Fusion de l'audiovisuel public : un nouvel « ORTF » pourrait voir le jour en 2026

Dans un amendement déposé vendredi, le gouvernement prévoit une fusion pure et simple des sociétés de l'audiovisuel public à partir de janvier 2026. Un tel regroupement serait une révolution depuis la fin de l'ORTF en 1974, l'ancien établissement public qui chapeautait la radio et la télévision française. Vent debout contre cette réforme, les syndicats appellent à une première grève ce dimanche.
Depuis sa prise de fonction, la ministre de la Culture Rachida Dati appelle de ses vœux à la création d'un « pôle puissant » pour l'audiovisuel public français.
Depuis sa prise de fonction, la ministre de la Culture Rachida Dati appelle de ses vœux à la création d'un « pôle puissant » pour l'audiovisuel public français. (Crédits : © Charles Platiau / Reuters)

L'avenir de l'audiovisuel public français se précise. Dans un amendement qui sera soumis aux députés en commission à partir de mardi, le gouvernement prévoit une fusion pure et simple des sociétés de l'audiovisuel public au 1er janvier 2026.

Appelant de ses vœux la création d'un « pôle puissant », la ministre de la Culture Rachida Dati avait annoncé soutenir un regroupement rapide au sein d'une holding. Mais la ministre avait entretenu le flou quant à une possible intégration plus poussée, qui suscite des inquiétudes au sein du secteur.

Pour rappel, ce texte est une proposition de loi issue du Sénat, et il est prévu que l'Assemblée nationale débatte de ce texte les 23 et 24 mai prochain. Et ce nouvel amendement ajoute un nouveau chapitre au menu de la prochaine commission des Affaires culturelles en première lecture, qui se tiendra de mardi après-midi à mercredi prochain. Rachida Dati, qui veut aller vite, a prévu de recentrer le texte sénatorial sur les questions de gouvernance.

Un mastodonte public baptisé « France Médias »

L'amendement proposé vendredi propose donc « un rapprochement en deux étapes » : « la création au 1er janvier 2025 d'une société holding à la tête d'un groupe réunissant France Télévisions, Radio France, France Médias Monde (RFI, France 24) et INA ».

Puis, viendrait « la fusion au 1er janvier 2026 des filiales au sein de la société France Médias », explique le gouvernement dans l'exposé d'un de ses 28 amendements déposés vendredi.

« L'ensemble des biens, droits et obligations » de ces sociétés « sont transférés à la société France Médias » avec effet au 1er janvier 2026, détaille l'amendement gouvernemental clé. Composé d'une vingtaine de pages, il a été déposé à l'identique par les députés Renaissance et Horizons, membres de la majorité présidentielle.

Un « super PDG » de l'audiovisuel public

Quid de la gouvernance de ce nouvel grand groupe public ? « Le PDG de la société France Médias est nommé pour cinq ans par l'Arcom », l'autorité de régulation de l'audiovisuel, « aux termes d'une procédure transparente, ouverte, effective et non discriminatoire », prévoit un autre amendement gouvernemental.

« Cette réforme de l'audiovisuel public doit permettre de proposer une offre plus riche, mieux mise en avant sur tous les canaux de diffusion pour qu'elle puisse s'adresser à tous les Français », est-il notamment expliqué.

Les syndicats de Radio France vent debout

De leur côté, les syndicats de Radio France ont déjà dit leur opposition à « toute forme de fusion ». Ils appellent déjà à une première grève ce dimanche, puis une deuxième les 23 et 24 mai, lors de l'examen de la PPL par l'Assemblée nationale.

« Non à la holding! Non à toutes formes de fusion! », ont clamé à plusieurs reprises ces derniers jours les centrales mobilisées. « Cela nous flinguerait » car la spécificité de la radio, qui fait sa force, disparaîtrait, d'après un responsable syndical, interrogé par l'AFP.

Lire aussi« L'heure est venue de réformer l'audiovisuel public » (Laurent Lafon, Sénateur UC et Quentin Bataillon, député Renaissance)

Au-delà de l'aspect structurel d'une telle fusion, les syndicats fustigent aussi un climat peu propice, pointant « une campagne de dénigrement et de calomnies orchestrée par des partis politiques, organisations ou personnalités franchement hostiles au service public de la radio ». Une cadre de la Maison ronde ajoute auprès de l'AFP : « On est censés parler de l'avenir du service public mais le débat risque d'être "ils sont trop de gauche" ou "trop de droite" ».

La radio française publique est régulièrement accusée par des personnalités de droite de pencher nettement à gauche. Sans exprimer les choses de cette manière, Rachida Dati a récemment estimé qu'il faudrait davantage « que le service public soit le reflet de la diversité des opinions des Français ».

La patronne de Radio France réticente à une grande fusion

Du côté de Sibyle Veil, la patronne de Radio France, la réticence quant à une grande fusion est aussi présente. Si la haute cadre est favorable à la création d'une holding, elle est opposée à une fusion.

Dans une interview accordée mi-mars à La Tribune Dimanche, la PDG avait exprimé à ce sujet : « Une fusion de l'audiovisuel public affaiblirait la radio. Et ce n'est pas le moment d'affaiblir l'audio quand on voit les ravages du trop d'écrans sur la santé publique en général et le bien-être des jeunes en particulier ! Sans compter qu'une fusion très consommatrice en temps et en énergie managériale pourrait aboutir à un grand ensemble bureaucratique. »

Lire aussi« Une fusion de l'audiovisuel public affaiblirait la radio » (Sibyle Veil, PDG de Radio France)

Par ailleurs, la dirigeante de Radio France a mis en lumière une autre priorité : « En ce moment, on parle beaucoup de l'audiovisuel public, mais il ne faudrait pas en faire un "malade imaginaire". Il se porte bien, gagne du public, innove et est bien géré. Le vrai problème, c'est le poids des Gafa et ce qui se passe sur les réseaux sociaux. »

(Avec AFP)

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Commentaires 20
à écrit le 15/05/2024 à 16:09
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La vie est paradoxale. J'ai le souvenir de gros mouvements de grèves en 1974 lorsque Giscard a "cassé" l'ORTF. Ce sont les mêmes qui crient aux loups lorsque on parle de réunir toutes les structures de l'audiovisuel public. Qu'est-ce que la Télé si ...

à écrit le 12/05/2024 à 9:13
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Le retour d'interville ? ,en voiture Simone !

à écrit le 12/05/2024 à 6:25
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Ne serait il pas temps de supprimer purement et simplement l’audiovisuel d’état ?

le 15/05/2024 à 6:30
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Oui, bien sûr, pour qu'un autre soutien de Netanyahu vienne s'ajouter à Cnews et BFMTV...

à écrit le 12/05/2024 à 6:25
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Faut-il sauver le bateau à la dérive? Les radios publiques françaises, nos de gauchos qui ne représentent rien s’estiment autonome. Je trouve ça merveilleux. Comme elles sont autonomes, on les sort de l’audiovisuel public, elle se financent sans mes...

à écrit le 11/05/2024 à 18:11
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Encore une fausse réforme qui ne vise qu'à recruter plus de ponctionnaires (cf. réforme territoriale) plutôt qu'initier une vague de privatisations telle que celle de France 2 au périmètre national et en compétition déloyale (cf. subventions publ...

à écrit le 11/05/2024 à 15:23
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"Sans compter qu'une fusion très consommatrice en temps et en énergie managériale pourrait aboutir à un grand ensemble bureaucratique." Ben voilà pourquoi ils vont le faire, une usine à gaz afin de détourner toujours plus l'argent public tout en y ca...

à écrit le 11/05/2024 à 14:56
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Rien de mieux que de tout regrouper pour faciliter la censure et la propagande puis faire main-mise sur les indépendants qui par principe sont des rebelles ! ;-)

le 13/05/2024 à 6:34
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Et si les rebelles indépendant allaient jouer avec leurs idées et autre chose que nos impôts? Ça serait un tout petit peu plus normal, non?

à écrit le 11/05/2024 à 14:44
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"un nouvel « ORTF »" pourquoi ne pas refaire l'ancien (TV Elysée en quelque sorte) ? Est-ce une bonne référence de parler d'ORTF (sauf pour ceux qui sont trop jeunes) ? Des gens plus "ambitieux" parlaient d'égaler la BBC, du moins s'en inspirer. Non,...

à écrit le 11/05/2024 à 14:30
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Ne reste plus maintenant qu' à nommer un MINISTRE de l' INFORMATION ... Comme de toute façon la Presse " indépendante " ,elle même, ne fait plus correctement son travail de contre - pouvoir et d' INFORMATION FACTUELLE, les " citoyens " , ces épon...

à écrit le 11/05/2024 à 13:46
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Il y a bien longtemps que je ne suis plus auditeur ou spectateur des médias publics. Aucune envie de suivre la voie de son maître.

le 11/05/2024 à 14:32
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la " VOIE " et la " VOIX " de son Maître ! ... Vive Marconi sans ... Pathé !

à écrit le 11/05/2024 à 12:37
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Quel impact aurait ce projet sur les coûts administratifs? La proposition de loi issue du Sénat en fait une évaluation? Et en plus je trouve que l'offre du service public est abondante mais de très mauvaise qualité: on peut faire moins et mieux av...

le 11/05/2024 à 13:41
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"mieux avec moins" voire pire avec moins, pourquoi "mieux " ? C'est un fantasme. :-) Tout dépend de ce que "mieux" veut dire. Si ça plait, c'est "mieux", si ça dérange, c'est "pas bien", le service public doit plaire, à tous de préférence [ben oui, c...

le 11/05/2024 à 18:23
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@adieu BCE - "Le contribuable doit pouvoir choisir l'information avec son argent "!!!!. Alors, regardez Pascal Praud chez CNews, ou LCI, Bfm TV et vous aurez toute la bonne information "à pas cher". Après, cette information...ça vaut ce que ça vaut...

à écrit le 11/05/2024 à 12:28
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OK, et limiter le nombre de chaines: une nationale et une locale..

le 11/05/2024 à 12:46
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Et en noir et blanc si possible.

le 11/05/2024 à 18:24
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@reponse de la chose - 🤣🤣👌

à écrit le 11/05/2024 à 12:23
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Les syndicats n'avaient ils pas fait grève lors du démantèlement de l'ORTF? En fait, par définition, ils sont contre tout changement, quel qu'il soit.

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