Clément Beaune relance l'idée d'un tarif minimum sur les billets d'avion

Par latribune.fr  |   |  789  mots
Avec un tarif minimum pour un billet d'avion, Clément Beaune veut lutter contre le dumping social et environnemental. (Crédits : Reuters)
Le ministre français des Transports Clément Beaune souhaite « l'instauration d'un tarif minimum du billet d'avion » en Europe afin de « lutter contre le dumping social et environnemental ». En 2020, le directeur général de Ryanair, Edward Wilson avait fustigé un projet similaire en Autriche, « digne de la Corée du Nord ».

Voilà une déclaration qui ne manquera pas de faire réagir de nombreuses compagnies aériennes. « Des billets d'avion à 10 euros, à l'heure de la transition écologique, ce n'est plus possible ! Cela ne reflète pas le prix pour la planète », a estimé Clément Beaune, ministre délégué aux Transports, dans une allusion à certaines politiques tarifaires de compagnies low-cost. Dans une interview accordée à l'Obs, il propose d'instaurer un tarif minimum du billet d'avion, qui reste à fixer afin de « lutter contre le dumping social et environnemental ». Une « proposition » qui sera soumise à ses homologues de l'Union européenne dans les jours à venir.

Lire aussiTaxes sur les billets d'avion : quel impact sur les compagnies aériennes ?

« J'assume totalement la taxation des activités polluantes pour investir dans cette transition écologique », ajoute le ministre alors que le gouvernement compte déjà augmenter la taxe dite « de solidarité » s'appliquant à tous les vols au départ de France afin de financer les investissements dans le ferroviaire. Des taxes supplémentaires sur les sociétés d'autoroutes et les billets d'avion devraient en effet figurer dans le budget 2024 de la France.

Lire aussiTaxes sur les billets d'avion : quel impact sur les compagnies aériennes ?

Ryanair était déjà montée au créneau contre ce prix minimum d'un billet d'avion

Pour les partisans de cette proposition, les prix d'appel de certaines compagnies ne couvrent effectivement pas le coût réel par passager du voyage en avion Ce que ne manquera pas de dénoncer des représentants de low cost comme l'a déjà fait Ryanair alors que l'Autriche annonçait en juin 2020 vouloir interdire que les prix des billets d'avion puissent être inférieurs aux taxes et aux frais réels, soit 40 euros en moyenne par vol dans ce pays. « Je pense qu'un contrôle des prix est digne de l'économie de la Corée du Nord, fustigeait Edward Wilson, directeur général de Ryanair. Nous sommes dans le marché unique européen, qui fonctionne sur la concurrence. Son succès repose sur le fait que les consommateurs peuvent acheter des biens qui sont le fruit d'une concurrence entre les acteurs, laquelle concurrence crée des emplois. »

Lire aussi"C'est une honte d'avoir aidé Air France" (Edward Wilson, CEO de Ryanair)

« Ce n'est pas le train qui est trop cher, c'est l'avion qui ne l'est pas assez »

La proposition du ministre devrait satisfaire Jean-Pierre Farandou, patron de la SNCF, qui, fin 2021, déclarait, « ce n'est pas le train qui est trop cher, c'est l'avion qui ne l'est pas assez ». Il était alors interrogé sur la cherté des billets de train par rapport à la voie aérienne sur certaines destinations en France. « Je ne comprends pas pourquoi les compagnies aériennes sont exemptées de toute taxe sur le kérosène. Moi, je paie des taxes, sur mon énergie, sur mon gazole je paie des taxes ».

Lire aussiLe PDG de la SNCF veut une taxe kérosène sur l'aviation : "le train n'est pas cher, c'est l'avion qui ne l'est pas assez" (Farandou)

En 2017, Elisabeth Borne, la cheffe du gouvernement, qui occupait le poste de ministre des Transports tenait alors un tout autre discours : « le TGV est naturellement plus cher que l'avion, car, quand on a une infrastructure qui coûte 9 milliards d'euros comme c'est le cas pour les lignes Sud-Europe Atlantique (LGV SEA) ou GPSO (Grand projet ferroviaire du sud-ouest), il n'y a pas de magie. Les collectivités peuvent la financer à 100% mais dans ce cas-là, cela fait beaucoup d'argent pour l'Etat et les collectivités. Ou alors une partie est portée par le prix du billet. Je pense que chacun peut constater qu'il est très agréable d'aller de Paris à Bordeaux en un peu plus de 2 heures par la ligne SEA mais c'est aussi moins cher de le faire par l'avion et c'est normal ». Et d'ajouter : « On pourrait ouvrir le débat sur les émissions des gaz à effets de serre. J'ai demandé à mes services qu'on ait le bilan carbone du TGV en tenant compte de la construction de la ligne et à mon avis le bilan carbone d'une infrastructure de ce genre, à coup de béton et d'acier, doit être intéressant et doit s'amortir sur un certain temps pour arriver à un bilan satisfaisant. »

Lire aussi« Le TGV est naturellement plus cher que l'avion » (Elisabeth Borne)

A l'heure de l'urgence climatique, un tel discours ne serait plus audible aujourd'hui même si on pourra toujours rétorquer à la SNCF qu'elle n'hésite pas, quand elle l'estime nécessaire, à brader ses tarifs. En mai dernier, le transporteur avait ainsi mis en vente 10.000 billets à un euro pour fêter le premier anniversaire de « OUIGO Train Classique ».

(Avec AFP)