Avec son « innovation inclusive », Orange fait un gros tacle à Free

Par Pierre Manière  |   |  631  mots
Stéphane Richard, le PDG d'Orange. (Crédits : Reuters)
En réponse à la nouvelle box de Free, bardée de technologies mais chère et pas à la portée de tous, Orange estime, pour sa part, mettre le problème de l’exclusion numérique « au cœur de son métier » et œuvrer pour une innovation « accessible à tous ».

Ce mercredi, Stéphane Richard s'est montré particulièrement critique envers Free. Au début du show « Hello », organisé chaque année par l'opérateur historique pour présenter ses nouveautés, son PDG a joyeusement dézingué la nouvelle box présentée la semaine dernière par son rival. Bardée de technologies (elle comprend notamment une enceinte Devialet, un système pour contrôler ses objets connectés, ou encore un pack pour sécuriser son logement), celle-ci n'est toutefois pas donnée, puisqu'accessible à près de 60 euros par mois. Dans une vidéo diffusée au début du show « Hello », Stéphane Richard s'est moqué de la box de son concurrent. Il a affirmé, en résumé, qu'Orange proposait des services similaires, mais par l'intermédiaire d'options, sans les imposer au consommateur.

Surtout, il a critiqué, de manière indirecte, la nouvelle incursion de Free dans le haut-de-gamme. En contre-pied, il a affirmé qu'Orange mettait pour sa part le problème de l'exclusion numérique « au cœur de son métier », à travers une philosophie d'« innovation inclusive »Car selon lui, l'exclusion numérique prive de nombreux Français - ceux qui n'ont pas de smartphones par exemple - « d'un formidable levier de développement ».

« Nous ne construisons pas une société numérique fondée sur l'argent ou l'élitisme, a lancé Stéphane Richard. Au risque d'exclusion numérique, aux gadgets high tech, réservés à quelques-uns, Orange répond par l'innovation inclusive. Nous pensons nativement cette inclusion. Que ce soit en matière d'Internet des objets, d'intelligence artificielle, ou même de réseaux. »

« La technologie ne vaut que si elle est accessible à tous »

Cette communication d'Orange est d'autant plus piquante qu'elle s'attaque, finalement, à l'ADN de Free. Ces dernières années, l'opérateur de Xavier Niel a bâti son succès en se positionnant comme un acteur inclusif. Comment ? En pratiquant longtemps des offres à prix cassés et donc à la portée de toutes les bourses, là où ses rivaux prenaient, selon ses mots, les consommateurs pour « des pigeons ». « La technologie ne vaut que si elle est accessible à tous », a d'ailleurs clamé Xavier Niel, en 2012, lors de la conférence de presse de lancement de ses premières offres de téléphonie mobile.

Pour illustrer ses propos, le propriétaire de Free avait, à l'époque, commercialisé son célèbre forfait à 2 euros (comprenant une heure de communication et 60 SMS). Pour justifier cette offre, Xavier Niel s'était dit outré par le prix de 10 euros des forfaits dits « RSA », destinés aux allocataires du Revenu de solidarité active, pratiqué par les Orange, SFR et Bouygues Telecom. « Ça nous a vraiment scandalisé, a-t-il affirmé. On a décidé de répondre à ça en faisant des forfaits qui répondent vraiment aux personnes qui n'ont pas de moyens, qu'elles soient au RSA ou pas, ou qui ont des petits usages. » Avant d'assurer qu'avec cette offre à 2 euros, « on ne fait pas de perte, on fait de la marge ». « C'est vous dire à quel point vous vous êtes fait avoir, et à quel point les plus pauvres et les plus démunis d'entre nous, on leur a tapé dans la tête de manière scandaleuse », a-t-il enchaîné.

Six ans plus tard, voir Orange critiquer une box haut-de-gamme de Free tout en estimant faire de l'inclusion numérique une priorité montre que le marché a, décidément, bien changé. Aujourd'hui, dans un contexte d'ultra-concurrence et de guerre des prix, Free perd des clients dans le mobile comme dans l'Internet fixe, et est la principale victime de l'agressivité tarifaire de SFR et de Bouygues Telecom. Tandis qu'Orange, pour sa part, continue d'engranger des abonnés.