La crise économique en Algérie réveille la grogne sociale

Un léger mieux, selon les officiels algériens, une dégradation de plus en plus inquiétante, pour l'opposition démocrate. Tels sont les diagnostics portés sur l'état de l'économie algérienne six mois après la nomination d'Ahmed Ouyahia à la tête du gouvernement. Ce dernier, qui doit en effet présenter prochainement le bilan de son action pour le premier semestre au Conseil national de transition (Parlement désigné), affronte une conjoncture difficile, marquée en outre par une détérioration du climat social. De nombreuses entreprises publiques, comme Air Algérie (pour des raisons salariales), connaissent des mouvements sociaux répétitifs, qui vont en se durcissant. Même situation dans le complexe industriel de Rouiba, dans la banlieue d'Alger, d'où sont toujours partis dans le passé des mouvements de protestation d'ampleur et où, aujourd'hui, les cellules locales du principal syndicat, l'UGTA, ont fort à faire pour contenir les tensions sociales. « Le coût de la vie ne cesse d'augmenter, l'inflation dépasse les 3 % par mois et l'Algérien, déjà excédé par une situation sécuritaire qui ne s'améliore pas, voit fondre son pouvoir d'achat. Une explosion sociale à la rentrée n'est pas à exclure, d'autant plus qu'aucune nouvelle positive ne semble apparaître à l'horizon », avertit un responsable de l'UGTA. Premier constat, l'activité industrielle, hors hydrocarbures, continue à décliner avec une baisse moyenne, tous secteurs confondus, de 19 % par rapport à la même période en 1995, tandis que le taux d'utilisation des capacités industrielles est évalué à seulement 49 %. Malgré d'ambitieux « plans de redressement interne », plusieurs entreprises publiques économiques (EPE, sociétés d'Etat) restent engluées dans d'inextricables problèmes de trésorerie et d'approvisionnement en pièces détachées. Autre critique adressée à Ahmed Ouyahia, celle qui concerne la lenteur dans l'application des réformes. « L'urgence réside dans la réforme fiscale plutôt que dans l'ouverture du commerce extérieur, seule réforme appliquée par l'actuel gouvernement. La lutte contre la fraude fiscale qui touche l'ensemble des milieux d'affaires est aussi importante que la lutte contre le terrorisme. Nous perdons trop de temps », estime l'économiste Fayçal Hadefi. Quant à la situation financière, les autorités notent avec satisfaction que les réserves de changes ont été reconstituées à hauteur de 2 milliards de dollars et que le déficit budgétaire (99 milliards de dinars prévus pour 1996, soit 9,9 milliards de francs) demeure maîtrisé. Pourtant la perspective d'un troisième rééchelonnement de la dette publique n'est plus exclue et plusieurs responsables reconnaissent que « l'année 1997 risque d'être difficile ». A ce sujet, l'information récente selon laquelle Paris pourrait diminuer de moitié son aide annuelle (6 milliards de francs en 1995) ne fait l'objet d'aucun commentaire officiel, des conseillers du président Zéroual se contentant de remarquer que cette décision « n'a pas été confirmée par le gouvernement français » et qu'en tout état de cause, « elle n'aurait pour seul effet que de pénaliser les entreprises françaises ». AKRAM ELLYAS
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