« Le dialogue entre Google et la presse quotidienne est fermé »

La presse quotidienne a annoncé un projet d'alternative à Google News qui met gratuitement des articles de presse sur son site. Où en êtes-vous ?Au printemps dernier, nous avons rencontré les dirigeants de Google pour parler de l'utilisation de nos informations sur leur site. Nous avons reçu de leur part une fin de non-recevoir avec la réponse suivante : « Nous n'achèterons jamais votre information car l'information n'a pas de valeur. » C'est inacceptable. Cinq quotidiens vont donc lancer un kiosque numérique qui a vocation à s'ouvrir à tous les quotidiens et même à tout titre de presse. On pourrait même imaginer que le kiosque s'ouvre à la presse francophone. Cela témoigne de la volonté de la presse de prendre son destin en main, de moins dépendre de tiers. D'autant qu'aujourd'hui, le dialogue est fermé, du moins du côté de Google. Les éditeurs de presse devaient rencontrer il y a dix jours son président Eric Schmidt lors de son passage en France, mais il a annulé ce rendez-vous au dernier moment...Comment sera financé ce kiosque numérique ?Il sera financé par les éditeurs et offrira des contenus payants. Par ailleurs, certaines de ses déclinaisons seront soutenues par le grand emprunt. Nous avons répondu à la consultation cet été et nous sommes en train de discuter pour répondre aux appels à projets. Notre projet a été très bien été accueilli du commissariat à l'investissement [en charge du grand emprunt rebaptisé « investissements d'avenir », ndlr].Vous avez vivement contesté les nouvelles règles publicitaires de Google. Pourquoi une telle inquiétude ?Leur nouvelle façon de commercialiser les noms de marques [qui permet à un tiers d'acheter comme mot clé pour un lien publicitaire, le nom d'une marque dont il n'est pas propriétaire, Ndlr] est inacceptable et montre bien que Google a une vision du marché qui n'est pas la même que la nôtre. Ce problème dépasse la presse quotidienne. Toutes les marques sont concernées. C'est extrêmement grave. Nous n'avons pas l'intention de nous laisser faire et nous envisageons un recours juridique. Que pensez-vous du rapport Cardoso qui préconise une remise à plat des aides de l'Etat à la presse ?Le rapport a été donné à Bercy et au ministre de la Communication Frédéric Mitterrand avec qui, je pense, les discussions vont commencer. Je ne suis pas choqué par l'idée de rediscuter des aides à la presse. Ce qui me gêne, c'est qu'on mélange tout quand on parle d'un milliard d'euros d'aides publiques à la presse. Si on retire les aides à La Poste, à l'Agence France Presse. Les aides directes s'élèvent à environ 250 millions d'euros. Certaines aides sont très nécessaires. Ce qui est très important c'est de les mettre en perspective, qu'elles rentrent dans le cadre d'un projet de développement avec des résultats à mettre en face des aides. C'est dans cette direction qu'il faut aller car c'est vertueux. Ne faut-il pas réorienter les aides au développement numérique de la presse ?La presse restera papier pendant encore de très nombreuses années, Le Web est un complément du papier et il ne va pas le remplacer, du moins avant 15-20 ans. Dans l'immédiat, la problématique concerne encore le papier. Si on veut garder des rédactions de la qualité que nous avons aujourd'hui, il nous faut un chiffre d'affaires que le Web est incapable de nous apporter. L'avenir de la presse quotidienne nationale passe par le papier ET le Web. Je ne crois pas du tout à la substitution de l'un par l'autre. De la même façon, on ne peut envisager l'avenir sans le Web.Que pensez-vous des projets du nouveau président de l'AFP qui souhaite fournir directement des informations au grand public ?C'est juridiquement impossible et je ne vois pas comment il pourrait le faire. Donc sur ce sujet, je suis assez confiant car l'AFP est une société de droit qui respecte ses statuts. Après « Les Echos » il y a deux ans, « Le Monde » vient de changer de propriétaire, « Le Parisien » est en vente, « La Tribune » cherche un investisseur. Qu'en pense le président du Syndicat national de la presse quotidienne ?Compte tenu de la conjoncture actuelle, les titres de presse ont besoin d'actionnaires stables et solides. Le mouvement actuel le prouve et c'est très sain que des actionnaires solides financièrement les appuient dans cette période certes difficile. Le numérique, présente de vraies possibilités de développement. Les journaux doivent avoir les moyens de financer ce développement.Propos recueillis par Sandrine Bajos et Isabelle Repito
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