Jospin envisage de « taxer » les entreprises

Même si le gouvernement insiste sur le fait que rien ne sera fermement décidé avant la remise de l'audit des finances publiques, le 21 juillet, le gouvernement Jospin pourrait instituer cette année un prélèvement exceptionnel sur les entreprises, destiné à réduire les déficits publics. Ce prélèvement serait voté par l'Assemblée nationale dès septembre. « Si des mesures de hausse des recettes étaient décidées dès 1997, elles seraient soumises au Parlement lors de la session extraordinaire de septembre », a déclaré hier Lionel Jospin devant le groupe des députés socialistes. Il résulterait de cette décision une hausse globale des prélèvements obligatoires, alors même que Lionel Jospin s'était engagé, pendant la campagne électorale, à ne pas les augmenter. « Il faut apprécier cet engagement sur l'ensemble de la législature », répond aujourd'hui le gouvernement. Pourquoi recourir à un tel traitement de cheval ? Difficiles économies. Alors que Helmut Kohl s'engage à réduire les déficits publics allemands à tout juste 3 % du PIB cette année, Lionel Jospin, contraint et forcé, va tenter lui aussi de les diminuer dès 1997, confirme-t-on au sein du gouvernement. Car les déficits sont sur une tendance supérieure à 3,5 % du PIB, évidemment incompatible avec les exigences allemandes quant au lancement de la monnaie unique. Toute la question est de savoir comment obtenir cette diminution. Peut-être le ministre de l'Economie et des Finances, Dominique Strauss Kahn, précisera-t-il les intentions du gouvernement devant la commission des finances de l'Assemblée nationale qui le reçoit aujourd'hui. Pour l'heure, le discours officiel insiste sur les économies possibles dans les dépenses publiques avant la fin de l'année ; mais les experts budgétaires ne peuvent que reconnaître la faiblesse des marges de manoeuvre à cet éard. Et de rappeler que le gouvernement Juppé n'est pas parvenu à geler 20 milliards de francs de crédits, comme il le souhaitait. Seuls 10 milliards l'ont été. C'est donc du côté des recettes que se situent les possibilités de réduire les déficits. D'où l'idée évoquée d'augmenter la fiscalité. Rien n'est peut être décidé, mais on voit mal pourquoi des fuites auraient lieu sur le thème de l'accroissement des prélèvements et pourquoi Lionel Jospin évoquerait le sujet, si ce n'est pour préparer le terrain. Rééquilibrage. Le relèvement des impôts viserait d'abord les entreprises. « Toutes les mesures éventuellement prises s'inscriront dans la droite ligne des engagements de Lionel Jospin, en faveur d'un rééquilibrage des prélèvements », affirme un expert. Il s'agirait de taxer les profits des entreprises, sous une forme encore indéterminée. La taxation des plus-values pourrait être accrue. Les experts du PS n'ont-ils pas toujours insisté sur la surcapacité de financement des entreprises, liée à un partage de la valeur ajoutée qui leur est devenu trop favorable ? Tout le problème est de savoir quelle est l'ampleur d'un prélèvement supportable par les entreprises. Le gouvernement est contraint de réduire les déficits publics d'environ 0,3 ou 0,4 point de PIB, pour les ramener à un chiffre proche de 3,3 % du PIB, niveau négociable avec les partenaires européens pour l'entrée dans l'union économique et monétaire. Une réduction de 0,3 point représente la bagatelle de 24 milliards de francs. Difficile d'imaginer que le gouvernement Jospin prélève une telle somme sur les entreprises en fin d'année. Cela représenterait une hausse de 17 % de l'impôt sur les sociétés, alors même qu'une surtaxe de 10 % a été instituée par le gouvernement Jupppé, à l'été 1995. Où trouver des recettes ? Lionel Jospin et Dominique Strauss-Kahn devront donc concocter un mélange de prélèvements plus varié. Il s'agirait de trouver d'autres recettes, sans doute à caractère non fiscal. Certains évoquent le changement de statut des Caisses d'épargne, qui pourrait faire rentrer une dizaine de milliards de francs dans les caisses de l'Etat. « Le concours Lépine est lancé. Toutes les bonnes idées sont à prendre », ironise un expert du gouvernement. Ce concours pourrait être prolongé de plusieurs mois : le ministère des Finances sera probablement contraint de recourir à de telles astuces pour diminuer les déficits de 1998. Le budget de l'an prochain prévoira, par ailleurs, un « rééquilibrage » de la fiscalité au profit des ménages et au détriment des entreprises. Ivan Best
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