Entre Canal du Midi et cols pyrénéens, l'Occitanie veut creuser le sillon du cyclotourisme

LE TOURISME DE DEMAIN (1/4). Face à la suprématie des itinéraires longeant la Loire ou la façade atlantique et la popularité des cols alpins, l'Occitanie pointe seulement en cinquième position nationale en nombre de nuitées vélotouristiques. Depuis trois ans, la région met les bouchées doubles pour faire décoller cette forme de tourisme durable qui attire des voyageurs avec un pouvoir d'achat élevé.
Les routes occitanes regorgent d'un potentiel colossal pour le tourisme à vélo entre le Canal du Midi, les Pyrénées et les paysages vallonnés du Tarn aux Cévennes.
Les routes occitanes regorgent d'un potentiel colossal pour le tourisme à vélo entre le Canal du Midi, les Pyrénées et les paysages vallonnés du Tarn aux Cévennes. (Crédits : CRTL Occitanie)

« Nous sommes déjà venus quatre ou cinq fois en France, mais c'est la première fois que nous retrouvons la France telle qu'on la voit dans les films avec des petits villages de caractère": voilà ce que me disent souvent les touristes canadiens, américains et australiens de passage dans mon hôtel », témoigne Claudia Koch Ley, gérante de Cycling Magnolias. Après une carrière dans la finance, cette sud-africaine a élu domicile avec son mari à Plaisance, un petit village à la frontière entre le Tarn et l'Aveyron.

C'est au milieu de ces paysages vallonnés que le couple a créé en 2009 un hôtel de 22 chambres pensé pour les cyclotouristes. Une trentaine de vélos sont mis à disposition des voyageurs et Claudia Koch Ley a créé elle-même une vingtaine d'itinéraires à réaliser sur une semaine dans les environs, à raison de 20 à 60 km par jour.

Un déficit de notoriété à combler

Moins connues que les itinéraires longeant la Loire ou les cols alpins, les routes occitanes regorgent pourtant d'un potentiel colossal pour le tourisme à vélo entre le Canal du Midi, les Pyrénées et les paysages vallonnés du Tarn aux Cévennes. Une étude menée par le cabinet Inddigo en 2021 pour le CRTL (Comité régional du tourisme et des loisirs) d'Occitanie révèle que la région se place en deuxième position avec 22% des intentions de départ, derrière la Nouvelle-Aquitaine (33%), mais devant la région Auvergne-Rhône-Alpes (14%). Pour autant, l'Occitanie n'arrive qu'en cinquième position en nombre de nuitées vélotouristiques, et en quatrième position pour la programmation par les tour-opérateurs.

D'où l'idée, il y a trois ans, pour le comité régional du tourisme de lancer une stratégie dédiée à l'essor de cette forme de tourisme durable.

« L'Occitanie a la chance de jouir d'une image très positive auprès des voyageurs à vélo. Nous disposons de deux Eurovélos (sur un réseau européen de 17 itinéraires cyclables longue distance), une dizaine de vélos routes et une vingtaine de voies vertes. En revanche, dans les faits, la région a encore beaucoup de marge pour figurer en première position en matière de nuitées et de la programmation par les tours opérateurs par rapport à des destinations comme la Nouvelle-Aquitaine ou l'Auvergne Rhône-Alpes qui disposent d'itinéraires à forte notoriété », analyse Anne-Laure Barrallon, chargée de mission au sein du CRTL d'Occitanie.

Une vision partagée par Valentine Segrestan, directrice du pôle tourisme de Rêve de Vélo, premier tour opérateur de la région avec 2.000 voyageurs pris en charge chaque année et un chiffre d'affaires qui a bondi de 2 à 3,5 millions d'euros en quatre ans : « Dans notre catalogue de 150 itinéraires, la Loire à vélo est l'itinéraire le plus vendu dans l'Hexagone concentrant 30% de la clientèle, devant la Vélodyssée (longeant la façade atlantique) avec 20% des séjours commercialisés. Le Canal du Midi figure en troisième position en attirant environ 15% de la clientèle.» Face à ces best-sellers, le tour opérateur veut faire connaître auprès de sa clientèle des itinéraires plus récents et moins célèbres. « Les touristes ne connaissent pas toujours par exemple la Passa Païs, une piste cyclable traversant l'arrière-pays héraultais et créée il y a quelques années », glisse Valentine Segrestan.

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Un panier moyen de 68 euros par jour

Pour y remédier, le CRTL Occitanie a puisé dans son budget annuel de 30.000 euros pour lancer des opérations de communication sur les réseaux sociaux, auprès des magazines spécialisés de vélo ou lors du festival du film d'aventure « What a trip » à Montpellier. Une stratégie ciblée pour attirer des voyageurs dotés d'un pouvoir d'achat plus élevé que la moyenne. « Le panier moyen d'un cyclotouriste est de 68 euros par jour alors qu'il s'élève plutôt à 55 euros pour un touriste lambda », calcule Anne-Laure Barrallon.

Et les prix peuvent grimper beaucoup plus haut en passant par un tour opérateur. Par exemple, chez Rêve de vélo, les voyageurs, en majorité des familles, déboursent en moyenne 600 euros pour quatre jours d'excursion. Dans l'Aveyron, l'hôtel Cycling Magnolias accueille en majorité des couples de retraités qui viennent avec d'autres couples d'amis et dépense en moyenne 2.000 euros la semaine par personne pour une pension complète et l'accompagnement d'une voiture suiveuse au cours de l'itinéraire.

Le budget est beaucoup plus réduit pour les jeunes qui optent pour des solutions économiques reposant sur des auberges de jeunesse ou du couchsurfing. Mais cette tranche d'âge représente une cible prioritaire pour le CRTL, en particulier les 22-32 ans en Europe (73 millions de personnes sur le continent), empreints de cette culture du voyage à vélo et très sensibles à l'essor du tourisme durable. Les perspectives de croissance du cyclotourisme sont également boostées par l'essor des vélos électriques qui démocratise ce type de voyage (n'exigeant plus de condition physique particulière).

Capitaliser sur les cols pyrénéens

Au-delà des séjours itinérants, l'Occitanie veut creuser le sillon du voyage cyclosportif, un segment encore plus lucratif. « L'offre cyclosportive est vraiment faible en volume mais pour ses adeptes, le ticket moyen grimpe à 104 euros par jour. Ce segment nous intéresse beaucoup en Occitanie où nous avons la chance de bénéficier des cols pyrénéens », commente Anne-Laure Barrallon. Pour attirer les mordus de montagne, un nouveau challenge, le Trophée des cyclosportives FFC Occitanie a été lancé l'an passé.

Les Pyrénées bénéficient en outre d'une couverture médiatique importante lors du Tour de France (cette année encore la course cycliste a fait escale sur le plateau de Beille et Saint-Lary-Soulan). Les professionnels du secteur capitalisent sur ces étapes avec des offres sur mesure pour les passionnés de la Petite Reine. Le Montpelliérain Rêve de Vélo est le seul tour opérateur français parmi les six organismes officiels du Tour de France. « Nous proposons des accès VIP (à environ 350 euros la journée) aux étapes et nous avons un partenariat avec l'équipe Groupama FDJ. Les clients peuvent rencontrer les coureurs, passer la ligne d'arrivée, monter sur le podium. Sur cette offre, nous observons un véritable essor depuis deux ans », observe Valentine Segrestan.

L'Occitanie compte explorer en parallèle un dernier segment : le cyclosport. C'est un fait méconnu mais l'Occitanie est la première région de France en matière de sites VTT (une quarantaine sur le territoire) et compte aussi une dizaine de Bike Parks.

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