« Je n’aime pas les dorures, j’aime les gens et les choses simples » - Yaël Braun-Pivet, Présidente de l’Assemblée nationale, est l’invitée de Sophie Iborra dans le podcast « Les Héritières »

Avocate en droit pénal, mère de 5 enfants, inconnue des Français il y a encore quelques années, elle entre en politique à 46 ans. Quand elle est élue députée des Yvelines en 2017, elle est encore bien loin de s’imaginer en 4ème personnage de l’État.
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OPNI (Objet Politique Non Identifié)

1ère femme à accéder au Perchoir, cet oiseau rare de la vie publique, est « une première ». Première femme de la lignée familiale à avoir fait des études depuis 6 générations, première femme à présider le Palais Bourbon, première femme, encore, à ouvrir la séance du Congrès de Versailles le 4 mars dernier à l'occasion de l'inscription de l'IVG dans la Constitution. Quel Symbole ! Il faut dire que cette Nancéienne de 52 ans est attachée à l'Histoire, la petite comme la grande. Celle de ce jour de mai 2022 où elle monte fièrement à l'estrade de l'hémicycle, mais aussi l'histoire de ses grands-parents, arrivés en France une valise à la main, issus de l'immigration slave juive polonaise et allemande qui fuient le nazisme dans les années 30. L'histoire toujours, celle de sa mère, placée très tôt en sauvegarde à la DDASS mais qui obtiendra son diplôme de sténodactylo à 16 ans.

Réparer et défendre

De cet héritage familial, Yaël Braun-Pivet gardera les stigmates de cet exil forcé. « Mon histoire m'a fait toucher du doigt la fragilité de la vie et du monde, le fait que l'on peut tout perdre du jour au lendemain ». Mais ses grands-parents lui ont aussi donné le goût des choses simples avec l'amour en partage et le souvenir heureux de ses visites, avec son frère, dans l'atelier de ce grand père, tailleur à Nancy. « Je l'ai toujours vu travailler, coudre à s'en abimer les yeux et les mains pour nous offrir des vacances » raconte-t-elle. L'enfant un brin rebelle et têtu au caractère bien trempé, ne supporte pas l'injustice. Lutter contre toutes formes de déterminisme, être aux côtés de celles et ceux qui souffrent, c'est pour ces raisons que Yaël Braun-Pivet choisira d'être avocate et bénévole auprès des plus démunis. Consultations juridiques gratuites, fonctions d'encadrement au Restos du Cœur, elle créera et animera le centre de Sartrouville dans la région parisienne. « Le sentiment d'être utile, quand vous vous couchez le soir, c'est assez puissant » explique-t-elle.

Faire de la politique autrement

C'est lors des législatives de 2017 qu'elle plonge dans le grand bain de la politique. Nouveau président de la République, Emmanuel Macron plaide pour un renouvellement des élus et des pratiques : plus de femmes, plus de diversité d'origines et de parcours, finies l'élite et les carrières à rallonge, le nouveau locataire de l'Élysée exhorte à faire de « la politique autrement ». « J'ai été sensible au double appel du Président, celui d'ouvrir les fonctions électives à la société civile, à l'engagement de tous, et à cette vision politique du dépassement des clivages. J'ai décidé de me lancer pour prendre ma part » ajoute-t-elle.

Élue députée des Yvelines le 18 juin 2017, 10 jours plus tard, elle sera la deuxième femme à être élue à la commission des lois sur fond de sexisme et d'antisémitisme. Mais Yaël Braun-Pivet n'est pas du genre à renoncer ni à se taire. Elle n'hésite pas à prendre ses distances avec le gouvernement lorsqu'elle ne partage pas ses orientations. Face aux procès en incompétence et autres attaques sexistes, elle tient bon et ne cache pas ses ambitions pour gravir les échelons de la République. Une condition : Donner une nouvelle impulsion dans la façon d'exercer le pouvoir. Quand elle arrive au Perchoir, elle s'attache alors, à changer les codes, en ouvrant l'institution au plus grand nombre, en recevant régulièrement de simples citoyens lors de ses permanences, en organisant des évènements culturels, sportifs au sein même du Palais Bourbon. La présidente Braun-Pivet se rend dans tous les départements de France et de Navarre. Faire de la politique autrement, pour elle, c'est aussi préférer le débat interne plutôt que le bras de fer public, avec une assemblée très « turbulente » et plus clivée que jamais, elle réussit le pari improbable de convaincre au-delà de son camp et de gagner, le respect de ses collègues qui la qualifient de « présidente atypique, bosseuse et loyale ».

La preuve par l'exemple

Pour cette petite fille d'exilés, devenir la première femme présidente de l'Assemblée nationale méritait « de prendre son risque ». Elle le prend volontiers, quand, à peine nommée ministre des Outre-mer en mai 2022, elle démissionne pour poser sa candidature au Perchoir. Après une campagne courte mais âpre elle accède au graal le 28 juin 2022. De ce jour, comme celui où elle ouvre la séance du Congrès de Versailles afin d'inscrire l'IVG (Interruption Volontaire de Grossesse) dans la Constitution, elle garde une immense fierté mais aussi le poids de la fonction et la responsabilité envers toutes celles qui devront nécessairement poursuivre le chemin qu'elle a ouvert. « Ce statut de pionnière m'oblige. Notre devoir collectif, à présent, est de faire en sorte qu'il y en ait d'autres qui suivent » explique-t-elle.

Pour Yaël Braun-Pivet, ce chemin de l'égalité entre les femmes et les hommes, en politique comme ailleurs, est encore long. Pour elle, la loi est au cœur des batailles qui restent à mener notamment pour faciliter la vie de l'élue et donner aux femmes l'envie et la possibilité de s'engager. « La seule femme qui est sûre de ne pas être élue est celle qui renonce à se présenter » insiste-t-elle, car les freins sont nombreux. Auto-censure, difficultés à concilier les temps de vie, appréhension d'un univers hostile, elle les exhorte, pourtant, à assumer leur position de pouvoir. Elle cite Simone Veil, l'un de ses modèles, « Ma revendication en tant que femme, c'est que ma différence soit prise en compte, que je ne sois pas contrainte de m'adapter au modèle masculin ». Tout est dit.

Une présidente normale ?

Amoureuse de voile, navigatrice aguerrie, c'est auprès de sa famille qu'elle vit ses passions, elle ne manquerait pour rien au monde un bon concert de pop rock, et si son service de sécurité le permettait, c'est dans la fosse qu'elle aimerait chanter et danser. Pendant ses rares congés, son téléphone est coupé. Être au plus près du réel est sa ligne avec un mantra : « la République en partage ». « J'ai besoin de sentir le terrain, nos concitoyens ont besoin de femmes et d'hommes politiques ancrés dans la vraie vie » déclare-t-elle.

Aurait-elle pour ambition de devenir, un jour, la Présidente de tous les Français ? Écoutez sa réponse dans « Les Héritières », disponible sur toutes vos plates- formes habituelles et sur la tribune.fr - Bonne écoute.

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Commentaires 2
à écrit le 30/05/2024 à 10:40
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Mme la Présidente Je viens d'écouter votre interview pour la deuxième fois, tellement à mon petit niveau, je me retrouve bien dans tout ce que vous expliquez si simplement....si franchement...si sincèrement... Bravo !!! J'ai eu la chance de vous r...

à écrit le 28/05/2024 à 10:17
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« Je n’aime pas les dorures, j’aime les gens et les choses simples » Et vous faites de la politique !? Mais enfin madame vous vous êtes perdue ou quoi ? Vous avez vu de la lumière peut-être alors vous êtes rentrée... LOL ! ^^

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