« L’utilisation de la voiture sera réduite à Orly » (Augustin de Romanet, PDG d'ADP)

ENTRETIEN - Le patron du Groupe ADP révèle son plan de transformation de l’aéroport parisien, accompagné par une concertation locale pendant trois mois.
Au siège du Groupe ADP, à Roissy-Charles-de-Gaulle, le 3 avril 2023.
Au siège du Groupe ADP, à Roissy-Charles-de-Gaulle, le 3 avril 2023. (Crédits : © LÉA CRESPI/PASCO&CO)

LA TRIBUNE DIMANCHE - Les enjeux de décarbonation sont particulièrement complexes dans les aéroports. Où en êtes-vous ?

AUGUSTIN DE ROMANET - Cette évolution est indispensable. Pour que les générations suivantes puissent continuer à prendre l'avion, le transport aérien doit considérablement diminuer son volume d'émissions de CO2. Notre objectif consiste à atteindre le seuil de zéro émissions nettes de CO2 au sol en 2030 pour Paris-Orly et en 2035 pour Paris-Charles-de-Gaulle [CDG]. Nous lancerons le 26 février une concertation avec toutes les parties prenantes de Paris-Orly, où travaillent 25 000 personnes et que fréquentent chaque jour 100 000 passagers.

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Est-elle obligatoire ?

Pas du tout. Il s'agit d'une démarche volontaire de notre part, auprès des neuf communes riveraines. Tous les acteurs - élus, représentants des collectivités locales, salariés, habitants... - pourront exprimer leurs souhaits sur un site Internet et lors de plusieurs réunions publiques. Cette concertation durera trois mois. Pour ce chantier, le groupe s'appuie sur la dynamique de l'alliance environnementale Paris-Orly réunissant 40 partenaires, dont les compagnies aériennes.

Quelles mesures clés sont envisagées ?

Une première révolution aura lieu dès le mois de juin, avec l'arrivée de la ligne 14 du métro au cœur de l'aéroport. Elle est symbolique, puisque notre premier objectif consiste à réduire l'utilisation de la voiture. Aujourd'hui, 80 % des passagers utilisent encore le mode routier pour s'y rendre : 33 % en véhicule individuel, 35 % en taxi ou en VTC, 14 % en bus et 32 % en transports en commun. Sans oublier les employés, dont 90 % utilisent actuellement leur voiture pour se rendre au travail. Or les accès à Paris-Orly représentent 40 % des émissions au sol.

Et hors de la voiture ?

Ce plan d'aménagement prévoit aussi de consacrer 30 % de la surface au maintien de la biodiversité, de diminuer de 40 % la consommation d'électricité ou encore d'augmenter de 80 % la valorisation des déchets non dangereux, avec une usine de méthanisation installée au sud-ouest de la plateforme. Au sud se trouvera une station « multi-énergies », hydrogène et gaz naturel notamment. Un deuxième câble de 225 000 volts - un gros investissement - sera d'autre part installé pour électrifier les opérations de la plateforme afin d'éviter le recours aux groupes électrogènes. Nous sommes aussi engagés pour réduire le bruit. Le temps des discours fait place aux actes.

Combien de temps dureront les travaux ?

Douze ans.

Comment s'effectueront les déplacements sur le site ?

Grâce à des véhicules et des transports en commun propres, donc non thermiques. Seule une minorité de passagers, comme les personnes en situation de handicap, pourra accéder aux terminaux d'Orly en voiture thermique une fois le projet achevé. Nous créerons un système de transport spécifique pour relier de nouveaux parkings, distants de près d'un kilomètre, à l'aéroport. Les taxis et VTC, eux, pourront continuer à déposer leurs clients au pied des terminaux. Avec le prolongement de la ligne 14, la gare multimodale de Paris-Orly accueillera 95 000 voyageurs quotidiennement. Dès 2025, la part des transports en commun devrait passer de 32 à 39 % et celle des véhicules particuliers de 68 à 61 %. Un plan vélo conçu pour les employés est aussi en préparation.

Y aura-t-il également des modifications pour les passagers ?

Oui, grâce à de nouveaux postes au contact : des accès directs aux avions par des passerelles, et non des bus. Cette évolution répond à une demande des passagers et accroîtra leur confort.

Une première révolution aura lieu dès juin, avec l'arrivée de la ligne 14 du métro dans l'aéroport

Air France a récemment déclaré vouloir quitter Paris-Orly. Cette décision affectera-t-elle le trafic aérien ?

Non. Il restera à un niveau identique, avec substitution de destinations internationales à des lignes domestiques.

Comment avez-vous réagi à cette annonce ?

En tant qu'exploitant d'aéroports, nous respectons les décisions de nos clients. Nous sommes confiants dans l'attractivité de Paris-Orly.

Comment analysez-vous les données récemment publiées du trafic en 2023 ?

Pour l'ensemble du groupe, il affiche en 2023 une hausse de 20,2 %, à 336,4 millions de passagers, soit 98,7 % du trafic de 2019, l'année de référence avant la crise sanitaire. On observe un léger déséquilibre entre Orly et CDG, puisque le trafic enregistré par le premier, à 32,3 millions de passagers, atteint 101,4 % de celui de 2019, tandis que celui de Paris-CDG, à 67,4 millions de passagers, ne représente que 88,5 % du trafic de 2019.

Comment l'expliquez-vous ?

Le trafic long-courrier à Paris-CDG n'a pas retrouvé son niveau d'avant la pandémie. Nous prenons désormais pour hypothèse une hausse sous-jacente du trafic entre 1 % et à 1,5 % par an en moyenne, contre 2,5 % avant le Covid. Nous devrions retrouver le trafic de 2019 au plus tôt à la fin de 2024, ou en 2025, malgré le facteur pénalisant que constitue l'obligation de contournement de la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine pour la plupart des compagnies. D'autre part, près de la moitié des passagers chinois ne sont pas encore revenus en France.

Est-ce le cas ailleurs en Europe ?

La reprise du trafic avec la Chine est plus forte au Royaume-Uni, en Allemagne et en Italie pour plusieurs raisons liées à des procédures plus rapides pour les délivrances de visas ainsi qu'à un rétablissement plus précoce des liaisons aériennes avec la Chine dans ces pays.

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Commentaires 6
à écrit le 22/01/2024 à 12:11
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Les vrais défenseurs du transport aérien ne sont pas ceux qui applaudissent à l'évolution tragique à laquelle nous assistons ces dernières années. Les compagnies «bas-coûts/bas-prix» sont un drame pour celui-ci. En multipliant les vols et en faisant ...

le 22/01/2024 à 14:08
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Et donc, que préconisez vous ? L'interdiction des vols "pas chers" (et vous allez gérer les conséquances...). Ou bien, "à la française", une indemnité pour ceux qui adopteraient les compagnies "chères" (mais tout aussi polluantes). On excluera l'acti...

à écrit le 22/01/2024 à 8:39
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L'aviation commerciale représente 2% du CO2 mondial. C'est un non sujet. Quant au carburant issu du CO2.....merci de développer votre vision.

le 22/01/2024 à 12:00
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Bien moins que les flatulences des bovins j'y crois pas !!!

à écrit le 21/01/2024 à 13:03
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Cet individu (poursuivi en justice pour malversation quand il était en charge du Crédit municipal) est un spécialiste du "green washing). Il a atteint son ambition de 100 millions de passagers pour Orly et Roissy réunis et veux nous faire croire qu'i...

le 21/01/2024 à 16:03
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se préoccuper d'environnement c'est zéro avion, on ferme les aéroports ? Le carburant issu du CO2 va arriver, l'ennui c'est d'en produire des quantités gigantesques (et son prix (hors taxes) mais c'est le passager qui paiera). Avoir moins de voitures...

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