Air France-KLM et Lufthansa obligés de serrer les boulons

Air France-KLM et Lufthansa, même combat. En dépit d'une demande forte et d'une hausse d'activité, les deux groupes ont été plombés par la hausse des coûts unitaires. Si des événements exceptionnels sont venus impactés le premier trimestre, l'un comme l'autre resserrent les boulons pour bien terminer l'année et profiter pleinement de l'engouement actuel pour le voyage.
Léo Barnier
La maîtrise des coûts est un enjeu majeur pour Air France-KLM comme Lufthansa.
La maîtrise des coûts est un enjeu majeur pour Air France-KLM comme Lufthansa. (Crédits : Reuters)

Le premier trimestre n'est pas le meilleur, c'est entendu. Pourtant, les résultats de compagnies européennes pour le début de l'année 2024 ont de quoi inquiéter. Dans l'attente d'IAG le 10 mai, Lufthansa et Air France-KLM ont publié des pertes opérationnelles approchant 1,4 milliard d'euros cumulés. Un sacré coup de froid après les performances records enregistrées l'an dernier.

Depuis deux années, Air France-KLM était revenu à des niveaux de pertes maîtrisés, comparables à ceux réalisés en 2019. Avec une reprise légèrement plus tardive, Lufthansa y était parvenu l'an dernier.  A titre de comparaison, les deux groupes affichaient deux fois moins de pertes opérationnelles cumulées au premier trimestre 2023 que cette année. Ils avaient ensuite enchaîné sur une montée en puissance et un été record. Dès lors, comment expliquer ce début d'année compliqué alors que la demande semble encore et toujours se maintenir à des niveaux élevés et que la capacité, le nombre de passagers, le chiffre d'affaires et la recette unitaire continuent de progresser sensiblement.

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La bataille des coûts unitaires

Les deux groupes ont tout d'abord eu toutes les peines du monde à maîtriser leurs coûts. Les coûts unitaires d'Air France-KLM ont bondi de 4 %, ceux de Lufthansa ont crû de 3 %, hors carburant et quotas carbone. Au sein du groupe français, une partie de la hausse des coûts vient de sa filiale néerlandaise KLM qui a dû décaisser 50 millions de paiement exceptionnel des salaires et autant en raison de perturbation notamment dues aux mauvaises conditions météorologiques aux Pays-Bas, « avec des compensations très élevées pour les clients » selon Steven Zaat, directeur financier d'Air France-KLM. La météo avait déjà affecté la fin d'année 2023.

Ces événements exceptionnels n'expliquent pas tout. Les opérations à Amsterdam ont aussi été impactées par des problèmes dans la chaîne d'approvisionnement en début d'année. Et il y a les coûts liés à la hausse d'activité, notamment avec une hausse des frais de personnels (+12 %) ou ceux liés aux achats et consommations pour la maintenance aéronautique (+25 %). D'ailleurs, cette hausse des coûts unitaires s'était déjà ressentie sur le dernier trimestre 2023 où Air France-KLM avait fini dans le rouge.

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Pour Lufthansa, la situation est quelque peu différente. Le groupe allemand semble avoir été avant tout affecté par les grèves à répétition qui ont affecté la compagnie Lufthansa en Allemagne. Selon les explications de Remco Steenbergen, directeur financier, ce sont les mouvements sociaux qui ont entraîné les coûts unitaires à la hausse.

Sans cela, le groupe allemand estime qu'il aurait réussi à faire baisser ses coûts unitaires, notamment grâce d'importantes mesures d'économies appliquées à ses coûts fixes. Le communiqué publié pour les résultats indique ainsi que les coûts unitaires « corrigés des effets de la grève, étaient toutefois inférieurs de 1,8 % à ceux de l'année précédente, malgré l'augmentation des dépenses liées aux frais, à la maintenance et à l'entretien, et au personnel ». Les frais de personnels sont ainsi ceux qui ont augmenté le plus significativement (+17 %), avec notamment des recrutements pour appuyer la hausse de capacités du groupe (+8% d'équivalents temps-plein) et des hausses de salaires dans un contexte social tendu.

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Mesures d'économies supplémentaires

Les deux groupes ont en tout cas décidé d'aller plus loin dans leurs mesures d'économies. Malgré des retombées déjà importantes, Reemco Steenbergen a annoncé : « Au cours des prochains mois, nous nous efforcerons de compenser les effets de la hausse des coûts. Nous avons pris des mesures supplémentaires à cette fin, en particulier chez Lufthansa Airlines, qui est fortement touchée par l'augmentation des frais de personnel et des honoraires. » Le communiqué précise qu'il « est notamment prévu de réduire les coûts d'exploitation, d'arrêter les nouveaux projets et d'évaluer les besoins en personnel supplémentaire dans les domaines administratifs. »

« Je reste donc convaincu que nous pourrons atteindre une évolution stable des coûts unitaires pour l'ensemble de l'année, sans tenir compte des grèves du premier trimestre », a affirmé Reemco Steenbergen.

Air France-KLM annonce, de son côté, une « accélération des initiatives de transformation » qui vient s'ajouter aux 700 mesures déjà en cours pour rationaliser les coûts et améliorer les synergies au sein du groupe, la stabilisation des opérations. Sur ce dernier point, le directeur financier Steven Zaat s'est réjoui du fait que les mesures prises chez KLM commencent à porter leurs fruits avec une amélioration de la performance opérationnelle. Il estime ainsi que cela va lui permettre désormais de réduire ses coûts.

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Air France-KLM confiant dans ses capacités

« Nous avons beaucoup de projets en cours dans les deux compagnies (Air France et KLM), ainsi qu'au niveau du groupe, par exemple dans notre organisation commerciale pour le cargo et les passagers. Il y a une petite réduction sur l'activité domestique. Nous avons aussi stoppé les journaux à bord. Il y a plein de petits projets et nous avons aussi de très gros projets de transformation. Nous en avons 700 en cours ou en train d'être finalisés et nous continuons à rechercher des économies pour maintenir nos coûts unitaires pleinement sous contrôle », a déclaré Steven Zaat.

Malgré une hausse des coûts unitaires qui devrait être encore de 2 % au cours du deuxième trimestre, le directeur financier table toujours sur une forte réduction au cours de la deuxième moitié de l'année. Cela doit lui permettre de limiter la hausse entre 1 et 2 % sur la totalité de l'exercice. La poursuite du renouvellement de la flotte, avec 47 livraisons d'avions de nouvelle génération cette année (et 32 l'an dernier), doit aussi contribuer à cette maîtrise.

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Des exercices portés par la demande

Si les deux groupes arrivent à maîtriser ces coûts, ils peuvent encore espérer réaliser de belles années avec une demande toujours forte, avec notamment une montée en puissance des liaisons sur l'Asie et un trafic transatlantique toujours aussi dynamique. Les réservations pour l'été s'annoncent très bonnes chez Lufthansa, largement en hausse par rapport à celles de l'an dernier déjà très satisfaisantes. Le groupe allemand, plutôt en retard par rapport à ses concurrents dans la remise en ligne de capacités, va poursuivre ses efforts pour atteindre 92 % de son niveau de 2019.

C'est tout de même légèrement moins que prévu à l'origine. Lufthansa a d'ailleurs revu à la baisse ses prévisions de résultats avec 500 millions d'euros de moins. Il ne devrait ainsi pas égaler son record de l'an dernier, mais réaliser tout de même un exercice solide avec un résultat opérationnel de 2,2 milliards d'euros.

Le constat est plus nuancé chez Air France-KLM, où le niveau de réservation se maintient sur les différents segments moyen et long-courrier et recule légèrement chez Transavia pour le deuxième trimestre. Mais cela s'inscrit là aussi dans un contexte de hausse de capacités par rapport à l'an passé, légère chez Air France et KLM (+3 % chacune), et très importante chez Transavia (10 à 15 %). Sur l'année, le groupe vise une hausse de capacité totale de 5 %.

Léo Barnier

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Commentaires 7
à écrit le 02/05/2024 à 6:52
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Je voyage tous les hivers en Asie du Sud Est afin de fuir le temps maussade de chez nous.Je suis de longue date un habitué de Turkish Airlines. Lorsque je compare les prix avec AF à chaque voyage en Classe Affaires le vol le moins cher vers Bangkok...

à écrit le 01/05/2024 à 17:03
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Je pars vers deux destinationsvdifférentes en famille une fois à trois une fois à 7 . La comparaison des tarifs pas une seule fois AF moins cher. J'ai commencé à voyager en avion pour mon job en 1974 à l'époque AF jouait sur du velours pas ou peu de ...

le 03/05/2024 à 16:52
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Une entreprise en croissance. Un taux de remplissage de plus de 85%. Vous seriez à la place d’AF, vous baisseriez vos prix ?

à écrit le 01/05/2024 à 9:29
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Curieux cette épidémie de boulons desserres. Une nouvelle commande d'outils s'impose.

à écrit le 01/05/2024 à 7:45
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BOEING aussi ! Enfin on l'espère... ^^

à écrit le 01/05/2024 à 2:27
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Tant que les avions d'Air France passeront le plus clair de leur temps sur le tarmac ( 1° au monde paraîtrait il ) comment voulez vous qu'ils fassent du profit ?. Par exemple je fais de nombreux AR directs CDG > BKK. Air France est toujours deux fois...

le 01/05/2024 à 9:47
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Votre sérénité dans l’incompétence force le respect ( P. Desproges)

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