que d'utiliser la méthode COUE. Et l'encre ne refuse pas les milliards... En plus, les investissements étrangers, admettons. Mais le vrai indicateur serait ce que les entreprises françaises...

à écrit le 13/05/2024 à 20:59
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La bourse a bien réagi...-0,12...

à écrit le 13/05/2024 à 19:13
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Le problème est qu'il peut hurler comme un dératé plus personne ne l'écoute et si on l'écoute on se dit que de toutes façons nous nous faisons avoir. L'expérience...

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