La copie illégale a coûté 10.000 emplois à l'industrie culturelle

C'est la première fois qu'une étude indépendante tente de chiffrer l'impact du piratage de la musique, du cinéma et de la TV en France. On n'est pas dans le processus vertueux, cher à l'économiste Schumpeter, de « destruction créatrice », accompagnant les transitions technologiques, mais dans la « destruction destructrice ». Le piratage des ?uvres numérisées détruit les modèles existants dans l'économie des biens culturels et entrave aussi l'émergence des futurs modes de consommation de ces biens. Ce n'est pas l'industrie du disque, qui a vu son chiffre d'affaires fondre de presque 50 % en cinq ans, qui le dit. Ni le ministère de la Culture pour soutenir son projet de loi « Création et Internet » de lutte contre le piratage des ?uvres, déjà voté au Sénat. C'est un rapport « autofinanc頻, réalisé par des enseignants universitaires en économie, Laurent Benzoni et Patrice Geoffron, de Tera Consultants, et Robert Zarader et Philippe Hardouin du cabinet de conseil en communication Equancy & Co.L'analyse porte sur quatre filières : musique, cinéma, télévision, et livre, encore protégé du piratage massif mais déjà atteint dans l'édition scientifique et technique. Elle modélise la perte de chiffre d'affaires en 2007. Pour le cinéma par exemple, sur 159 millions de films téléchargés illégalement en France, Tera Consultants fait l'hypothèse que 10 % auraient pu être vus en salles et chiffre à 201 millions d'euros la perte sur le chiffre d'affaires du cinéma en salles. Mais le cinéma est aussi touché par les pertes liées aux DVD non achetés ou loués, aux films non consommés en vidéo à la demande. Sa perte globale serait de 605 millions d'euros. Pour les quatre secteurs, l'étude calcule une perte de 1,2 milliard d'euros de chiffre d'affaires. menace sur l'innovationL'effet direct, compte tenu du chiffre d'affaires par salarié à temps plein, serait de 5.000 emplois perdus, notamment dans la production et la création. Soit un peu moins de 10 % de l'emploi total, mais plus de 20 % pour la musique. Et l'impact est de 10.000 emplois si l'on considère que chaque emploi dans le secteur en induit un autre à l'extérieur.Sans prétendre à la précision « millimétrique » de leurs modèles, les auteurs insistent sur le fait que la copie illégale ne menace pas seulement les activités traditionnelles des acteurs en place. Elle crée surtout une « incertitude sur la rentabilité de nouveaux modèles innovants, qu'ils viennent d'ex-majors du secteur ou de start-up ». Ainsi, les offres légales de musique en ligne sont aujourd'hui très loin de compenser la chute des ventes de CD et d'avoir trouvé l'équilibre. Le plan « France numérique 2012 », qui généralisera l'accès Internet haut débit et renforcera la spécificité française de connections Internet presque exclusivement haut débit et tarifées au forfait, devrait accentuer ces phénomènes. « La menace est de perdre encore 10.000 emplois dans les trois prochaines années », prévient l'étude.Isabelle Repiton
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