Lithium : le français Eramet et le chinois Tsingshan inaugurent un site d'exploitation en Argentine

Le groupe minier français et son associé chinois ont inauguré mercredi en Argentine un important site d'exploitation du lithium. Pour rappel, le métal blanc est indispensable à la transition énergétique, notamment du secteur automobile, puisqu'il équipe la plupart des batteries électriques.
Une mine de lithium au Chili.
Une mine de lithium au Chili. (Crédits : Reuters)

La course à l'or blanc continue. A 4.000 mètres d'altitude, dans le nord de l'Argentine, le groupe minier français Eramet et son associé chinois Tsingshan ont inauguré mercredi un important site d'exploitation du lithium. L'usine, située à Centenario dans la province de Salta (nord-ouest), représente un investissement de 870 millions de dollars, a indiqué Eramet.

Exploitée par la société commune Eramine (comprenant Eramet à 50,1% et Tsingshan à 49,9%), l'usine doit produire « jusqu'à 24.000 tonnes par an de carbonate de lithium de qualité batterie à pleine capacité », a précisé à l'AFP Christel Bories, PDG du groupe français. Ce dernier détient des droits miniers sur une concession de 560 kilomètres carrés dans cette région. La production commencera en novembre avec 350 salariés initialement. Sur une année, elle permettra d'équiper 600.000 batteries de véhicules.

Le gisement est considéré comme « l'un des plus importants du monde » en volume et en qualité de concentration, avec « 15 millions de tonnes de ressources de carbonate de lithium certifiées » disponibles, a ajouté Christel Bories.

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Un procédé d'extraction différent

Le site en Argentine n'est ni une mine, ni un des « salars » traditionnels que l'on trouve dans le triangle du lithium en Amérique latine (Argentine-Bolivie-Chili), ces lacs de décantation où les sels blancs qui servent à conduire l'électricité à l'intérieur des batteries automobiles, s'amoncellent après évaporation de la saumure dont ils sont issus.

L'usine utilise un procédé novateur dit DLE, « d'extraction directe » du lithium, qui a généré 12 brevets déposés par Eramet. L'entreprise estime qu'il permet à la fois une meilleure efficacité de récupération, une rapidité accrue, et une moindre pression sur les écosystèmes en pompant beaucoup moins d'eau que dans les bassins d'évaporation traditionnels.

Des éléments déterminants pour un secteur en plein boom, dont les effets d'assèchement sur l'environnement sont dénoncés par les ONG : la « prise en compte des impacts sociaux et environnementaux de l'exploitation du lithium, notamment dans les régions désertiques, sont devenus des paramètres cruciaux pour la pérennité des projets d'exploitation », avertit le guide annuel mondial des matières premières CyclOpe, paru mi-mai.

De nouvelles usines prévues

Eramet ne compte pas s'arrêter là et prévoit sur le même site une deuxième usine d'une capacité de 30.000 tonnes par an de carbonate de lithium. Un permis de construire a déjà été déposé. Sa production pourrait commencer « fin 2027 » précise Christel Bories, qui estime possible la création d'une « troisième usine » par la suite. « Pour la deuxième usine, nous avons prévu de recycler en boucle fermée 80% de l'eau utilisée », ce qui permettra de réduire encore la consommation d'eau, a-t-elle ajouté.

Mais ces futurs investissements dépendent notamment du vote par le gouvernement argentin d'un nouveau régime fiscal d'investissement pour les grands projets, notamment dans des secteurs stratégiques pour le pays comme la mine, a précisé la dirigeante.

Côté débouchés, Eramet qui prévoit d'expédier sa production par camion vers un port chilien, « serait ravi de pouvoir contribuer à la chaîne de valeur européenne des batteries, car il n'existe qu'une seule usine de carbonate de lithium qualité batterie en Europe, exploitée par le groupe belge Umicore en Pologne », a-t-elle ajouté.

Le 4e producteur mondial

Avec 9.600 tonnes produites en 2023, l'Argentine est le quatrième producteur mondial d'« or blanc », selon le guide CyclOpe des matières premières, après l'Australie (86.000 tonnes, essentiellement raffiné en Chine), le Chili (44.000 tonnes), et la Chine (33.000 tonnes estimé). La production mondiale, qui a augmenté à 180.000 tonnes en 2023 contre 146.000 tonnes en 2022, selon les statistiques du service géologique américain USGS, pourrait « dépasser les 200.000 tonnes » en 2025, selon une estimation de CyclOpe.

Devant l'envolée de la demande mondiale pour nourrir la transition énergétique, le Chili, voisin de l'Argentine, a annoncé qu'il prévoyait de multiplier par deux sa production de lithium d'ici à dix ans, au risque de sacrifier les fragiles écosystèmes du nord du pays. Le pays vise à redevenir le leader mondial de la production de lithium, après avoir été dépassé par l'Australie en 2016, qui détient 43% de la production mondiale, contre 34% pour le Chili.

Néanmoins, les métaux critiques souffrent de la chute de leurs cours. L'an passé, le prix du lithium a baissé de 75%. Ce qui a pour conséquence de baisser le prix moyen des batteries, et in fine, de réduire les investissements miniers.

Du lithium dans le sous-sol français

De son côté, la France veut simplifier les procédures du droit minier pour accélérer le recours à des ressources prometteuses dans l'objectif d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Le gouvernement a annoncé en avril des mesures de « simplification » prévoyant notamment de diviser par deux les délais d'instruction de permis de recherches pour des projets en géothermie et d'exploration de ressources minières « critiques » comme le lithium et le cuivre.

Ces mesures permettront selon le gouvernement d'accélérer « une quinzaine de demandes de permis de recherche par an en métaux rares ». La France va devoir électrifier à marche forcée : elle aura besoin à l'horizon 2035 de 10.000 à 15.000 tonnes de lithium par an hors recyclage pour alimenter les usines de batteries de véhicules électriques. Et le constat est similaire pour le cuivre. « Le lithium et le cuivre sont les nouveaux 'ors noirs' » et « la France en regorge », a souligné en avril Bruno Le Maire.

Pour moins dépendre des producteurs étrangers, les appétits grandissent donc en France à l'image du projet de mine de lithium mené par Imerys dans l'Allier ou d'autres menés en Alsace. Des projets qui soulèvent cependant des critiques d'associations environnementales.

(Avec AFP)

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Commentaires 2
à écrit le 06/07/2024 à 10:35
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"prévoit d'expédier sa production par camion vers un port chilien" camion électrique ? Pas encore (le minerai de fer suédois va au port de Narvik en train). Chercher des "métaux rares" en France, voire "métaux stratégiques". Le cuivre est rare ? Cer...

à écrit le 04/07/2024 à 11:52
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Pourquoi s'associer à un chinois?? Eramet n'a rien compris ...

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