Mais où sont passés les actionnaires individuels ?

Par Pascale Besses-Boumard  |   |  459  mots
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La société de conseil de votes en assemblée générale a constaté, en 2011, une désaffection des actionnaires individuels. Un groupe de travail a été créé par l'AMF.

"Je suis très inquiet. Le dernier millésime des assemblées générales traduit une forte désaffection des actionnaires. On peut même parler d'une disparition de ces porteurs de titres traditionnellement prompts à rejeter les résolutions qui posent problème". Pour Pierre-Henri Leroy, patron de Proxinvest, la célèbre société de conseil de votes aux assemblées générales, l'heure est grave. Selon les statistiques élaborées par ses services, le taux de contestation au niveau des entreprises du CAC 40 est ainsi revenu à 5,9% contre 6,3% en 2010. Le nombre de résolutions non adoptées passe de 64 à 44. Et ce, en raison principalement de l'absence des petits actionnaires en direct qui ont manifestement boudé, cette année, ces "grands messes" des sociétés. "Ces actionnaires se désintéressent des firmes dans lesquelles ils sont investis car on a tout fait pour les dégoûter. Or si l'on veut financer l'économie, il faut bien des détenteurs d'actions. Au lieu de pousser les gens à jouer au poker en ligne, on ferait mieux de les pousser à épargner dans le vivier des entreprises", ajoute Pierre-Henri Leroy.

"Source de valeur"

Parmi les sujets qui fachent toujours autant les actionnaires venus voter cette année : les dispositifs de protection en période d'OPA. Mesures jugées inadéquates avec le libre jeu de la Bourse. Dans la foulée, les projets d'augmentation de capital sans droit préférentiel de souscription (DPS) pour les actionnaires sont également dans le collimateur des votants ; tout comme les conventions réglementées, comprenant notamment les rémunérations différées des dirigeants partant à la retraite.

Selon le patron de Proxinvest, les actionnaires ont pointé du doigt, en 2011, de nombreux sujets d'inquiétudes. A commencer par la crise bancaire issue, selon eux, du modèle de banque universelle, mais aussi la création de marchés alternatifs qu'ils jugent opaques et loin d'offrir toutes les informations nécessaires.

2012 s'annonce-t-elle sous de mauvais augure pour les actionnaires Français ? Si Pierre-Henri Leroy s'inquiète de leur désintérêt de ces derniers mois, il a d'ores et déjà fixé ses sujets prioritaires pour la prochaine fournée : la séparation des pouvoirs, le contrôle des conventions réglementées et des rémunérations de dirigeants. En attendant, il se félicite de la création par l'AMF d'un groupe de travail sur les assemblées générales, confié à la présidence d'Olivier Poupart-Lafarge. Ce groupe examine certains problèmes concernant notamment le vote par Internet et la tenue même de l'assemblée. "Les actionnaires doivent veiller à ce que leur droit de vote soit respecté comme source de valeur des entreprises", évangélise Pierre-Henri Leroy.