Fermeté de la peseta, euphorie à la Bourse de Madrid

Dix mois après sa dévaluation en catastrophe, la peseta se retrouve désormais, depuis la fin de la semaine dernière, en tête du SME, devançant de peu le florin hollandais. Elle se négociait hier à 84,10 pour un deutsche mark, les cent unités s'échangeant à 4,0760 francs français. Ce rétablissement spectaculaire coïncide avec une période d'euphorie sur les marchés espagnols : l'indice de la Bourse de Madrid, qui avait déjà atteint le 28 décembre dernier son niveau le plus élevé de 1995, continue à grimper. L'écart de rentabilité entre les titres du Trésor espagnols et les « bunds » allemands n'est plus que de 3,6 points (il était de 5,3 au printemps dernier). Les investisseurs étrangers redécouvrent l'Espagne. Cet engouement répond certes à des raisons conjoncturelles : l'impression prévaut à Madrid qu'après les turbulences monétaires du printemps dernier, la défiance exagérée des marchés avait conduit à une sous-évaluation de la plupart des valeurs espagnoles, qui tendent aujourd'hui à retrouver leur véritable niveau. En outre, chacun s'attend à un prochain relâchement de la politique monétaire. Malgré le contexte généralisé de baisse des taux, la Banque d'Espagne n'a encore réduit les siens que d'un quart de point. Des coupes sombres dans le budget Au-delà, l'enthousiasme des marchés financiers répond aussi à des considérations de fond : l'économie espagnole va mieux. Le gouvernement a commencé la campagne pour les élections de mars prochain, en soulignant que 1995 a été le premier pas véritable vers la convergence. L'inflation sera vraisemblablement de 4,3 % pour 1995 et devrait rapidement passer sous la barre des 4 %. Le déficit de l'Etat central a baissé de 14,4 % durant les onze premiers mois de 1995 et l'objectif de ramener le déficit de l'ensemble des administrations publiques des 6,7 % du PIB de 1994 à 5,9 % en 1995 a été apparemment atteint. Le gouvernement vient d'annoncer des « coupes sombres » dans le budget de 875 milliards de pesetas (35 milliards de francs) destinées à rendre plus crédible l'objectif de réduire le déficit à 4,4 % du PIB en 1996. Enfin, la balance des paiements courants a été en 1995 excédentaire pour la première fois depuis dix ans. Si les socialistes arguent de leur succès, le PP (Parti populaire conservateur), explique l'euphorie des marchés par une anticipation d'une victoire de l'opposition. Mais le monde espagnol de la finance semble considérer que quel que soit le vainqueur, le nouveau gouvernement poursuivra la voie « mastrichtienne », ne serait-ce que parce que personne n'attendra l'Espagne si elle n'est pas à présente au rendez-vous : si l'Union monétaire ne peut se construire sans le franc, elle peut en revanche se passer de la peseta, reconnaissent à Madrid les responsables économiques. Aussi les milieux de la finance attendent-ils surtout que se dégage des élections une majorité claire permettant la formation d'un gouvernement solide, apte à prendre les mesures de rigueur qui s'imposent. Thierry Maliniak, à Madrid.
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