Henry Buzy-Cazaux rêve d'ordre dans l'immobilier

L'immobilier n'a pas bonne presse. Les professionnels du secteur, agents immobiliers ou syndics, sont souvent soupçonnés d'être plus mus par l'argent que par le respect de la déontologie. La révélation en septembre par la Direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) d'un " nombre très significatif de pratiques illicites " chez les agents immobiliers n'a, pourtant, pas semblé susciter un sursaut dans la profession.AGREGE DE PHILOSOPHIEAu risque de s'attirer les foudres de certains de ses pairs, un expert du secteur, Henry Buzy-Cazaux, a ouvert le débat. L'homme maîtrise le sujet pour avoir porté les deux casquettes : il a été conseiller du président de la Fnaim, l'un des deux syndicats d'agents immobiliers, puis directeur général adjoint du réseau de gestion et de transaction immobilières Foncia. Il est aujourd'huivice-président du groupe de promotion immobilière et d'administration de biens Tagerim.Véritable éminence grise de la profession, ce personnage atypique, à la fois agrégé de philosophie et diplômé de l'Essec, plaide pour la mise en place d'un ordre professionnel qui regrouperait les agents immobiliers et les administrateurs de biens, à l'image de l'Ordre des médecins. " Il faut se battre pour une plus grande orthodoxie de la profession qui a du mal à se réformer, martèle-t-il. Les agents immobiliers comme les administrateurs de biens manient des enjeux importants : l'acquisition d'un logement est l'achat le plus exorbitant de toute une vie. Il faut donc travailler dans les règles de l'art. Pourtant, au sein des groupes comme dans les cabinets de taille artisanale, les bonnes pratiques se perdent. Or, les syndicats professionnels ne peuvent pas aisément exclure de leurs rangs lesindélicats et sont démunis, en l'absence de condamnation judiciaire, face à des manquements déontologiques ou professionnels. " D'autant que la moitié des cabinets n'adhère à aucun syndicat et échappe à toute régulation professionnelle.Henry Buzy-Cazaux ne se borne pas à des déclarations d'intention. Ce Basco-Béarnais, qui ne manque pas de panache ni de volontarisme, a fait faire de sa propre initiative une étude juridique circonstanciée pour évaluer l'opportunité de mettre en place un ordre. Il a confié cette mission à Me Philippe Pelletier, qui est aussi le président de l'Agence nationale de l'habitat. " J'ai voulu que l'on réponde par anticipation à toutes les objections que les opposants à un ordre ne manqueront pas de lever : qu'un ordre n'est pas plus efficace qu'une fédération, qu'il est contraire au droit communautaire ou qu'il ne s'en est créé aucun depuis le régime de Vichy ", détaille-t-il. L'homme active aussi ses réseaux politiques. Il a averti de son intention le cabinet du président de la République, et a été auditionné par le président de la commission des Lois du Sénat, Jean-Jacques Hyest." LES DERAPAGES DE QUELQUES-UNS"" Mettre en place un ordre ? Cest un voeux pieux, objecte René Pallincourt, le président de la Fnaim. Il n'y a pas de risque que l'on puisse parvenir à en mettre un sur pied. L'Europe est en train de détruire tous les ordres au motif qu'ils créent des situations de monopole. En revanche, il serait possible de mettre en place une intersyndicale forte. " " La question qui est posée n'est pas celle-là, rétorque Michel Mouillart, expert du logement et professeur àParis X Nanterre. Henry Buzy-Cazaux a compris qu'il faut rappeler à l'ensemble des acteurs de laprofession qu'ils ont des responsabilités, des contraintes, des limites. Les dérapages de quelques-uns peuvent avoir un effet systémique sur l'ensemble de la profession. "Le débat sur l'opportunité d'un ordre a déjà agité la profession. La Confédération nationale des administrateurs de biens (Cnab) l'avait lancé il y a une vingtaine d'années. Cela lui avait valu à l'époque une volée de bois vert au motif que les professions d'agent immobilier et d'administrateur de biens sont déjà réglementées par la loiHoguet. Le président actuel de la Cnab, Serge Ivars, craint que ladémarche ait peu de chances d'aboutir. Mais il la juge intéressante : " Dans un contexte où notre profession est attaquée de toute part, chercher à créer une instance supérieure qui pourrait contrôler tous ceux qui exercent le métier immobilier serait une bonne chose - que cela passe par un ordre, par l'obligation d'adhérer à un syndicat, ou encore par une chambre commune de discipline. "
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